Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

Roumanie (suite)

En novembre 1918, le gouvernement roumain dénonce le traité de Bucarest et reprend les hostilités contre les Puissances centrales. Après la défaite des Puissances centrales et le démembrement de l’Autriche-Hongrie, la Bucovine (27 oct. 1918) et la Transylvanie (Alba-Iulia, 1er déc. 1918) se réunissent à la Roumanie, parachevant ainsi le processus de formation de l’État national unitaire roumain.

L’établissement de l’État national unitaire roumain — qui consacre l’existence de la communauté constituée au long des siècles entre toutes les provinces de la Roumanie et fixe le cadre national, social, économique et politique nécessaire au développement économique — est entériné sur le plan international par les traités de paix de Saint-Germain (1919) et de Trianon (1920). Le 28 juin 1919, la Roumanie devient membre de la Société des Nations.


L’entre-deux-guerres

Les principaux problèmes auxquels l’État roumain doit faire face sont, sur le plan intérieur, la réfection économique ainsi que la consolidation intérieure de l’État par l’unification législative et, sur le plan extérieur, la sauvegarde de l’intégrité territoriale, le maintien du statu quo.

Sur le plan intérieur, parmi les premières mesures prises figurent la réforme du système électoral, effectuée en décembre 1918 (celle-ci assure une participation plus large des masses, particulièrement des paysans, à la vie politique du pays) et la réforme agraire de juin-juillet 1921, par laquelle on exproprie, avec dédommagement, plus de 6 millions d’hectares, c’est-à-dire 66 p. 100 de la superficie totale des terres détenues par les grands propriétaires fonciers. La réforme agraire, bien qu’elle ne résolve que partiellement le problème paysan, contribue au développement de l’agriculture et restreint le pouvoir économique et politique des gros propriétaires terriens (le parti conservateur disparaîtra de l’arène politique).

Au cours des années 1918-1920, le mouvement révolutionnaire connaît un important essor, qui culmine par la grève générale d’octobre 1920. À une forte majorité, le congrès général du parti socialiste (8-12 mai 1921) décide de transformer ce dernier en parti communiste roumain (P. C. R.).

En 1923 est adoptée une nouvelle Constitution, aux termes de laquelle la Roumanie est déclarée un « État national unitaire et indivisible ». Elle formule en outre des principes à caractère démocratique (liberté du travail, liberté de la parole et des réunions, liberté de la presse, égalité des droits pour tous les citoyens, sans égard à leur nationalité, etc.).

Au cours des années 1923-1929, la Roumanie connaît une période nouvelle, caractérisée par l’accélération du développement économique (l’industrie en particulier) et par une relative stabilité politique.

À la mort du roi Ferdinand Ier (20 juill. 1927), un conseil de régence est institué pour diriger le pays pendant la minorité du roi Michel, dont le père, le prince Charles, a renoncé en 1925 à ses droits au trône. Rentré au pays, le prince Charles est proclamé roi de Roumanie le 8 juin 1930 sous le nom de Carol II, ou Charles II (1930-1940). Les premières années du nouveau règne sont marquées par les graves conséquences de la crise économique mondiale (1929-1933). La politique des milieux gouvernementaux, qui tentent de résoudre les effets de la crise en contractant à l’étranger des emprunts ou en recourant à des réductions massives de salaires et de personnel ainsi qu’à l’augmentation de la fiscalité, provoque des luttes sociales (notamment des grèves, dont la plus importante est celle des mineurs de Lupeni en août 1929). La protestation des travailleurs culmine avec les mouvements revendicatifs des ouvriers du pétrole à Ploieşti et des cheminots des Ateliers ferroviaires Griviţa à Bucarest (janv.-févr. 1933).

Sur le plan extérieur, la Roumanie qui, après la Première Guerre mondiale, a suivi avec constance l’orientation générale de la France et de la Grande-Bretagne, entreprend une série d’actions politiques, économiques et diplomatiques visant à la consolidation de l’État national unitaire roumain, au maintien de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale. C’est en ce sens qu’elle signe en 1921 des traités d’alliance bilatéraux avec la Tchécoslovaquie et la Yougoslavie, jetant ainsi les bases d’un organisme politique international connu sous le nom de Petite-Entente ; de même, en 1921, elle conclut avec la Pologne un traité d’alliance à caractère défensif.

Soucieuse de maintenir la paix par le respect du statu quo territorial, elle renouvelle en 1926 le traité d’alliance conclu avec la Pologne en 1921 et signe en 1926 un traité d’amitié et d’arbitrage avec la France (prorogé en 1936) ; en même temps, par la conclusion d’un traité avec l’Italie (1926), le gouvernement roumain normalise ses rapports avec ce pays.

Au cours des années suivantes, tout en participant aux actions diplomatiques entreprises par les grandes puissances antirévisionnistes (adhésion au pacte Briand-Kellogg de 1928), la Roumanie prend l’initiative d’une série de mesures en faveur d’un rapprochement entre les pays de l’Europe centrale et de la péninsule balkanique. Elle participe aux conférences de la Petite-Entente à Belgrade (1929) et à Štrbské Pleso (1930), où sont adoptées d’importantes résolutions ayant trait à la consolidation de la Petite-Entente ; à la conférence de Thessalonique (1930), elle soutient la nécessité de créer un organisme politique englobant tous les États balkaniques. En même temps, elle contribue au règlement définitif du problème des réparations de guerre lors des conférences de La Haye (1929 et 1930). Enfin, à l’occasion des assemblées générales de la Société des Nations (1930 et 1931), présidées par le ministre des Affaires étrangères de Roumanie Nicolaie Titulescu (1882-1941), elle milite pour la solution des problèmes du désarmement et de la sécurité.