Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Rotterdam (suite)

Les activités tertiaires

L’image de Rotterdam, ville laborieuse faiblement pourvue en services, ne correspond que partiellement à la réalité. La ville joue certes moins qu’Amsterdam un rôle de direction de la vie économique (dans le domaine financier surtout), et son rayonnement culturel est très inférieur. Mais les fonctions tertiaires de la ville constituent un volet important de son économie et se sont sensiblement accrues au cours de la dernière décennie. Certaines constituent la conséquence directe des activités portuaires. Rotterdam est ainsi un grand marché de matières premières et de produits agricoles (huiles, peaux, coton, produits horticoles, bétail) et le second centre néerlandais de commerce de gros ; on y trouve les agences et les bureaux de nombreuses sociétés commerciales, compagnies d’assurances, sociétés d’affrètement et d’armement maritime néerlandaises et étrangères. Les Nord-Américains et les Japonais en particulier en ont souvent fait le point de pénétration de leurs initiatives à l’intérieur du Marché commun. La ville connaît une intense circulation d’hommes d’affaires étrangers qui ont à leur disposition un bon équipement hôtelier et des salles de réunion et de congrès. Les écoles techniques de la navigation, le musée de la Marine et, dans une certaine mesure, l’université économique se rattachent aussi à la fonction maritime du grand port.

Rotterdam est également une capitale régionale bien pourvue en commerces de détail et en équipements sanitaires et culturels (orchestre philharmonique, compagnie théâtrale) ; si son influence est limitée vers le nord par la proximité d’Utrecht et surtout de La Haye, elle s’étend largement au sud sur une partie du Brabant-Septentrional* et de la Zélande, d’où provient une fraction de la main-d’œuvre du port et des industries. Les relations routières directes avec la Zélande, établies dans le cadre du plan Delta*, y ont déjà sensiblement accru l’emprise de la ville.


Les paysages urbains

L’agglomération comprend surtout des quartiers construits à la fin du xixe s. et au xxe s. En effet, la ville historique, de dimensions assez modestes (elle n’a jamais abrité plus de 60 000 hab. avant le xixe s.), a été durement touchée par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, qui n’en ont laissé subsister que des vestiges comme l’hôtel de ville, miraculeusement épargné. De la forte croissance urbaine de 1870 à 1930 témoignent des quartiers assez monotones de maisons basses, de résidences bourgeoises et surtout ouvrières, autour du vieux centre sur la rive nord, mêlés aux usines sur la rive sud, où l’agglomération s’est étendue à partir de la fin du xixe s. Les formes d’urbanisation plus récentes comprennent deux types principaux d’habitat : les cités-jardins (avec des maisons individuelles), dont les premières ont été implantées avant 1939, et les grands ensembles, qui caractérisent bien l’extension contemporaine, en particulier dans les polders du nord-est de la ville (Prins Alexanderpolder). Les noyaux anciens de Schiedam (83 000 hab. aujourd’hui), célèbre pour ses distilleries, et de Vlaardingen (82 000 hab.), qui conserve un organisme portuaire indépendant (6 Mt par an), forment maintenant avec Rotterdam une agglomération continue. La ville ne dispose pas vraiment d’une banlieue résidentielle aisée : cela tient à la fois à une représentation relativement faible des catégories sociales à hauts revenus et à la proximité de l’agglomération de La Haye, avec laquelle interviennent d’importants échanges de main-d’œuvre.

Sur la rive sud, d’urbanisation plus récente, on a pu préserver des zones vertes entre la ville et les anciens villages (Hoogvliet en particulier), qui abritent désormais une part notable de la main-d’œuvre du Rijnmond. C’est vers les « îles » de Voorne et Putten, tenues à l’écart de l’industrialisation, que l’on espère orienter la croissance future de l’agglomération, notamment autour de Spijkenisse et de Hellevoetsluis. La coordination des extensions portuaires, industrielles et résidentielles est facilitée par l’existence (depuis 1964) du Rijnmond.

Sauf dans certains quartiers anciens, la séparation spatiale des fonctions apparaît très nettement à l’échelle de l’agglomération : activités portuaires et industrielles sur la rive sud de la Nieuwe Waterweg, résidences au nord-est et au sud-ouest de la ville, commerces et services dans le centre reconstruit, où la disparition du bâti ancien a permis une bien meilleure adaptation du contenant au contenu qu’à Amsterdam par exemple. Le cœur de la ville se caractérise aujourd’hui par de larges avenues et de vastes espaces de stationnement, bordés de bâtiments à plusieurs étages occupés par les bureaux des sociétés commerciales, financières et industrielles (Amsterdam-Rotterdam Bank, Shell, etc.), la Bourse, la poste centrale, l’hôtel Hilton. L’immeuble du commerce de gros (Groot Handelsgebouw) rassemble la plupart des grandes firmes travaillant dans cette branche et abrite à lui seul dans la journée près de 6 000 salariés. Les commerces et les services destinés à la population locale et régionale sont également très représentés dans ce centre des affaires : salle de concerts, théâtres, cinémas, restaurants, agences de voyages, grands magasins et une galerie marchande pour piétons, le Lijnbaan, qui fut la première du genre en Europe. Plus de 100 000 personnes, surtout des employés et des cadres, travaillent dans le centre-ville ; l’animation nocturne est beaucoup moins intense, car la fonction résidentielle du quartier a été considérablement réduite à la suite de sa destruction et de sa reconstruction.

Une agglomération de cette taille, parcourue par un intense trafic de marchandises et de voyageurs, coupée par une voie d’eau importante et des bassins portuaires, pose de délicats problèmes de circulation. La jonction entre les deux rives est assurée depuis 1942 par le Maastunnel, auquel se sont ajoutés en 1964 le pont de Brienenoord (autoroute E 10, dont le contournement de la ville est en voie d’achèvement) et en 1967 le Beneluxtunnel, qui relie Hoogvliet et Pernis à Vlaardingen et Schiedam ; en outre, une ligne de métro nord-sud, mise en service en 1968, a permis de diminuer l’engorgement des axes routiers.