Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

républicain (parti) (suite)

Le parti aujourd’hui

Aujourd’hui, le parti n’est plus majoritaire. Il peut, au maximum, compter sur 40 p. 100 des électeurs. Pour porter son candidat à la présidence des États-Unis, il lui faut mordre sur l’électorat démocrate ou tirer profit de la division des adversaires. Alors que les démocrates choisissent souvent leurs chefs parmi les fils de familles aisées — ce fut le cas de F. D. Roosevelt ou des frères Kennedy* —, les républicains préfèrent faire appel aux self-made men — comme Nixon* — ou aux hommes providentiels — comme le général Ulysses Simpson Grant (1822-1885) et Eisenhower, tous deux auréolés du prestige de la victoire militaire. L’électorat républicain habite, en général, le Middle West et l’Ouest, les campagnes et les banlieues. Il se compose d’hommes d’affaires, de cadres, d’Américains de vieille souche (ceux qu’on appelle les « white anglo-saxon protestants »). Depuis une dizaine d’années, le parti s’est implanté dans le Sud : là, les adversaires de la déségrégation refusent d’associer leurs voix à celles des démocrates du Nord ; ils préfèrent voter républicain, au moins pour les élections présidentielles. C’est que les républicains, contrairement à ce qui fut dans le passé, répugnent à laisser le gouvernement fédéral venir en aide aux Noirs des ghettos du Nord et préfèrent que les États s’occupent eux-mêmes du problème racial.

S’agissant de la vie économique et sociale, le parti s’est lentement remis du choc qu’a provoqué le New Deal. Jusqu’en 1940, il est systématiquement hostile à l’extension des pouvoirs du gouvernement fédéral. Ce serait, soutient-il, faire le lit du socialisme et aller contre la tradition de l’individualisme, fondement du caractère américain. Puis il comprend son erreur et adopte une attitude assez proche de celle des démocrates, sauf à faire voter en 1947 la loi Taft-Hartley (Taft-Hartley Act), qui limite les activités des syndicats. Mais il n’en conserve pas moins une solide méfiance à l’égard des dépenses fédérales : s’il intervient trop, le gouvernement de Washington devra augmenter les impôts et détruira l’esprit d’initiative, hérité des pionniers ; les affaires marcheront moins bien.

Longtemps isolationniste, surtout par esprit nationaliste, le parti républicain, là aussi, a fait amende honorable après 1940. Avec plus d’énergie et moins de mauvaise conscience, il a défendu le rôle de gendarme que les États-Unis se sont donné depuis 1945. Pour discréditer l’adversaire démocrate, il n’a pas hésité à soutenir la campagne violemment anticommuniste du sénateur Joseph McCarthy, même s’il a refusé de la mener jusqu’à ses ultimes excès. Les républicains acceptent volontiers de négocier avec l’ennemi potentiel, qu’il soit russe ou chinois, dans un esprit empreint de réalisme. Ce qui compte, ce sont les rapports de puissance ; l’Amérique défendra ses idéaux si elle possède de puissants moyens militaires et s’en sert dans les circonstances graves. De Théodore Roosevelt à Richard Nixon* et à Gerald Ford, on retrouve la même real-politic, que détestaient à des degrés différents T. W. Wilson* et Franklin D. Roosevelt. Mais, répliquent les républicains, les hésitations et les fausses manœuvres des démocrates conduisent le pays dans des guerres dont seuls, par notre solide réalisme, nous parvenons à le tirer, comme ce fut le cas pour la Corée ou l’Indochine.

Le parti républicain semble regrouper les conservateurs. Pourtant, à l’intérieur, les débats ne manquent pas, et les tendances s’opposent. Une aile franchement réactionnaire, représentée par le sénateur Barry Goldwater ou Ronald Reagan, le gouverneur de Californie, parvient quelquefois à imposer sa loi : basculant à droite, comme en 1964, le parti court alors à la défaite. Une aile libérale, où l’on retrouvait en 1968 Nelson A. Rockefeller, le gouverneur du New York, John V. Lindsay, le maire de New York, et Spiro T. Agnew, le gouverneur du Maryland, tâchait de faire sentir son poids, qui, aujourd’hui, s’est réduit encore par les défections et les divisions. Au niveau national, les républicains sont condamnés à trouver l’homme qui puisse satisfaire la vieille garde, les libéraux et attirer des démocrates et des indépendants. L’insuccès d’un président démocrate est un secours inappréciable, tout comme le choix d’un candidat démocrate trop « radical » : Nixon en tira le meilleur parti en 1968 et en 1972. Mais les républicains ont subi les conséquences de l’affaire du Watergate, et, malgré les efforts du président Gerald Ford pour redonner au parti une image de marque attrayante, les élections de 1976 portent à la présidence le démocrate Jimmy Carter.

A. K.

➙ Démocrate (parti) / Eisenhower (D. D.) / États-Unis / Lincoln (A.) / Nixon (R.) / Roosevelt (T.) / Sécession (guerre de).

 C. Rossiter, Parties and Politics in America (Ithaca, N. Y., 1960, nouv. éd., 1964 ; trad. fr. Démocrates et républicains, Seghers, 1965). / G. H. Mayer, The Republican Party (New York, 1964 ; 2e éd., 1967). / A. Kaspi, la Vie politique aux États-Unis (A. Colin, 1970).

République (IIe)

Régime politique français établi à la suite de la révolution de février 1848 et qui prit fin le 2 décembre 1852 par la proclamation de l’empire.



La République démocratique et sociale (févr.-avr. 1848)

Le 24 février 1848, Louis-Philippe Ier* abdique. Quelques milliers d’insurgés parisiens ont eu raison en quarante-huit heures (v. révolutions de 1848) d’un régime apparemment solide. Toutes les combinaisons péniblement échafaudées par les personnalités orléanistes, Odilon Barrot ou Thiers*, pour empêcher l’irréparable, s’écroulent. Le peuple, maître de la rue, envahit l’Assemblée et fait échouer la régence. Fort opportunément, Lamartine* et ses amis font acclamer par les manifestants une liste de personnalités susceptibles de constituer le nouveau gouvernement. Il s’agit en majorité de bourgeois républicains de la tendance du National, le journal d’Armand Marrast, appelés en fait rapidement à partager les honneurs et les responsabilités avec leurs concurrents de la Réforme, démocrates et proches des insurgés. Conformément à la tradition, le pouvoir révolutionnaire reçoit la consécration populaire à l’Hôtel de Ville. Révolution surprise à plus d’un titre. En premier lieu, les progrès de l’expérience politique chez les révolutionnaires parisiens sont patents. On ne refera pas le « coup de 1830 », et la pression populaire exige et obtient la proclamation de la république (24-25 févr.), sauf ratification ultérieure par le peuple, précise Lamartine, ce qui institue de facto le suffrage universel (dont le principe sera adopté le 2 mars).