Peuple sémitique de l’Antiquité, qui occupa le littoral du couloir syrien et dont les représentants fondèrent des villes et des comptoirs depuis Chypre jusqu’au Maroc.
Cananéens et Phéniciens
Pour nous, le nom de Phéniciens vient du mot « Phoinikes », qui, en grec, évoque, outre ce peuple, la pourpre (production caractéristique de la Phénicie) et le palmier (qui se rencontre sur le littoral de ce pays). Mais Phoinikes vient peut-être d’un terme local, celui dont les Égyptiens auraient tiré Fenkhou, mot qui désigne, dans leurs textes, entre le xxve et le ve s. av. J.-C., les habitants d’une région du couloir syrien. Plus impressionnés encore par les dires d’Hérodote (ve s. av. J.-C.) — Tyr aurait été fondée 2 300 ans avant lui (v. 2750 av. J.-C.), et les Phéniciens seraient originaires des bords de la mer Érythrée (mer Rouge, mer d’Oman et golfe Persique) —, les historiens modernes pensent volontiers que ce peuple est arrivé sur le littoral méditerranéen au début du IIIe millénaire et s’y est maintenu sans grands changements jusqu’à l’époque romaine.
Les textes égyptiens et cunéiformes et l’archéologie, qui révèle une évolution complexe, invitent à nuancer ces positions. Sans parler des temps antérieurs, on ignore tout de l’appartenance ethnique ou linguistique des habitants du couloir syrien durant le IIIe millénaire, sauf que leur culte comprend des bétyles et des plates-formes sacrificielles, éléments attestés à l’époque historique chez différents peuples sémitiques de l’aire syro-mésopotamienne. À cette population s’ajoutent les groupes qui envahissent le couloir syrien du xxive au xixe s. et dont le seul historiquement connu est celui des Amorrites (ou Sémites occidentaux).
Du xixe s., époque à laquelle la vie sédentaire redevient la norme, au xiie s., qui voit de nouvelles invasions, la Palestine et la quasi-totalité de la côte du couloir syrien connaissent une civilisation commune, que les archéologues ont appelée cananéenne (de Canaan, nom donné par la Bible à la Palestine avant l’arrivée des Israélites). Ce terme conventionnel est confirmé par les textes du couloir syrien qui, au xive s., nomment le domaine asiatique du pharaon (côte du couloir syrien jusqu’à Ougarit*, au nord, et Palestine) Kinahhou (c’est le même mot que Canaan et cela signifierait « pourpre » en hourrite, une des langues de la région à cette époque). Mais, après les invasions du xiie s. qui amènent dans le couloir syrien de nouvelles ethnies (Philistins, tribus et peuples araméens), le domaine de la civilisation cananéenne se réduit à la côte, et encore les Néo-Hittites et les Araméens, au nord, les Philistins et les Hébreux*, au sud, viennent-ils se mêler aux Cananéens du littoral. Seule la partie centrale de la côte, du mont Casios (auj. djabal Aqra, à la frontière de Turquie et de Syrie), au nord, à ‘Akko (Acre), au sud, protégée par les montagnes du djabal Anṣariyya et du Liban, garde son indépendance politique. C’est dans cette région et à cette époque (xiie s.) que commence, à notre sens, le domaine phénicien, qui hérite de la tradition cananéenne, mais qui en diffère et par le jeu de l’évolution interne et par le fait que l’apport culturel des Égyptiens et des Hourrites* établis dans la région au bronze récent (xvie-xiiie s.) est maintenant totalement assimilé.