Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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paléomagnétisme (suite)

Structure du champ magnétique terrestre

L’ensemble des valeurs obtenues pour le Quaternaire et le Pliocène montre qu’en moyenne le champ terrestre est resté semblable au champ créé par un dipôle axial approximativement géocentrique. Bien que, pour les périodes plus anciennes, ce fait n’ait reçu que quelques vérifications fragmentaires, on admet que cette assimilation est légitime tout au long de l’histoire de la planète.


Les inversions du champ terrestre

La polarité du champ terrestre n’est pas fixe au cours du temps ; elle est soit conforme (normale), soit opposée (inversée) à la polarité actuelle. On définit dans le passé des périodes magnétiques : intervalles de temps durant lesquels le champ terrestre a gardé une polarité donnée. À l’intérieur d’une période peuvent exister des intervalles de temps plus courts, les épisodes, durant lesquels le champ garde une polarité opposée à celle de l’ensemble de la période.


L’intensité du champ terrestre

Elle est difficile à atteindre. Il semblerait que, tout en présentant des fluctuations, elle ait gardé durant le Tertiaire et le Quaternaire un ordre de grandeur peu différent de la valeur actuelle. Elle pourrait avoir été plus faible au Paléozoïque. Au Précambrien, on retrouverait des valeurs assez élevées.


Applications du paléomagnétisme


L’expansion des fonds océaniques

On sait que les mesures faites en mer ont montré l’existence, de part et d’autre des crêtes des dorsales, de bandes d’anomalies magnétiques alternativement positives et négatives.

En maints endroits, on a pu établir une bonne corrélation entre les profils magnétiques suivant la perpendiculaire à la crête des dorsales et la succession des périodes normales et inversées en remontant dans le passé. En attribuant les anomalies à l’existence, dans la couche volcanique des fonds marins, d’aimantations thermorémanentes dues au refroidissement au voisinage des crêtes, de matériaux venus de la profondeur, on explique les phénomènes observés. L’emplacement correspondant à la limite (3,35 × 106 ans) des périodes magnétiques de Gauss et de Gilbert étant repéré sur les profils, l’estimation de sa distance à la crête de la dorsale définit un taux moyen d’expansion des fonds. Ce taux est supposé être resté constant dans l’océan Atlantique Sud, pris comme référence.

Des corrélations établies entre les anomalies relevées dans les divers océans permettent de chiffrer les divers taux d’expansion (de 1 à 8 cm par an) et les âges correspondant aux flancs des dorsales.


La détermination des dérives continentales

En supposant valable l’assimilation du champ terrestre moyen au champ d’un dipôle axial géocentrique, on peut calculer la paléolatitude et la paléo-orientation ΔS pour une région donnée de l’écorce si l’on a déterminé pour cette région l’inclinaison moyenne Io et la déclinaison moyenne Do de l’aimantation d’un ensemble de formations d’âge donné

On peut aussi, ce qui revient au même, supposer fixée dans ses coordonnées actuelles, LS et λs, la région considérée et calculer les coordonnées géographiques Lp et λp, du pôle ancien qui lui correspond.

Lorsqu’on effectue de tels calculs, on trouve des valeurs assez cohérentes pour les paléolatitudes et les paléo-orientations correspondant aux divers emplacements des portions restées stables d’un même continent et, par contre, des divergences nettes entre les valeurs correspondant à des zones appartenant à des continents différents. Cela est un argument très fort en faveur de la réalité des dérives continentales, que les valeurs obtenues permettent de préciser. On doit, toutefois, souligner que la paléolongitude demeure inconnue ; d’où une indétermination pour tracer la configuration de la surface terrestre aux diverses époques du passé.


Applications relatives à la stratigraphie

Pour les fonds océaniques, l’identification dans les carottes de sédiments des diverses périodes magnétiques et de leurs limites a permis l’évaluation des taux de sédimentation dans diverses régions.

Dans les formations continentales, l’observation de similitudes de directions d’aimantation, d’analogies ou de différences dans la polarité peut recevoir des applications. Toutefois, en ce qui concerne les déterminations d’âge, la méthode paléomagnétique ne peut fournir dans l’absolu que de très grossières indications.


Applications relatives à la tectonique

L’observation comparée des aimantations rémanentes peut conduire à des conclusions de grand intérêt sur le plan régional (courbure de l’île de Honshū, rotation de la Corse et de la Sardaigne, etc.) ou local (déterminations relatives aux plissements, etc.).

A. R.

 E. Irving, Paleomagnetism and its Applications to Geological and Geophysical Problems (New York, 1964). / D. H. Tarling, Principles and Applications of Palaeomagnetism (Londres, 1971). / E. Thellier, « Magnétisme interne », dans Géophysique sous la dir. de J. Goguel (Gallimard, « Encycl. de la Pléiade », 1971).

paléontologie

Science des fossiles*.



Développement historique

Les premières collections de fossiles datent essentiellement du xviiie s., époque à laquelle les gens cultivés constituaient des cabinets d’histoire naturelle. C’est alors que furent publiés les premiers ouvrages consacrés exclusivement aux fossiles, illustrés de nombreuses gravures ; l’Oryctologie (1755) du chevalier Dezallier d’Argenville, le Traité des pétrifications (1742) de Louis Bourguet. Nous devons à Buffon* (1707-1788) la notion d’animaux disparus : celui-ci avait reçu d’un officier français d’Amérique du Nord, Longueil, des dents de Mastodontes ; il comprit que de telles dents n’existaient plus de nos jours et qu’elles avaient certainement appartenu à des animaux qui avaient cessé de vivre sur la Terre. Cependant, le fondateur incontestable de la paléontologie fut Cuvier* (1769-1832) ; nous lui devons une description extrêmement précise — et qui sur bien des points n’a pas été corrigée depuis — de tous les Vertébrés fossiles connus de son temps (Recherches sur les ossements fossiles, 1812) ; dans cet ouvrage, Cuvier décrivait en particulier la faune de l’Éocène de Montmartre, comprenant des Mammifères aujourd’hui tous disparus. Il eut le mérite de comprendre que les fossiles devaient être étudiés, à la lumière de l’anatomie comparée, comme des organismes ayant été vivants. « À la voie de l’anatomie comparée, chaque os, chaque fragment d’os trouva sa place. » Cuvier prétendait appliquer à l’étude des fossiles le principe des corrélations. Selon ce principe, les différentes parties d’un organisme sont dépendantes les unes des autres. « La forme de la dent entraîne la forme du condyle... comme l’équation d’une courbe entraîne toutes ses propriétés. » Ce principe souffre toutefois de nombreuses exceptions : ainsi on connaît des Ongulés ayant des dents à croissance continue, mais des griffes au lieu de sabots ; ce sont les Chalicothéridés, Mammifères oligocènes et miocènes. Cependant, l’immense majorité des conclusions anatomiques de Cuvier s’avèrent justes ; la synthèse proposée par Cuvier pour expliquer l’existence de fossiles correspondant à des organismes disparus n’est pas toutefois à la hauteur de ses études concrètes. On sait que Cuvier était fixiste et qu’il expliquait la succession des faunes, telle que la révèle la paléontologie, par des créations et des destructions successives alternant régulièrement, la création suivant la destruction ; cette conception, dite encore « théorie des révolutions du globe », devait être peu à peu abandonnée au cours du xixe s., au fur et à mesure que progressait dans l’opinion des savants la « théorie de l’évolution* ».