Journal de l'année 1er juillet - 31 décembre 1982 1982Éd. 1982

Démographie

La France prend des rides

C'est une affiche représentant Marianne en train de faire joyeusement moisson de chiffres sur l'Hexagone qui annonçait le 31e recensement de la population française depuis 1801, le 6e depuis la Seconde Guerre mondiale (1946, 1954, 1962, 1968, 1975).

Premiers résultats

Les délégués de l'INSEE, au nombre de 2 800, collationnent les renseignements et les transmettent aux ordinateurs. Le coût total de l'opération a été chiffré à 400 millions de F (soit environ 8 F par habitant). Les questionnaires représentent quelque 135 tonnes de papier.

Les résultats n'arrivent que progressivement ; ce n'est qu'à la fin de 1984 que l'on aura une photographie précise et complète de la population française, de sa situation sociale au moment du recensement. Mais des sondages auront permis d'actualiser les données.

Cependant, durant l'été 1982, les premiers chiffres commencent à tomber. On apprend que la France, qui comptait environ 20 millions d'habitants en 1345, 27 millions en 1801, 40 millions et demi en 1946 et 50 millions en 1968, avait, au 4 mars 1982, 54 257 300 habitants. Entre 1975 et 1982, la population de la France métropolitaine n'a crû que de 0,4 %par an contre 0,8 % de 1968 à 1975. Cette croissance, faible, est due à l'excédent des naissances sur les décès, le solde positif de l'immigration n'ayant été que de 181 000 de 1975 à 1982.

La densité de la population française reste faible : elle atteint péniblement 100 habitants au kilomètre carré, alors que la densité aux Pays-Bas est de 344, en Allemagne fédérale de 247, dans le Royaume-Uni de 229, en Italie de 189. La Lozère est toujours le département le moins peuplé (14 habitants par kilomètre carré) et les Hauts-de-Seine le plus densément peuplé (7 900). Quatre régions représentant 18 % de la superficie du pays regroupent 43 % de la population : ce sont l'Île-de-France, Rhône-Alpes, Provence-Côte d'Azur et Nord-Pas-de-Calais. La population de l'Île-de-France dépasse pour la première fois les dix millions d'habitants (10 056 100 exactement), mais sa croissance n'a été que de 0,3 % entre 1975 et 1982 contre 0,9 % pour 1968-1975.

Cet accroissement est dû à l'excédent des naissances sur les décès, car les arrivées de provinciaux ne compensent pas les départs. On boude la région parisienne. Ce phénomène est d'autant plus sensible que les départements de la grande couronne (Seine-et-Marne, Essonne, Yvelines et Val-d'Oise) croissent plus que ceux de la petite couronne (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Hauts-de-Seine) : ils enregistrent une augmentation de 386 500 personnes et rassemblent près de 40 % de la population de la région.

Paris, qui totalisait 41,3 % de la population de la région en 1946, n'en représente plus, avec 2 168 300 habitants, que 21,6 %. La capitale a perdu 622 000 habitants par rapport à 1962.

Les chiffres du recensement ne font pas le bonheur de tout le monde. Il y a des maires qui en prennent connaissance avec appréhension : ceux dont la commune a une population en nette diminution ; les subventions accordées vont, en effet, diminuer elles aussi. La population française se ride. La France est un pays en voie de dépeuplement. Elle va perdre des habitants dans les années à venir au lieu d'en gagner : c'est ce qui arrive à la RFA et c'est la menace qui pèse sur la plupart des pays industrialisés.