Les 3 objectifs assignés à ce plan à étapes sont de soutenir les victimes, renforcer la capacité d'intervention des établissements et conduire une action éducative globale. Pour ce faire, les principales mesures concernent une concentration très importante des ressources sur ces sites (15 000 emplois-jeunes comme aides-éducateurs, personnel d'éducation, personnel médico-social, appelés du contingent...), un dispositif d'observation permanent, une gestion des ressources humaines adaptée, des sanctions aggravées, une formation spécifique des personnels, un partenariat renforcé, notamment par la création des contrats locaux de sécurité élaborés conjointement par le préfet, le procureur de la République et le maire en association avec le recteur. Cette expérimentation est suivie et évaluée par l'Inspection générale de l'éducation nationale et des équipes de chercheurs. Elle s'intègre dans le plan ministériel d'ensemble de lutte contre le fléau placé sous la responsabilité des directions du ministère.

Une augmentation de la violence « à bas bruit » et des « incivilités »

Les premiers résultats de ces actions montrent que, sur le plan statistique, les faits de violence graves sont en diminution, mais que la violence « à bas bruit » et les « incivilités » ont tendance à augmenter fortement, surtout chez les plus jeunes. Les chercheurs mettent plus particulièrement en évidence les phénomènes suivants :
– un durcissement de terrain tant dans la relation entre élèves qu'entre élèves et enseignants – le sentiment d'agressivité croît fortement ;
– un effet « établissement » réel, qui permet, dans des conditions « défavorables » équivalentes, à certains établissements de lutter avec succès contre la violence – mais l'effet « classe », qui reste à étudier, ne serait-il pas plus performant ? ;
– l'arrivée et l'intégration réussie au collège des emplois-jeunes, aides-éducateurs, particulièrement dans leur mission d'aide, d'écoute, d'encadrement des jeunes et dans celle de « participant » à la médiation dans le cadre de la prévention et de la gestion de crise entre élèves.

Des modèles explicatifs

Il serait illusoire et même irresponsable de proposer des actions de lutte contre la violence dans les établissements scolaires sans les faire précéder d'esquisses de modèles explicatifs qui situent mieux les causes selon les contextes multifactoriels dont cette violence est issue.

En premier lieu, il faut souligner ce que la plupart des enquêtes et des recherches mettent en évidence : le cœur des solutions se trouve au sein même de l'établissement scolaire, quelles que soient la volonté de participation des partenaires et l'efficacité de leurs interventions. La confrontation d'un certain nombre de monographies a mis en évidence de façon presque « caricaturale » deux constats. L'un prouve par ses réussites la nécessité absolue d'une prise en compte éducative et pédagogique, à titre préventif et curatif, des comportements violents. L'autre, qui est une démonstration a contrario, se caractérise par ses échecs dus essentiellement à la non-reconnaissance et à la négation des faits ainsi qu'au recours systématique, tant comme cause invoquée que comme remède effectif, à « l'autrui de l'extérieur ».

Cette conception fataliste, sous-tendue par l'argument (réel) que la violence est un fait de société et celui (discutable) qui veut que ses racines et ses causes soient exclusivement « exogènes », entraîne les « démissions successives et en cascade » des différents niveaux de responsabilité institutionnels et instaure alors les conditions les plus favorables au développement de la violence à l'école. Laisser se développer ce « laxisme », c'est faire son deuil de toute politique préventive secondaire et laisser le champ à la seule répression.

Il est évident que l'école ne peut supprimer les composantes sociales et économiques de la violence « importée », mais qu'elle doit les intégrer dans la construction de ses actes éducatifs. Les enseignants qui refusent de les reconnaître sont alors complètement désarmés sur le plan éducatif. Demandeurs de répression et de protection, ils contribuent alors à renforcer les phénomènes d'exclusion et d'affrontement.