La bonne santé des Pays-Bas se maintient malgré une croissance légèrement plus faible en 1996 qu'en 1995 (2 %, contre 2,5 %), qui n'empêche pas l'emploi de progresser, stimulé par d'importants allégements de charges patronales. Renonçant à l'objectif de réduction du déficit, le gouvernement choisit de ne pas couper dans les dépenses tout en poursuivant sa politique de baisse du coût du travail. Dans le reste de l'Europe du Nord, l'activité est repartie au second semestre sous l'impulsion de la demande étrangère. La baisse des taux d'intérêt compense l'effet restrictif des politiques budgétaires : les déficits ont été réduits grâce à d'importantes augmentations des impôts directs sur les ménages, particulièrement en Suède.

Europe méditerranéenne

En Italie, le nouveau gouvernement de Romano Prodi réduit le déficit budgétaire (6 % du PIB), alors que la charge de la dette continue d'absorber près du quart des recettes fiscales, mais au prix de mesures exceptionnelles (lutte contre la fraude fiscale, gel des embauches de fonctionnaires, baisse des prestations sociales), qui sont venues s'ajouter aux augmentations de la TVA et des cotisations sociales de 1995.

L'arrêt de la dépréciation de la lire, continue depuis la dévaluation de novembre 1992, a nettement ralenti les exportations des entreprises italiennes, qui ne gagnent pas de nouvelles parts de marché en 1996. Mais les augmentations de salaire, programmées tous les deux ans depuis les accords entre partenaires sociaux de 1993, permettent à la consommation de tirer la croissance italienne. Au total, la croissance (2 %, contre 3 % en 1995) est bien équilibrée cette année.

En Espagne, le nouveau gouvernement, élu au printemps, accentue la rigueur budgétaire en gelant les dépenses d'infrastructures. Le déficit public reste élevé (5 % du PIB, contre 4 % en 1995) et les taux d'intérêt, pour tenir l'objectif de réduction de l'inflation à 3 % en 1997 (contre plus de 4 % en 1996), baissent moins que dans le reste de l'Europe. Ménages et entreprises attendent encore d'importants ajustements, d'autant plus que subsiste une forte incertitude sur l'ampleur des moyens que le gouvernement de Jose Maria Aznar va mettre en œuvre pour tenir ses objectifs de réduction des déficits. Après le maximum atteint en 1994, la croissance n'est pas assez soutenue pour faire reculer le chômage, qui reste le plus élevé au sein des pays développés (22 % de la population active).

Stabilisation dans les pays de l'Est

En Europe de l'Est, la croissance reste importante, même si le développement du secteur des services, dans les grandes métropoles, accroît les disparités entre les villes et les campagnes. Alors que les exportations avaient été l'élément le plus dynamique de 1995, l'investissement prend cette année le relais. Le chômage recule dans tous les pays : les ajustements entamés avec la transition démocratique et économique du début des années 80 ont commencé à porter leurs fruits. Le recul du chômage, en particulier en Pologne et en République tchèque, n'est pas seulement le fruit d'une activité soutenue, mais aussi celui de la diminution de la population active : une partie importante de la main-d'œuvre s'est en effet retirée du marché du travail (travailleurs âgés, femmes). La maîtrise des finances publiques s'est améliorée grâce aux réformes fiscales et à l'adoption de plans de rigueur, comme en Hongrie ou en Roumanie. L'inflation considérable des premières années de la transition a reculé, mais les prix continuent à progresser rapidement (autour de 10 % par an) sous l'effet de la libéralisation des prix. Cependant, les tensions restent importantes en Pologne, en Bulgarie ou en Hongrie, où les prix augmentent de 20 à 30 % en 1996. Les gouvernements d'Europe de l'Est confirment cette année la libéralisation et la stabilisation de leurs économies, ce qui leur permet de réaffirmer leur volonté d'adhérer à la Communauté européenne d'ici à cinq ans.

L'activité en Russie s'est enfin stabilisée en 1996, après quatre ans de déclin sans précédent. La politique monétaire très rigoureuse a permis de stabiliser l'inflation (de l'ordre de 50 %, contre 200 % en 1995 et 300 % en 1994) et le cours du rouble. Mais l'élection présidentielle, puis la vacance du pouvoir jusqu'à la fin de l'année n'ont pas permis de poursuivre significativement cette année la libéralisation en cours. La réforme fiscale engagée en 1995 n'a pas suffisamment amélioré les recettes de l'État ; elle a, au contraire, incité les agents économiques à l'incivisme : les recettes de l'État ont été très nettement inférieures aux prévisions. Le FMI a décidé, en mars, d'accorder un prêt de 10 milliards de dollars à la Russie, et un accord a été trouvé avec les créanciers du club de Paris pour le rééchelonnement de la dette russe sur cinq ans : le paiement des intérêts de la dette ne devrait donc pas obérer le redressement du pays dans les cinq ans à venir, et l'État aura les marges de manœuvre nécessaires pour poursuivre les réformes en cours : libéralisation des prix, privatisations, commerce extérieur.

L'amélioration des perspectives dans le tiers-monde

La croissance dans les pays en développement est de l'ordre de 6 % en 1996, pour la cinquième année consécutive. Elle a été plus harmonieuse et homogène, les pays du tiers-monde s'étant engagés sur un sentier de croissance durable, bien qu'encore insuffisante pour élever de manière importante le niveau de vie. Après la grave crise de 1995, l'activité reprend en Amérique du Sud, l'inflation étant mieux maîtrisée ; en Afrique, les programmes de réforme et de libéralisation lancés ou poursuivis à l'initiative du FMI et de la Banque mondiale commencent à avoir des effets positifs ; la croissance de l'Asie reste la plus élevée au monde.