Les sultans n'ont plus guère aujourd'hui d'autorité que sur la coutume et la religion (musulmane). Le Premier ministre, qui, depuis son arrivée au gouvernement, n'a cessé d'étendre ses pouvoirs aux dépens de ceux des États fédérés, est accusé de vouloir remplacer le fédéralisme par un État centralisé et autoritaire.

Thaïlande

L'agitation islamiste est apparue au mois d'août dans le sud de la Thaïlande, dans une région frontalière de la Malaisie. L'armée a été envoyée sur le terrain au début de septembre pour rétablir le calme après que 34 écoles musulmanes eurent été incendiées, un temple détruit, des trains mitraillés. Les provinces du Sud, Narathiwat, Pattani et Yala, sont agitées depuis des années, de façon endémique, par une guérilla qui lutte pour la libération du Pattani, un royaume musulman mis sous la coupe du Siam il y a trois siècles, et réclame son rattachement à l'État malais du Kelatan (dirigé par le Parti islamiste malais). Mais les incidents du mois d'août représentent, par leur ampleur et leur répercussion politique, un réel danger pour le gouvernement de Chuan Leekpai, le Premier ministre thaïlandais arrivé au pouvoir en septembre 1992, à l'issue d'élections démocratiques qui ont chassé les généraux du pouvoir.

Thaïlande

La démocratie s'est discrètement consolidée en Thaïlande depuis l'arrivée au pouvoir, en septembre 1992, de la coalition de cinq partis qui détient une majorité confortable au Parlement (207 députés sur 360). Les formations favorables aux militaires qui étaient jusqu'alors majoritaires (à l'exception de quelques mois de transition en 1991) ont été reléguées dans l'opposition. Mais la partie est loin d'être gagnée pour la nouvelle équipe. Les divisions internes à la coalition subsistent, et le système de clientélisme, qui entretient les partis, a la vie dure. La Thaïlande a néanmoins repris sa forte croissance économique (plus de 10 % cette année), effaçant le souvenir des trois mois de récession qui avaient suivi la répression du mouvement démocratique de mai 1992.

Indonésie

Les frémissements d'un changement pointent à Djakarta. Depuis l'été, la presse, pourtant étroitement contrôlée, réclame la levée de l'interdiction sur les partis d'opposition et une restriction des pouvoirs des militaires. Les membres d'un mouvement des droits de l'homme, Pétition 50, sont progressivement autorisés à reprendre une vie publique. S'il est trop tôt pour parler d'un « printemps indonésien » en raison de l'extrême surveillance de la vie politique (le Golkar reste parti unique et les militaires continuent à contrôler l'exécutif), il s'agit néanmoins du premier signe d'ouverture depuis l'accession au pouvoir du président Suharto, voilà plus de 25 ans. En avril, il avait été réélu sans surprise, à 72 ans, pour un nouveau mandat de 6 ans.

Bali, l'ordre cosmique et lu quotidienneté, revue « Autrement », série Monde, février 1993.

Caroline Puel