Cependant, à y regarder de plus près, les résultats sont mitigés. La moitié seulement des stagiaires ont trouvé des emplois, et souvent des postes subalternes auxquels ils auraient de toute façon fini par accéder. D'où le risque que ces formations ne remplissent qu'une fonction d'aiguillage. D'autre part, en raison du manque d'informations, ceux qui auraient le plus besoin de ces stages ne s'y inscrivent pas. Enfin, leur organisation se heurte parfois à la méfiance tant des employeurs que des syndicats. Il n'en reste pas moins que les jeunes apprécient l'alternance (certains ont même retrouvé le goût de la lecture et des matières scolaires) et qu'il faudra en tenir compte dans une réflexion d'ensemble sur la rénovation des systèmes de formation. Quant aux perspectives d'avenir évoquées par le rapport de l'OCDE, elles sont plutôt pessimistes : « Aucune réforme de l'enseignement obligatoire destinée à en faire une préparation à la vie active ne peut créer des débouchés sur un marché du travail en stagnation. » D'où la crainte que les adolescents au chômage ne se muent en « un groupe de contestataires prêts à se laisser recruter par des mouvements de protestation et d'agitation sociale ».

Menaces en puissance

Cette appréhension est-elle justifiée ? L'Année internationale de la jeunesse s'organise autour de trois thèmes : participation, développement et paix. Il s'agira de « promouvoir de meilleures conditions d'enseignement, de travail et de vie des jeunes — en particulier les plus défavorisés —, de garantir leur participation active à un développement global d'une société pacifique et d'encourager l'intervention de nouvelles politiques locales ou nationales et de programmes visant à améliorer les conditions des jeunes en harmonie avec les expériences et les priorités de chaque pays ».

A-t-on réellement le désir de résoudre les problèmes des jeunes, ou bien s'agit-il d'une simple tentative pour canaliser aux moindres frais ce que l'on sent être une menace en puissance ? Autrement dit, l'année de la jeunesse ne risque-t-elle pas d'être, comme celles qui l'ont précédée (années de la femme, de l'enfant, du patrimoine, des handicapés), le prétexte de manifestations spectaculaires qui, une fois passées, retomberont dans l'oubli ? Une question qui pose le problème des moyens, donc de la participation réelle et de l'investissement effectif des gouvernements dans cette initiative. Question d'autant plus importante que la solution au chômage des jeunes est sans doute indissociable de la problématique générale de l'emploi.

Michaëla Bobasch

Natalité

La vieille Europe

Les initiateurs de la Communauté européenne n'ont jamais prétendu constituer un ensemble aussi peuplé que la Chine ou l'Inde. Encore espéraient-ils que sa population serait du même ordre que celles de l'URSS et des États-Unis. Avec la constitution de l'Europe des Dix, on était même parvenu à les dépasser. Eh bien c'est fini : la population de l'URSS, qui croît de 0,9 % par an, vient de dépasser celle de l'Europe des Dix, qui n'augmente guère que de 0,2 % par an. Une marge de 35 millions d'habitants « nous » sépare encore des États-Unis ? Elle va s'amenuiser de notre vivant et tomber à 15 millions en 2000, à zéro vers 2020, du fait de la croissance des États-Unis, de l'ordre de 0,7 % par an actuellement.

Sous-fécondité et vieillissement

À ce plafonnement de l'Europe des Dix, qui ne devrait jamais dépasser 280 millions d'habitants, il y a plusieurs raisons, dont une fondamentale : c'est en Europe, au xixe siècle, qu'ont été faites et expérimentées les découvertes médicales qui allaient déterminer la révolution démographique moderne (l'augmentation des populations, leur densification puis leur faible fécondité). Les autres parties du monde ont des retards variables sur ce processus.

Ce retard est un avantage pour certains pays développés. Les États-Unis et l'URSS ont la chance d'avoir un « tiers monde à domicile ». Les populations noires et surtout hispanophones aux États-Unis, les populations musulmanes en URSS ont une fécondité relativement forte. Bénéficiant d'une basse mortalité, elles croissent plus vite, ce qui contribue à l'accroissement plus rapide de leur pays. De plus, les deux superpuissances occupent encore relativement peu leur territoire. Avec 25 et 12 habitants au km2, on est loin des 163 de l'Europe des Dix, ce qui fait que l'impression de saturation y est toute relative, alors qu'elle est ancienne en Europe, où elle a contribué à un processus lent de sous-fécondité et de vieillissement. Avec 14,2 % de personnes âgées de 65 ans ou plus, alors que les États-Unis n'en sont qu'à 11,4 % et l'URSS à 10,1 %, l'Europe, même à fécondité égale, ne s'accroît pas aussi vite que ses rivaux.