La bataille se livre maintenant avec les super-super-machines. Le TFTR (Tokamak Fusion Test Reactor) de Princeton, décidé début 1977, devrait fonctionner vers 1981-1982. Il est destiné à vérifier les dimensions à donner à un réacteur thermonucléaire ainsi que la physique théorique des plasmas énergétiques. Le T-20 soviétique et le JT-60 japonais attendent une décision. Le JET (Joint European Torus) a été décidé il y a plus d'un an, mais le projet s'est tragiquement enlisé dans une querelle politique pour le choix du site. Ces machines devraient permettre d'atteindre des produits nζ (densité × temps de confinement) entre 1013 et 1014 cm3/sec et des températures ioniques de l'ordre de 10 keV ou 100 millions de degrés, conditions considérées proches de celles d'une utilisation réelle.

Les grands appareils à fusion laser et confinement par inertie, en cours de construction, devraient démarrer en 1977-1978 et permettre des comparaisons intéressantes.

Géothermie

Il existe plusieurs types de ressources géothermiques : les gisements de vapeur ; les gisements d'eau chaude entre 150 et 250 °C, qui peuvent être utilisés à des fins industrielles ou, après détente et vaporisation, pour produire de l'électricité ; les gisements d'eau tiède, comme en Hongrie dans la région de Szeged, ou dans le Bassin parisien, pouvant être utilisés pour le chauffage domestique ; et les gisements de roches chaudes sèches, exploitables après fracturation ou création de cavités et injection de fluides caloporteurs. Seuls ces derniers gisements, les moins connus tant du point de vue géologique que du point de vue technologique, peuvent être considérés comme une ressource potentiellement importante à l'échelle du globe.

Les trois premiers types de gisements peuvent néanmoins contribuer valablement aux ressources énergétiques locales. Mais, dans la plupart des pays intéressés (États-Unis et Japon entre autres) leur développement se heurte à l'opposition de l'opinion publique (parce qu'ils se trouvent généralement dans des parcs nationaux) ou à l'absence d'une législation minière adéquate (sont-ce des sources d'eau ou des ressources minérales ?).

En France, diverses opérations telles que Villeneuve-la-Garenne et Creil ont été lancées, suite à l'expérience intéressante de Melun (3 000 logements), pour exploiter la nappe du Dogger dans le Bassin parisien. Opérations pilotes, il est trop tôt pour se prononcer sur leur rentabilité, qui dépendra également des conditions fiscales décidées par les pouvoirs publics. Rappelons qu'un plan a été lancé en 1975 par le ministère de l'Industrie, en liaison avec la DGRST (Direction générale de la recherche scientifique et technique), prévoyant d'installer 500 doublets (un puits de soutirage et un puits de réinjection) d'ici 1985, soit de quoi alimenter en eau chaude plus d'un million de logements.

Une année critique pour le nucléaire

L'année a été cruciale pour le nucléaire. Le bel élan des années 1965-1973 a été brisé, alors qu'on pouvait croire que la crise pétrolière de 1973-1974 le renforcerait encore. À peu près partout dans le monde (sauf en France), les développements nucléaires marquent le pas, bloqués par un courant d'opinion hostile, bien que la partie du public opposée au nucléaire semble minoritaire.

États-Unis

Sans doute pour contrebalancer les déclarations peu favorables au nucléaire (ou surenchérir sur elles) du candidat démocrate Jimmy Carter à la recherche d'une technologie « moralement acceptable », le président sortant Gérald Ford, trois jours avant l'élection du 2 novembre 1976, a proposé un moratoire de trois ans sur le retraitement des combustibles nucléaires irradiés, aboutissant à geler une situation déjà bien complexe (les combustibles usés s'accumulent près des réacteurs, sans qu'on sache ce qu'on en fera). Après l'élection, on a pu croire un moment que le président Carter, par pragmatisme, mettrait une sourdine à ses déclarations. Mais, le 7 avril 1977 (deux semaines avant un important discours au Congrès sur sa politique énergétique basée sur la conservation de l'énergie, la réduction des importations pétrolières et le développement accéléré du charbon et de l'énergie solaire), le président Carter a décidé :
– qu'il ne serait pas procédé au retraitement des combustibles nucléaires irradiés sur le territoire américain (avec l'espoir d'amener les autres pays à une attitude similaire), estimant le pays non préparé à entrer dans l'« ère du plutonium » ;
– que le développement des surgénérateurs, utilisateurs de plutonium, serait « réorienté » et leur commercialisation éventuelle reportée au siècle prochain ;
– que les réacteurs classiques à eau légère continueraient à jouer un rôle important, bien qu'en troisième priorité après le charbon et le solaire et dans le cadre d'un cycle de combustible ouvert (sans retraitement).