En France, il a lutté, à sa mesure, pour les droits des prostituées, dont on sait qu'elles sont méprisées par une société hypocrite qui en use sans vergogne, déclare avec un sourire complice que c'est « le plus vieux métier du monde », se rue vers les films et publications pornographiques, mais condamne sans appel les prostituées et ne leur reconnaît aucun droit.

Un peu partout, dans les domaines de la contraception, de l'avortement, du divorce, des relations sexuelles avant le mariage, voire de l'homosexualité, les positions des responsables protestants ont choqué, même des protestants, surtout face à celles de nombreux épiscopats catholiques ou des Notes du Vatican. Dans tous ces domaines existentiels, le protestantisme a souvent été accusé de laxisme, de modernisme, parfois même de licence. Il s'agit-là de jugements diffamatoires de personnes ou d'organismes à l'esprit faussé. Car, sans être partisan le moins du monde du divorce, de l'avortement ou de la prostitution et de l'homosexualité, le protestantisme prétend fermement que le Christ n'est pas venu pour défendre ou interdire, mais pour libérer et aimer. C'est lui qui a dit que les prostituées devanceront les bien-pensants dans son Royaume, et l'apôtre Paul, qu'il n'y a plus ni homme ni femme, ni esclave ni homme libre. Si les exploiteurs de la prostitution doivent être poursuivis sans relâche, les prostituées méritent le soutien et la tendresse des disciples du Christ dans leurs légitimes revendications. Quant au mariage, lieu de joie et d'unité par excellence, s'il devient un « nid de vipères », aucune loi ne peut contraindre deux êtres à vivre ensemble ; cela est dramatique pour les enfants, et l'Évangile, tout en disant qu'il s'agit d'un échec, permet un recommencement. L'avortement et l'homosexualité sont un drame et un malheur, mais la femme ne saurait être asservie aux conséquences d'une relation sexuelle indésirée ; les homosexuels, prisonniers de leur nature, ne sauraient être abandonnés.

Les positions et débats sur ces sujets se sont multipliés durant l'année un peu partout, y compris en France et y compris, à propos du mariage lui-même, en Afrique. Il est intéressant de savoir, à ce sujet, que certaines Églises protestantes africaines interdisent la polygamie, que d'autres acceptent des polygames sans exiger de répudiation et que d'autres encore, plus nombreuses, tolèrent la polygamie. N'a-t-on pas entendu, lors d'une grande assemblée mondiale, cette année, une protestante kénienne, maire de sa ville, troisième femme d'un protestant baptisé, déclarer devant 700 journalistes que la polygamie était « plus saine et évangélique que la monogamie ? Car, précisait-elle, en Occident chrétien, beaucoup d'hommes ont des maîtresses en cachette et, ainsi, trompent réellement leurs épouses, tandis que chez nous cela est impossible. On ne rencontre cette situation que dans les seules Églises qui se sont calquées sur votre façon de lire l'Évangile et qui nous ont imposé votre culture, une culture qui n'est pas la nôtre ».

Spirituel

Au plan spirituel, l'illustration la plus probante des préoccupations du protestantisme français est sans doute la XVe assemblée triennale, prise en charge en novembre 1975 par la FPF et tenue à la tour Olivier de Serres, à Paris. Avec le thème central : Situation et vocation du protestantisme dans la société française contemporaine (c'est-à-dire bilan et spécificité), les responsables des Églises, réformées, luthériennes et baptistes de France, ont réussi, du moins partiellement, à réunir les protestants qui ne pensent qu'à Dieu et ceux qui ne combattent que pour l'homme, les uns et les autres de façon exclusive. Cela s'est fait grâce à la journée centrale de cette assemblée, qui était centrée sur plusieurs lectures de passages bibliques. On sait que la Bible se lit aujourd'hui de façon telle qu'il arrive qu'elle divise au lieu de rassembler. En plus de la lecture naïve et traditionnelle de la Bible, on peut parler, en raison des sciences bibliques actuelles, de lectures structurale, critico-historique, politique, matérialiste, économique, herméneutique, etc. Or, ces lectures ont fait aboutir l'assemblée à des textes finaux reçus d'un commun accord : notamment un Cahier des charges de la FPF et un Message, qui insistent sur l'étude de l'Écriture et prônent l'organisation de véritables états généraux du protestantisme, afin que le peuple protestant de la base s'exprime librement sur son identité et son rôle.