En revanche, l'Église de Grèce traditionnellement très anticatholique, rompt, le 29 juillet 1975, toutes relations avec le Vatican. Cette mesure est prise aussitôt après la nomination par Rome d'un nouvel évêque catholique de rite grec. Mgr Anargiros Printesis. L'Église de Grèce voit dans la petite Église catholique byzantine une sorte de cinquième colonne que le Vatican dirige contre elle. Des propos apaisants du pape Paul VI n'ont pas amené l'archevêque orthodoxe d'Athènes à revenir sur sa décision de rupture.

Éthiopie

Le 18 février 1976, le gouvernement militaire révolutionnaire prononce la destitution de l'abouna Theophilos (69 ans). Le patriarche de l'Église d'Éthiopie est immédiatement arrêté et incarcéré, de même que plusieurs évêques. Pour les militaires qui détiennent le pouvoir, le patriarche, élu en 1971, s'est rendu coupable d'élection illégale, de corruption, de non-déclaration de ventes de terres et de « négligence dans ses devoirs et responsabilités envers la chrétienté ».

Musulmans

L'Islam, affronté au monde moderne, bouge. Il a ses intellectuels agnostiques ou athées qui, dans la plupart des pays musulmans, n'osent guère se manifester comme tels. Il a ses conservateurs intégristes qui s'opposent à l'introduction de toute nouveauté dans la vie de leurs coreligionnaires. Il a aussi ses progressistes qui prétendent adapter le message du Prophète aux conditions de vie des sociétés urbaines et industrialisées et y intégrer certains apports de la pensée contemporaine.

Évolution

L'un des points clés du débat entre les uns et les autres concerne le statut de la femme, son émancipation. De ce point de vue, on a enregistré cette année un événement qui, semble-t-il, est intervenu pour la première fois dans l'histoire de l'Islam : en octobre, à Tunis, une femme, Hind Chelbi, professeur de théologie dans un lycée de Tunis, a prononcé la causerie religieuse de la cérémonie traditionnelle de la nuit du destin qui marque le vingt-septième jour du Ramadan. La cérémonie s'est déroulée au ministère des Affaires étrangères, en présence du chef de l'État, des principaux dirigeants du pays et des responsables du culte.

Le président Bourguiba paraît bien avoir été à l'origine de cette initiative. Dans le monde musulman, où les dirigeants politiques ont tous, selon les principes mêmes qui gouvernent l'Umma, un rôle religieux, le chef de l'État tunisien ne manque jamais une occasion de favoriser l'adaptation de l'Islam au monde moderne.

Tout naturellement. Hind Chelbi a, dans sa conférence, traité de la femme dans l'Islam. Elle a souligné que le Coran reconnaît l'égalité des droits civiques de l'homme et de la femme, et que, par conséquent, certaines revendications des jeunes musulmanes d'aujourd'hui ne devraient pas susciter l'opposition des croyants. Dans l'Islam, a-t-elle dit, la femme ne doit obéissance qu'à Dieu, et son adhésion au Coran en fait un être libre qui dispose de sa personne et de ses biens.

Rencontre

Le dialogue entre chrétiens et musulmans se poursuit. Après les diverses rencontres organisées les années précédentes dans plusieurs pays, et notamment à Cordoue, en Égypte et en Tunisie, en 1974 (Journal de l'année 1974-75), un important colloque islamo-chrétien se tient à Tripoli du 1er au 6 février 1976. Puissance invitante, la Libye du colonel Kadhafi traite somptueusement les 100 participants et les 500 observateurs et journalistes qu'elle reçoit pour cette occasion. Musulman fervent, austère et militant, qui entend fonder sa philosophie politique sur le Coran, le jeune chef d'État libyen semble avoir voulu, par cette manifestation, montrer l'importance qu'il attache à la lutte contre l'athéisme. Il devait le souligner dans des conversations à bâtons rompus avec des délégués catholiques, sans omettre cependant de réitérer ses critiques contre le rôle que, selon lui, le Vatican a joué pour soutenir le colonialisme.

Cela n'a pas troublé l'atmosphère particulièrement cordiale, voire fraternelle, de la rencontre. Mais cela n'a pas non plus contribué à en lever l'ambiguïté. Ce colloque tient à la fois du dialogue diplomatique et du séminaire scientifique. Politique et religion y sont sans cesse inextricablement mêlées. Les États musulmans non arabes et les États arabes hostiles au régime ne sont pas représentés dans la délégation islamique. Du côté chrétien, la délégation conduite par le cardinal Pignedoli, président du secrétariat romain pour les non-chrétiens, ne comprend que des catholiques.