Malgré des désaccords latents, le gouvernement obtient la confiance de la Chambre et du Sénat. À cette occasion, les femmes parlementaires, mécontentes de se trouver exclues du ministère, quittent, en guise de protestation, les hémicycles au moment du vote. La solennité de l'investiture est également compromise, mais d'une tout autre manière, par le raid d'un commando de jeunes agriculteurs qui réussissent à introduire un taureau dans l'enceinte de la Chambre !

Pacte culturel

Conscient d'avoir à rattraper le retard occasionné par la crise dans le dépôt des budgets, le gouvernement met les bouchées doubles. Dès le début du mois de février, il fait connaître le montant du budget des Voies et moyens. Celui-ci atteint le chiffre record de 366 milliards, avec un déficit probable de 6 milliards.

Entre-temps, les partis traditionnels poursuivent avec le PLP la négociation du pacte culturel. Ce document est enfin signé le 24 février. Les concessions obtenues par les libéraux font que le FDF-Rassemblement wallon estime, après une courte réflexion, pouvoir souscrire lui aussi aux stipulations de cet accord.

Wilfrid Martens, que l'on sait très attaché au nationalisme flamand, est élu, au mois de mars, à la présidence du CVP. Quinze jours plus tard, les sociaux-chrétiens francophones portent à leur tête un autre moins de 40 ans : Charles-Ferdinand Nothomb, élu au suffrage universel des affiliés au parti avec 46 % des voix.

Dans l'intervalle, les conseils culturels néerlandais et français — qui regroupent chacun les députés et sénateurs de même langue — tiennent leur première session. Non sans quelque paradoxe, ces instruments législatifs de ce que certains ont appelé le séparatisme culturel ont choisi d'établir leur siège... à Bruxelles.

Un signe des temps : l'esprit de régionalisation a gagné la petite minorité des Belges germanophones ; le 30 mars, elle fonde son parti linguistique ; le PDB (Parti des Belges de langue allemande).

Institutions régionales

Les semaines qui suivent prouvent clairement que la mise en place d'institutions à vocation régionale, parallèlement aux structures du pouvoir unitaire maintenu, conduit à des dissonances parfois aiguës dans le concert politique belge. Ainsi, les deux conseils économiques régionaux, sans même attendre le vote du fameux article 107 quater, protestent contre la répartition des crédits à l'expansion économique régionale et contre l'ignorance où les a laissés le gouvernement de ses intentions en la matière.

Quant aux travaux des conseils culturels, ils reflètent la désunion des francophones engagés dans d'interminables batailles de procédure face à la cohésion des Flamands, dont le premier souci est d'adopter un décret imposant le néerlandais comme langue du serment public dans le nord du pays.

Au fil des controverses politiques qui jalonnent ce début de législature, le parti socialiste, sous la direction d'Edmond Leburton, s'affirme de plus en plus comme le défenseur attitré d'une Belgique le plus unitaire possible. Le 1er mai, le PSB renouvelle le rappel au rassemblement des progressistes, tandis que Leburton déclare que « l'éclatement du pays ne peut être bénéfique à personne ».

Controverses

Quelques jours plus tard, Charles-Ferdinand Nothomb suggère de réunir les dirigeants des partis wallons pour trouver le moyen de hâter le vote de la régionalisation économique. Seuls les socialistes refusent de répondre à l'invitation de leur partenaire gouvernemental. Le président du PSC maintient cependant sa proposition après avoir reçu l'acceptation des autres formations politiques.

Les socialistes, qui s'estiment les victimes d'une manœuvre, ripostent en ramenant sur le tapis le serpent de mer des Fourons. Gaston Eyskens, qui sent l'orage, multiplie les réunions de concertation au sein de sa majorité, laquelle, finalement, parvient à se mettre d'accord sur un calendrier général des débats au Parlement pour toutes les questions épineuses. De même, la cohésion gouvernementale sort renforcée du refus opposé par Wilfrid Martens à une requête de la Volksunie, qui lui suggérait d'organiser une rencontre des partis flamands à l'instar de celle mise sur pied par le PSC du côté wallon.