À la maternité du Centre hospitalier universitaire Saint-Antoine à Paris, le Dr Jean Cohen, chef de clinique, a entrepris de vérifier la valeur des travaux menés récemment dans le domaine de la stérilité sous l'angle de ses mécanismes immunologiques. Selon ceux-ci, des substances antigéniques détermineraient chez la femme, au niveau des voies génitales, l'agglutination des spermatozoïdes. Ces substances se présenteraient sous deux aspects : une forme insoluble fixée à la surface des globules rouges et dans de nombreuses cellules de l'organisme ; une forme soluble dans l'eau sécrétée par plusieurs variétés de glandes à mucus, qui, elle, serait présente dans le sperme.

Quatre-vingts pour cent des individus sécréteraient une telle substance. Le Dr Jean Cohen considère cependant que les réactions immunologiques persisteraient à l'état latent chez toutes les femmes, mais qu'elles ne se manifesteraient que lorsque les spermatozoïdes sont déficients ou lorsque la glaire du col utérin présente des caractéristiques particulières. Tel est le point de vue que ce jeune médecin a développé au VIe Congrès mondial de la fécondité et stérilité, en mai 1968, à Tel-Aviv.

Si l'immunologie peut fournir la clef du mécanisme de certaines stérilités, elle peut aussi être employée contre la fécondité. C'est ainsi que, s'appuyant sur des constatations expérimentales, plusieurs chercheurs étudient actuellement la mise au point d'une méthode immunologique destinée à prévenir la grossesse. Des essais d'immunisation active de l'homme ou de la femme à l'aide d'injections de sperme ou d'extraits testiculaires homologues sont poursuivis avec persévérance dans le dessein de leur trouver une application contraceptive.

D'autres voies de recherche sont également largement explorées : inhibition de la formation des spermatozoïdes ou des ovules par l'immunisation de l'homme et de la femme contre les hormones qui la commandent, et test immunologique pour déterminer le temps de l'ovulation à partir des hormones hypophysaires.

L'ordinateur en médecine

À la suite d'une enquête portant sur les malades conduits à la clinique néphrologique de la faculté de médecine de Paris et qui n'ont pu être sauvés, le professeur Jean Hamburger, qui en assume la direction, a constaté que « l'insuffisance d'informations médicales est responsable d'un diagnostic imparfait ou d'une thérapeutique inappropriée dans 26 % des cas ». Ce qui prouve que « la masse des données médicales acquises dont la connaissance est nécessaire aux soins des malades a brusquement dépassé les capacités de préhension et de mémoire du médecin ».

Quatre microphones

Partant de la constatation de cette lacune liée à la constitution humaine, des recherches de plus en plus poussées tentent de substituer, pour le diagnostic et le traitement, l'ordinateur au médecin.

Les plus récentes ont abouti, dans le domaine du diagnostic, à la construction par la Tōkyō Shibaura Electric Company, d'un analyseur phonocardiographe automatique. Sans équivalent actuel dans le monde, cet ordinateur est capable de dépister précocement n'importe quel trouble cardiaque. Ses inventeurs le tiennent pour aussi compétent qu'un cardiologue et le ministère de la Santé publique japonais n'a pas hésité à en mettre plusieurs exemplaires en service dans les groupes scolaires.

Lorsque ces microphones sont placés sur les quatre foyers classiquement auscultés (mitral, aortique, pulmonaire, tricuspidien), l'analyseur précise automatiquement et immédiatement la nature des perturbations qui compromettent le bon fonctionnement du cœur du sujet. Les microphones sont conçus de manière à prendre toutes les positions d'auscultation que le cardiologue choisit habituellement pour poser son stéthoscope. Ainsi, il est à même de fournir toutes les caractéristiques des différentes sortes de souffles anormaux, une appréciation des pulsations, et d'indiquer si le sujet examiné doit être soumis à un examen plus détaillé. Son utilisation en milieu scolaire japonais a déjà permis de détecter des malformations congénitales de la paroi interven-triculaire et des troubles artériels antérieurement méconnus.

Langage trop pauvre

Ce pas en avant dans le domaine du diagnostic électronique n'a été possible que parce que l'utilisation de l'appareil reste limitée à un domaine très restreint de la médecine. Mais, sur un plan plus vaste, si l'on peut très bien concevoir un ordinateur destiné à compléter l'information du médecin, la machine à diagnostic n'est pas actuellement réalisable. Trop nombreuses sont les difficultés que présente l'établissement du programme destiné à assurer son fonctionnement, la plupart des maladies ayant des définitions complexes, voire ambiguës, qui ne peuvent être adaptées au langage de l'ordinateur. Et c'est pour cela que le Dr Pierre Theil, se faisant l'écho des griefs des médecins généralistes, a pu, dans la Médecine praticienne, répondre par l'affirmative à la question : « Faut-il plastiquer les ordinateurs ? » Il en va différemment lorsque le diagnostic précis repose sur l'interprétation de courbes complexes et de paramètres multiples. Ainsi le Dr J. A. Fondarai, du laboratoire de physique de la faculté de médecine de Marseille, a mis au point l'utilisation, en routine, d'un petit ordinateur EMD 8-48, pour l'étude des troubles du vestibule de l'oreille, qui ramène la durée totale de l'examen de 3 heures à 7 minutes par malade.

1 donneur contre 60

Par contre, pour certains traitements, l'ordinateur peut être un instrument précieux. Adapté à la radiothérapie, le même EMD 8-48 établit, à la demande, des plans de traitement en fonction de la situation de la tumeur à irradier, du débit des radiations, avec une rapidité et une précision impossibles à obtenir avec un cerveau humain. Ainsi, pour la cobalthérapie, le temps de calcul est de 1 mn 40 s. Ces faits ont été rapportés en décembre 1967, au symposium Mathematica 67, devant 300 grands patrons et chercheurs attirés par l'informatique.