Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Nuremberg (suite)

La Réforme est introduite sans heurts ni grands changements dans la liturgie et la décoration sous la pression populaire (1524) par le patriciat, qui en profite pour s’attribuer le pouvoir épiscopal sur le clergé et séculariser les biens ecclésiastiques, qui permettent de financer la politique culturelle et charitable. La ville signe en 1530 la Confession d’Augsbourg et élabore en 1532-33 une ordonnance ecclésiastique qui constitue jusqu’au xixe s. la base juridique de l’Église luthérienne de la ville et du territoire rural. La ville est gravement atteinte par les conflits du milieu du siècle. Par fidélité à Charles Quint, elle se range de son côté lors de la guerre de Smalkalde (1546) et applique l’Intérim d’Augsbourg jusqu’en 1550. Si elle résiste au siège d’Albert II Alcibiade de Brandebourg (1552), son territoire rural subit des ravages considérables, et le versement d’une rançon va affaiblir sa capacité financière. Dans les conflits religieux qui secouent l’Empire après 1555, Nuremberg pratique une politique luthérienne conciliante et refuse toute orthodoxie agressive. L’académie d’Altdorf, située sur son territoire, est un des rares lieux de tolérance de l’Empire.

Malgré une politique prudente de neutralité envers l’empereur, la guerre de Trente Ans, par les frais qu’elle impose à la cité, accentue le déclin. Le patriciat, incapable de toute réforme, empêche le développement de forces nouvelles, freine l’essor scolaire et laisse péricliter le gymnase. Après 1650, il continue de s’appuyer sur l’empereur pour se protéger contre les désirs de réformes de la bourgeoisie possédante, ce qui va entraîner le départ des forces économiques, aggravé par le mercantilisme du margraviat voisin. Après 1789, la cité perd son autonomie politique. Malgré le désir du peuple d’être intégré à la Prusse, Nuremberg est incorporé en 1806 à la Bavière. Son autonomie administrative permet à partir de 1830 un nouvel essor culturel et économique : la ville devient le second centre industriel en Allemagne du Sud. La réalisation de la première voie ferrée allemande, en 1835, sur le parcours Nuremberg-Fürth, est un autre signe de dynamisme. À partir de 1836, la construction du canal Main-Danube (Ludwigs kanal) donne à la ville des atouts supplémentaires. La population passe de 26 000 habitants en 1812 à 100 000 en 1880. Sous le régime nazi, la ville est le siège de manifestations grandioses et très spectaculaires et la citadelle de l’antisémitisme (« lois de Nuremberg » contre les Juifs, 1935). En 1945-46 s’y déroule le procès des criminels de guerre. Par un verdict du 1er octobre 1946, le tribunal militaire international condamne à mort H. Göring (qui se suicida la veille de l’exécution), M. Bormann (jugé par contumace), J. von Ribbentrop, F. Sauckel, E. Kaltenbrunner, W. Frick, H. Frank, J. Streicher, A. Seyss-Inquart, A. Rosenberg, W. Keitel et A. Jodl. Les autres accusés sont condamnés à des peines de prison à purger dans la forteresse de Spandau (R. Hess, K. von Neurath, E. Raeder, K. Dönitz, W. Funk, B. von Schirach, A. Speer) ou acquittés (H. Schacht, F. von Papen, H. Fritsch). R. Ley s’était suicidé avant le début du procès.

B. V.


La ville actuelle

Nuremberg avait été détruite à 50 p. 100 lors de la Seconde Guerre mondiale ; les responsables l’ont reconstruite de manière à sauvegarder le passé (restauration du centre, des célèbres fortifications, de la maison de Hans Sachs). La population a passé de 410 000 habitants en 1933 à 474 000 aujourd’hui, malgré la proximité de la frontière avec la R. D. A. et la Tchécoslovaquie, qui, depuis 1945, a réduit les échanges. De ce fait, l’industrie domine, encore que le secteur culturel et les activités commerciales soient bien développés. L’industrie du jouet, tradition remontant au Moyen Âge, emploie 10 000 salariés. La construction de véhicules, de machines, d’appareils de précision fournit plus de 70 000 emplois. La biscuiterie est renommée. Papeterie, fabrication de crayons, chimie s’ajoutent aux grandes branches industrielles. L’industrie a créé près de 170 000 emplois. Le commerce et les transmissions totalisent 95 000 postes de travail. Nuremberg est la capitale historique de la Franconie, bien que faisant partie de la Bavière. Son rayonnement s’étend donc surtout aux pays francs. Nuremberg possède une université (Friedrich-Alexander-Universität) qui complète celle, proche, d’Erlangen. L’Office fédéral pour le travail a son siège à Nuremberg. De même, on y trouve la Direction fédérale pour les finances. Plusieurs théâtres et quatre musées contribuent à animer la vie culturelle.

À l’heure actuelle, Nuremberg ne peut se concevoir sans Fürth et Erlangen, l’ensemble formant une conurbation fonctionnelle de 850 000 habitants. La canalisation Rhin-Main-Danube a atteint, en 1972, Nuremberg, faisant de la ville un port non négligeable. Grâce au port, de nouvelles zones industrielles ont pu être aménagées.

F. R.

➙ Allemagne / Bavière.


L’art à Nuremberg

L’actuelle ville industrielle enveloppe une cité historique étroitement close dans une enceinte presque continue et qui, à son époque de grand développement, au xve s., comptait environ 21 000 âmes. Comme telle, c’était une des principales d’Allemagne. L’enceinte actuelle, remarquablement conservée, a été commencée au xive s., achevée au xve et renforcée au xvie, surtout par des tours rondes au voisinage des portes. Au nord-ouest, le terrain s’élève vers un complexe d’édifices de diverses époques, le château (Burg), à partir duquel la ville s’est développée historiquement et topographiquement. Citée en 1050, elle a dû une grande partie de sa prospérité aux Hohenstaufen et singulièrement à Conrad III et à Frédéric II de Hohenstaufen, qui l’a élevée au rang de place impériale. Dès 1424, elle reçoit la garde des insignes de l’Empire. La chapelle impériale à deux étages atteste encore le passé roman du château.