Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

aquatique (suite)

Le soufre joue un rôle voisin. Sous sa forme oxydée, il constitue des sulfates (le sulfate de calcium hydraté est le gypse). On le trouve ainsi dans les eaux séléniteuses et les eaux riches en sulfate de sodium, fréquentes en zones arides. Sous la forme réduite, le soufre, constituant important de la matière organique et notamment de certaines protéines, est transformé en hydrogène sulfuré, qui, par réoxydation dans l’eau, redonne du soufre, puis des sulfates.

L’hydrogène sulfuré, bien connu par son odeur fétide, ainsi produit au niveau de certains fonds aquatiques, pollue le milieu et l’atmosphère qui le recouvre.

L’azote, autre constituant essentiel de la matière organique (notamment aquatique), provient des nitrates dissous et, après réduction, donne des sels ammoniacaux dans les zones très pauvres ou dépourvues d’oxygène dissous.

Dans le milieu aquatique, le phosphore joue un rôle très important, car, indispensable au transfert de l’énergie par ses composés adényliques, il n’y existe guère qu’à l’état de traces (quelques millièmes de milligrammes par litre). Le développement des nombreux organismes aquatiques est lié à la présence de phosphore disponible, ce qui explique leur avidité pour cet élément.

Une des caractéristiques de la vie aquatique est de faire intervenir de très nombreux organismes à courte durée de vie (quelques heures à quelques semaines) et à très forte capacité de reproduction.

La production en matière organique d’un milieu aquatique peut être ainsi très supérieure à celle d’un milieu aérien, quel que soit le climat considéré. La capacité de production d’un hectare de sol agricole avoisine, en un an, en Europe, 4 tonnes en blé, 7 tonnes en riz, 10 tonnes en pommes de terre, tandis que, toujours en Europe, l’Algue bleue Spirulina platensis est capable de fournir 45 tonnes en 300 jours.

Le milieu aquatique naturel subit l’action de facteurs externes et internes nombreux, qui rendent cycliques les productions d’organismes vivant en son sein.

Ces facteurs externes sont d’abord climatiques : saisons froides et saisons chaudes, saisons sèches et saisons humides alternent et font fluctuer la température du milieu et, par contrecoup, la biomasse des organismes, qui, pour la plupart, sont des poïkilothermes (à température intérieure variable, par opposition à homéothermes). Les facteurs météorologiques sont également très importants : variations dans la force et la direction des vents, qui induisent les courants et le mélange des eaux, transportent les poussières plus ou moins nutritives, spores, pollens, etc., et accélèrent le processus d’évaporation à la surface des eaux ; variations dans les précipitations, qui jouent un rôle direct de remplissage et de dilution, et un rôle indirect par ruissellement, lessivage des sols, écoulements, apports de sels dissous et de matériel sédimentaire.

Les organismes aquatiques subissent les fluctuations de ces facteurs et s’adaptent généralement aux circonstances. Certains préfèrent les eaux douces, d’autres les eaux salées et d’autres acceptent de vivre dans des milieux à salinité variable (organismes euryhalins).

De même, il existe des organismes eurythermes, qui tolèrent d’assez grands écarts de température au cours de chaque stade de leur vie, et des organismes sténothermes, qui n’acceptent de vivre que dans des limites étroites de température basse (psychrosténothermes) ou élevée (thermosténothermes).

Ainsi, l’adaptation des organismes aquatiques aux variations des conditions de milieu est un phénomène complexe, mettant en cause de très nombreux facteurs jouant sur le métabolisme, le comportement, la croissance et la reproduction.

Certaines espèces animales euryhalines sont diadromes, c’est-à-dire migratrices entre milieu polyhalin (la mer) et milieu oligohalin (les eaux douces des rivières et des fleuves). L’Anguille est l’exemple le plus connu d’un Poisson catadrome, c’est-à-dire d’un Poisson diadrome qui migre de l’eau douce vers l’eau de mer au cours de sa vie pour aller se reproduire. De nombreux autres Poissons (Gobies) et des Crustacés en font autant. Les Saumons, au contraire, sont anadromes et migrent de la mer vers les rivières pour pondre en eau douce. Le Chanos, Poisson d’eau saumâtre, bien connu en Indonésie notamment, est amphidrome, c’est-à-dire qu’il va d’un milieu à l’autre, mais sa migration n’est pas induite par une activité de reproduction.

D’autres organismes présentent des migrations au sein d’un même milieu. Les Truites remontent les rivières pour pondre sur des frayères de gravier propre en amont ; les Vairons et bien d’autres Poissons ont un comportement analogue. Les Corégones sont pélagiques dans les lacs alpins, et certaines espèces viennent frayer dans les cailloux de littoral (la Palée, par exemple, au lac de Neuchâtel). Les Invertébrés ne sont pas exempts de telles migrations.

La plupart des animaux aquatiques sont poïkilothermes. Leur croissance, liée à leur métabolisme, est fonction de la température du milieu, de son oxygénation, du courant parfois. Ces facteurs ne jouent pas le même rôle à tous les âges de la vie, et chaque espèce peut ainsi comprendre un certain nombre d’écophases aux exigences écologiques propres. Parmi ces écophases, celles qui permettent la survie de l’espèce en mauvaises conditions de milieu sont parmi les plus importantes. De nombreux Crustacés, des Rotifères ont ainsi des œufs de durée ; les Bactéries et les Champignons aquatiques font des spores ; les larves d’Insectes, certains Oligochètes, des Hirudinées forment des cocons, les Éponges des gemmules, les Bryozoaires des statoblastes, tandis que d’autres s’enkystent à certains stades, y compris le stade adulte (Copépodes, Ostracodes par exemple). Ces écophases de résistance permettent une colonisation rapide des milieux aquatiques astatiques, et leur « réveil » explique la soudaine apparition d’une vie cachée dans les eaux.