Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

littérature (suite)

Dans son Anatomy of Criticism (1957), Northrop Frye a montré que mythes et motifs organisent l’histoire et les formes littéraires suivant une symbolique rituelle, qui assemble données légendaires, types littéraires et références sociologiques. De fait, le mythe n’est pas nécessairement explicite : de The Great Gatsby à The Last Tycoon, le héros de F. S. Fitzgerald est un double du Christ, et son aventure s’organise peu à peu selon la logique de la cosmogonie naturelle. Il faut alors reconnaître les archétypes, à la fois narratifs et imaginaires, qui, structurant les œuvres, fondent des rapports interlinguistiques et apparentent la parole imprimée aux littératures orales et religieuses. En 1919, Jessie Weston (From Ritual to Romana) mène une étude comparée des différentes transcriptions littéraires de la quête du Graal par des références à des rites agraires. The Waste Land de T. S. Eliot montre que cette symbolique reste un élément capital de la création contemporaine. Par là, la thématologie continuerait les travaux des premiers comparatistes, qui étaient souvent des folkloristes et des ethnographes, et ferait de la comparaison le moyen d’articuler le récit, le discours sur une typologie de l’imaginaire, dont les textes sont l’expression et le conservatoire. Les travaux récents, rarement comparatistes, inspirés des psychanalyses jungienne, freudienne et bachelardienne peuvent aider à préciser les structures anthropologiques de l’imaginaire littéraire et à établir un rapport étroit entre le genre, les métaphores utilisées et l’argument. Suivant la formule d’Étiemble, nos littératures sont mythistoriques.

Il revient à la littérature comparée d’établir avec rigueur une morphologie et une morphogenèse littéraires, une poétique de l’écriture narrative, dramatique, épique ou lyrique. Les linguistiques structurale et générative offrent des modèles d’analyse qui permettront de dépasser les descriptions historiques et externes. La sémiologie, qui définit les rapports entre les œuvres comme des rapports de signes, devrait dégager les règles de transformation d’un genre ou de substitution d’un genre à l’autre. La sociologie et l’histoire culturelle seront les moyens de préciser le statut du héros ou de l’anti-héros ; la caractérisation du personnage varie suivant la manière dont la communauté conçoit son lien avec le réel et l’univers. L’histoire de la tragédie est l’histoire, changeante, de l’homme avec ce qu’il affronte. La constitution, la continuité et l’évolution du genre résultent d’une conscience laïcisée du devenir et de ses variations. Seraient ainsi unies la description des propriétés d’un discours littéraire, la tragédie, et celle du sentiment exprimé, le tragique. Dans cet ordre de recherche, E. Auerbach a proposé dans Mimesis (1946) une analyse, culturelle et stylistique, de la notion de réalité dans la littérature occidentale et a montré qu’il appartient à la littérature comparée de définir les ensembles dans lesquels les histoires littéraires nationales doivent s’inscrire, afin de préciser et d’assurer les concepts critiques qu’elles utilisent.

La décolonisation et l’apparition du tiers monde fournissent à la littérature comparée de nouveaux objets d’études. Où situer l’identité culturelle au cœur même d’un ensemble linguistique ? La francophonie et l’anglophonie sont multiples. Les pays indépendants des anciens empires élaborent des littératures propres, distinctes, et pourtant liées à celle de leurs occupants de naguère.

La recherche des rapports est au fond celle d’un ordre qui organise la disparité linguistique et culturelle ; en mettant en œuvre les « forces combinatoires » de l’intelligence, la littérature comparée entreprend de lire la littérature comme le résultat d’une fonction spécifique de l’esprit et comme la totalisation symbolique ou historique des situations et des expressions humaines.

J. B.

➙ Don Juan / Europe / Faust / Héros littéraire (le) / Œdipe.

 M. F. Guyard, la Littérature comparée (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1951 ; 5e éd., 1969). / N. P. Stallknecht et H. Frenz, Comparative Literature, Method and Perspective (Carbondale, Illinois, 1961). / R. Étiemble, Comparaison n’est pas raison (Gallimard, 1963). / R. Wellek, Concepts of Criticism (New Haven, 1963). / A. M. Rousseau et C. Pichois, Littérature comparée (A. Colin, coll. « U2 », 1967). / S. Jeune, Littérature générale et littérature comparée. Essai d’orientation (Minard, 1968). / H. M. Block, Nouvelles Tendances en littérature comparée (Nizet, 1970).

littoral

Zone le plus souvent sinueuse, dont la largeur varie jusqu’à plusieurs kilomètres et où s’établit le contact entre les éléments liquide (la mer), gazeux (l’atmosphère) et solide (le continent).


Selon l’importance prise par l’un ou l’autre de ces éléments, les formes du terrain et de la vie se diversifient en étages (fig. 1) appelés mésolittoral (où interfèrent les trois éléments au gré des émersions et des submersions), supralittoral (où prédomine l’influence des processus atmosphériques, plus ou moins modifiés par le voisinage marin) et infralittoral (où s’impose l’action des courants côtiers). Les littoraux sont des milieux géographiques originaux parmi lesquels s’individualisent plusieurs types reproduits fréquemment à la surface de notre planète.


Les milieux littoraux


Leur climat

Quelle que soit la zone envisagée, une station littorale présente un climat local différent de celui des régions de l’intérieur. Cela tient à plusieurs facteurs.

• Les qualités de l’air. Parmi elles, il faut signaler :
a) la luminosité diffuse élevée en raison de l’absence de poussières, de la réflexion sur la mer, qui agit comme un miroir, et de la diffusion par les gouttelettes en suspens (embruns, brouillards, etc.) ;
b) l’amortissement des oscillations thermiques, diurnes et saisonnières, et leur décalage dans le temps (le froid d’hiver se fait fraîcheur printanière, et la chaleur de l’été devient douceur automnale) ;
c) l’élévation de l’état hygroscopique, qui contraste avec une pluviométrie plus faible que celle de l’intérieur ;
d) la forte ionisation (ozone) ;
e) la teneur élevée en sels, en bromures alcalins et en composés iodés provenant des végétaux de l’estran.

• L’agitation de l’air. Les vents sont modifiés et renforcés lorsque les dépressions franchissent les reliefs côtiers. En l’absence de perturbations s’établit un régime de vents alternés en relation avec l’inégal échauffement de la mer et du continent (brise de terre et brise de mer [fig. 2]).