Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
K

Kikuyus ou Kikouyous (suite)

Les Kikuyus croyaient en un Dieu unique et suprême, omniprésent et anthropomorphe, appelé Ngai Murungu ou Mwene Nyaga. Seule la famille pouvait s’adresser à Ngai, dont la résidence préférée était le mont Kenya. Certains vieux étaient considérés comme les plus aptes à le servir. Par ailleurs, il existait aussi des prophètes. L’autre forme de croyance était la communion avec les esprits des ancêtres, qui résidaient dans la terre familiale. Enfin, dans certaines circonstances, il pouvait se produire une souillure rituelle (thahu).

La situation géographique particulière des Kikuyus explique l’importance de l’impact colonial sur leurs structures sociales et foncières. En effet, l’installation d’un colonat blanc tout autour des terres kikuyus a empêché une expansion territoriale nécessaire à leur équilibre démographique. L’éviction des Kikuyus des hauts plateaux a contribué également au développement d’une véritable crise, qui a culminé en 1952 avec la révolte mau-mau. Celle-ci est la suite partielle des mouvements politiques et du phénomène des écoles et des Églises indépendantes qui se sont développés de façon considérable dans l’entre-deux-guerres. On a pu définir le mouvement mau-mau, limité dans les faits à l’ethnie kikuyu, comme un mouvement de renouveau culturel, une révolte anticoloniale et même une guerre civile. Un grand nombre d’éléments de la culture traditionnelle kikuyu se mêlaient de façon originale à des préoccupations plus modernes. Le personnage de Jomo Kenyatta* a symbolisé pendant longtemps cette lutte politique et militaire, même si son rôle réel fut effacé. Sa présidence à la tête d’un Kenya indépendant confirme la prééminence de l’ethnie kikuyu.

J. C.

➙ Kenya / Kenyatta (Jomo).

 J. Kenyatta, Facing Mount Kenya (Londres, 1937 ; trad. fr. Au pied du mont Kenya, Maspero, 1960 ; nouv. éd., 1967). / J. Middleton, Kikuyu and Kamba of Kenya (Londres, 1953 ; trad. fr. les Kikouyou et les Kamba du Kenia, Payot, 1954). / R. Buijtenhuijs, le Mouvement mau-mau. Une révolte paysanne en Afrique noire (Mouton, 1971).

Ki-lin ou Kirin

En pinyin Jilin, province de la Chine du Nord-Est ; 290 000 km2. Capit. Changchun (Tch’ang-tch’ouen).


La province s’étend au cœur de la Mandchourie, prolongée à l’ouest par l’absorption, en 1969, d’une partie du territoire (100 000 km2) de la Mongolie-Intérieure. Elle comptait 17 000 000 d’habitants en 1964 et 20 000 000 en 1970 (estimation) dont un million environ imputables au gain territorial de 1969. Au recensement de 1957, les « minorités nationales » représentaient 12 p. 100 de la population du Jilin, réparties en quatre grandes familles : Coréens (794 000), dont les trois quarts sont localisés dans le département autonome de Yanbian (Yen-pien) ; Mandchous (368 000), essentiellement dans les plaines centrales ; Hui (Houei) [58 000], dont la moitié dans les deux villes de Jilin et Changchun ; Mongols (51 000), dans la partie occidentale de la province, et dont le nombre est passé à plus de 250 000 après 1969.

Le territoire de cette province se partage à peu près également entre trois grands ensembles de reliefs. La partie occidentale est formée par le rebord du plateau mongol marqué par le prolongement méridional du Grand Khingan. La partie centrale correspond au seuil (200 à 300 m) qui sépare les bassins du Liaohe (Leao-ho) et de la Soungari, ensemble de basses collines qui cèdent la place au nord aux plaines de la Soungari, dont le Jilin ne possède qu’une étroite frange. À l’est se dressent de puissants alignements montagneux (1 000 à 2 000 m d’altitude) d’orientation nord-est-sud-ouest : les Zhangguangcai (Tchang-kouang-ts’ai), le Wandashan (Wan-ta-chan), le Changbaishan (Tch’ang-pai-chan) [nom par lequel on désigne habituellement l’ensemble de ces massifs], où s’élève le cône volcanique du Baitoushan (Pai-t’eou-chan), qui constitue le point culminant (2 750 m) de la Chine du Nord-Est.

Le Changbaishan est le « château d’eau » de la province, où ses trois grands fleuves prennent leur source : la Soungari, le Yalu (Yalou), le Tumen (T’ou-men). Toutes ces montagnes sont couvertes d’une magnifique végétation forestière : chênes et trembles sur les pentes inférieures ; cèdres coréens, chênes mongols, frênes de 500 à 1 000 m ; mélèzes daouriens, sapins argentés, épicéas de l’Amour à l’étage supérieur.

Les conditions climatiques du Jilin marquent une transition entre les rigueurs du Heilongjiang (Hei-long-kiang) et les caractères tempérés du Liaoning (Leao-ning). L’été y est très chaud (moyenne de juillet, 23 °C) ; les hivers, déjà rigoureux (moyenne de janvier, – 17 °C), mais moins prolongés qu’au Heilongjiang, et l’agriculture y bénéficie encore de 120 à 145 jours sans gel au cours de l’année. Les massifs orientaux sont la région la plus arrosée de la Chine du Nord-Est (800 à 1 000 mm), tandis que les précipitations diminuent rapidement vers l’ouest : 600 mm dans les plaines de la Soungari et 400 mm sur les franges occidentales.

Le soja, le mais, le millet et le kaoliang constituent les cultures traditionnelles. Le soja occupe près de 30 p. 100 des terres cultivées, et c’est la grande culture des plaines au nord de Changchun, tandis que le maïs (env. 20 p. 100 des terres cultivées) est très largement répandu dans toute la partie méridionale de la province, où il prend peu à peu la place du kaoliang, qui se concentre sur les collines orientales. Les marges occidentales, moins arrosées, sont le domaine du millet, mais surtout de l’élevage, pratiqué par les Mongols (chevaux, bovins, ovins).

L’extension de la riziculture et celle de la culture de la betterave à sucre sont les deux traits remarquables de l’évolution de l’économie agricole du Jilin.

Introduite en 1845 à Tonghua (T’ong-houa) par les Coréens dont elle constitue la base de l’économie agricole dans les vallées des massifs orientaux, la riziculture a gagné les plaines autour de la ville de Jilin et les régions de Tongfen (T’ong-fen) et Tongliao (T’ong-leao) : 150 000 ha au total en 1943, plus de 500 000 en 1958. De même, la betterave à sucre s’est largement développée dans la région qui s’étend de Changchun à Jilin, ainsi qu’à Baicheng sur les confins occidentaux de la province : 7 400 ha en 1950, 80 000 en 1958.