Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Angola (suite)

L’histoire


Autochtones et immigrants

Les traditions orales indiquent pour premiers habitants de l’Angola de petits hommes, adonnés à la chasse et à la cueillette, les Twas, sans doute de type bochiman. L’immigration bantoue commence au Ier millénaire avec les Ambundus, qui forment des petites communautés d’agriculteurs sachant travailler le fer. Au xive s. ou au début du xve, des Kongos de la rive nord du fleuve soumettent les Ambundus et organisent une structure étatique élaborée mais fragile, le royaume du Kongo, dont l’influence s’exercera au xvie s. sur une grande partie de l’Angola. Dans l’un des petits États tributaires du Kongo, le Ndongo, peuplé de Pendés, le roi portait le titre de « n’gola » ; les Portugais en tireront le nom du pays.


L’arrivée des Portugais : la traite et la première guerre

En 1482, Diego Cam découvre et remonte l’estuaire du Congo : c’est peut-être la voie d’accès vers le royaume du Prêtre Jean. Il y dresse une pierre de possession, padrão (1483). Des relations confiantes s’établissent avec le roi Nzinga Nkuwu, baptisé en 1491. Le successeur de celui-ci, Afonzo Ier (1506 - v. 1543), pousse à l’européanisation de son royaume. Mais, dès 1485, des colons portugais plantent à São Tomé de la canne à sucre et commencent à importer des esclaves du continent. Pour mieux diriger le trafic, le roi du Ndongo s’installe près de Luanda. L’essor des plantations brésiliennes accroît les besoins de main-d’œuvre. P. Dias de Novais, chargé d’une mission au Kongo en 1558, atteint l’Angola en 1560 ; il obtient en 1574, par l’entremise des Jésuites, une concession d’environ 200 km de côtes au sud du Cuanza, à charge de conquérir l’intérieur et de mettre le pays en valeur et en état de défense. Arrivé en 1575 à Luanda avec un premier groupe de colons, il développe l’exportation des esclaves, que lui fournit le roi d’Angola. Mais, vers 1580, celui-ci met à mort les Portugais résidant à sa cour : c’est le début de la première guerre, faite de conquêtes laborieuses (1583) et de razzias d’esclaves, et qui durera jusque vers 1625. Après la mort de Dias en 1589, la Couronne — alors espagnole — reprend ses droits et applique le système américain des encomiendas : chaque chef est placé sous le « protectorat » d’un Blanc, missionnaire ou soldat.


L’équilibre des forces : xviie - xixe siècle

L’étendue de la domination portugaise reste très limitée. En 1611, un fort est érigé à Ambaca, à 200 km dans l’intérieur ; en 1617, le gouverneur Cerveira Pereira fonde Benguela, à 400 km au sud de Luanda. La dépendance de l’Angola à l’égard du Brésil apparaît en 1641, lorsque les Hollandais, qui ont conquis le Pernambouc, s’emparent de Luanda pour s’assurer la fourniture des esclaves nécessaires ; et inversement en 1647, quand la mission de recouvrer l’Angola est confiée au général Correia de Sá, grand propriétaire brésilien nommé gouverneur de l’Angola, qui reconquiert Luanda en 1648. Dans l’intérieur, un certain équilibre s’établit avec les principales communautés noires : le Matamba, dont s’est emparée la reine du Ndongo, Jinga, au pouvoir despotique ; le Kongo, où des guerres menées de Luanda affaiblissent le royaume sans assurer la domination portugaise ; le Kasanje, fondé vers 1614 par des Lundas (ou Loundas) avec des tribus de nomades « razzieurs » Jagas, qui avaient dévasté au siècle précédent le Kongo ; les Ovimbundus, commerçants et guerriers venus du nord-est, qui occupent à partir du xviie s. les plateaux de l’arrière-pays de Benguela en incorporant les peuples pasteurs indigènes.

Malgré les efforts du gouverneur Sousa Coutinho (1764-1772) pour développer une véritable colonisation agricole, minière et industrielle, la traite négrière reste la principale activité économique du pays. Bannie théoriquement en 1836, elle ne s’éteint que vers le milieu du siècle, grâce aux efforts conjugués de l’Amirauté britannique et du gouverneur Da Cunha. Quant à l’esclavage, dont la source est officiellement tarie en 1858, il survivra longtemps sous la forme du travail forcé.


La deuxième guerre de conquête et l’implantation administrative

Le traité anglo-portugais du 26 février 1884, reconnaissant les droits du Portugal sur l’embouchure du Congo, provoque un conflit diplomatique qui débouche sur l’acte final de la conférence de Berlin. La dotation que le Portugal obtient par les traités consécutifs de 1886 avec l’Allemagne, de 1891 et de 1894 avec l’État indépendant du Congo, de 1891 et de 1905 avec l’Angleterre et de 1886 et de 1901 avec la France (pour le Cabinda), si elle met fin pour le Portugal au rêve d’un empire transafricain, n’en représente pas moins un territoire bien plus vaste que celui sur lequel s’exerce sa domination en 1885. Aux possessions traditionnelles ne sont guère venus s’ajouter en effet que Moçâmedes, au sud (1840), Huíla, dans l’intérieur (1845), et Ambriz, au nord de Luanda, occupé en 1855 sous le gouvernement de Guilherme de Brito Capelo.

La conquête de l’arrière-pays est préparée par les explorations de Silva Porto, qui, installé vers 1845 sur le plateau de Bié, en plein pays ovimbundu, tente la traversée de l’Afrique en 1852 ; de Serpa Pinto, qui la réussit en 1877-1879 ; et surtout de Hermenegildo de Brito Capelo et R. Ivens, qui, à la même date, parcourent la plus grande partie de l’intérieur, avant de traverser le continent en 1884.

Des opérations militaires sont menées dès 1872 contre les Dembos, au nord-est de Luanda, où elles devront être reprises en 1907-1910 sous le gouvernement de Paiva Couceiro. La révolte du pays bailundo est matée en 1902. Un soulèvement du pays kongo se produit en 1913. Plus laborieuse est la conquête du sud du pays : la résistance des Kwanyamas dure près de vingt-cinq ans. Ce n’est guère que vers 1920 que la domination portugaise devient effective.

Parallèlement à la conquête, le gouvernement s’efforce d’encourager la colonisation en institutionnalisant par les codes de 1899 et de 1911 le travail forcé. Laborieux aussi, le développement de l’infrastructure économique commence en 1903 avec la construction du chemin de fer de Benguela : la jonction avec le Katanga se fera de 1927 à 1929, année qui voit l’essor du port de Lobito, fondé en 1905. Les exportations de la Diamang (Companhia de diamantes de Angola), véritable société concessionnaire (à capitaux belges et anglais) de la majeure partie du district du Lunda, à partir de 1921, constituent pour l’Angola de l’entre-deux-guerres la source la plus importante de ses revenus. La colonisation agricole européenne reste faible. Le régime de Salazar renforce les pouvoirs de l’administration. Les affirmations d’assimilation restent une façade : en 1950, l’Angola ne compte que 30 000 assimilados (parlant portugais) sur 4 millions d’habitants. Le système de l’indigénat, qui comporte le contrôle des mouvements et du travail des Africains, est considéré comme l’une des principales causes de l’insurrection nationaliste.