Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Iran (suite)

Sur le plateau central, l’occupation humaine fut sans doute beaucoup plus tardive. On la repère seulement à partir de la fin du VIe millénaire, à Sialk I, près de Kāchān. Pendant plus de deux mille ans, entre 5500 et 3000 av. J.-C., les villageois du plateau iranien façonnèrent de magnifiques céramiques peintes, qui sont parmi les chefs-d’œuvre de l’art antique de l’Iran (Sialk, Tepe Hissar, Tall-e Bakun). Ces poteries sont décorées de motifs géométriques, puis de silhouettes d’animaux stylisés : le répertoire animalier du IVe millénaire, léopards, oiseaux aquatiques, bouquetins, sloughis, est d’une diversité étonnante. L’être humain est rarement figuré. Dès la fin du Ve millénaire, le site de Tall-e Iblis, dans le sud-est du plateau central, près de Kermān, apporte les précisions les plus intéressantes sur les débuts de la métallurgie, peut-être pratiquée de façon domestique, mais probablement exportée. À la fin du IVe millénaire, les cultures villageoises du plateau pratiquent couramment les techniques métallurgiques (Sialk III, 4). Les cultures iraniennes à céramiques peintes atteignirent leur apogée artistique dans le Khuzestān, où les fouilles françaises du début du siècle exhumèrent, à Suse, les séries qui ornent les salles du Louvre (3800-3500 av. J.-C.).


Les IIIe et IIe millénaires av. J.-C.

L’Iran du IIIe millénaire est fort mal connu, et on ne peut offrir qu’un tableau fragmentaire. La région de l’Elam* (Suse) s’urbanise parallèlement à la Mésopotamie*. Vers 3000 av. J.-C. apparaissent l’écriture pictographique des tablettes protoélamites et la sculpture en ronde bosse ; seul, le sceau-cylindre, qui s’imprime sur des tablettes ou des bulles d’argile, permet de marquer les principales étapes de l’évolution. Les liens entre l’Iran et la Mésopotamie deviennent extrêmement nets. L’exemple le plus frappant est fourni par certains vases en stéatite décorés de reliefs peu accentués dont les détails sont rendus le plus souvent par des incisions, retrouvés en Mésopotamie en abondance dans la région de la Diyālā, à Mari, à Tello, mais également à Suse ; ils sont datés d’environ 2700-2400 av. J.-C. Des exemplaires viennent d’être retrouvés sur le plateau central iranien, à Tepe Yahyā, au sud de Kermān. Cette ville devait vivre en partie du commerce de la stéatite, fort prisée en Mésopotamie. À l’autre extrémité du territoire iranien, sur les bords sud-est de la mer Caspienne (Chah Tepe, Turang Tepe), la céramique peinte chalcolithique est peu à peu remplacée par une céramique monochrome grise à surface soigneusement lissée, qui supplante également les céramiques peintes antérieures à Tepe Hissar, au sud de la chaîne de l’Elbourz. Dès les premiers siècles du IIIe millénaire, la céramique grise lissée règne seule sur toute la région au sud-est de la mer Caspienne. On peut en suivre, jusqu’au début du second millénaire, l’évolution continue. Au milieu du IIIe millénaire, cette civilisation permettait l’acheminement du lapis-lazuli, extrait d’Afghānistān, vers les cours sumériennes, grandes consommatrices. Dans la seconde moitié du IIIe millénaire, la pression de la Mésopotamie sur l’Iran occidental se fait plus forte : les rois montagnards du Zagros font alors sculpter sur les parois des montagnes des reliefs de victoire directement inspirés de l’art akkadien* (bas-relief d’Anubanini). Vers 2200 av. J.-C., l’écriture protoélamite est définitivement remplacée par récriture cunéiforme. À Suse, les sceaux-cylindres de l’époque sont difficilement distingués des sceaux mésopotamiens. Durant le IIe millénaire, on ne connaît guère que le développement de la région de Suse. Si l’art élamite de la première moitié du IIe millénaire est mal précisé, l’art élamite « moyen » (1500 à 1000 av. J.-C.) est en revanche célèbre grâce au site extraordinaire de Tchoga Zanbil, à une cinquantaine de kilomètres au sud-est de Suse.


Les débuts du Ier millénaire

À la fin du IIe et au début du Ier millénaire, l’attention se porte de nouveau sur le nord de l’Iran. De nombreux sites du Nord-Ouest, Khorvine, Sialk, Giyan, fournissent une abondante céramique grise qui n’est pas sans présenter certaines analogies avec les cultures de la plaine de Gorgan du début du IIe millénaire. Les sites de Marlik et Hasanlu fournissent une fine vaisselle en or et en argent. Cette région devint l’enjeu d’une lutte d’influence entre les Assyriens, les Scythes, les Mèdes, les Mannéens : le trésor de Ziwiyé, qui date pour l’essentiel de la fin du viiie et du début du viie s., en est un bon témoin, par l’hétérogénéité même des objets qui composent cette collection (Musée archéologique, Téhéran). Dans cette région, au moment où la puissance assyrienne s’assure peu à peu la maîtrise de tout l’Orient non iranien, les peuples mèdes sont attestés dans l’histoire, pour la première fois, à l’époque de Salmanasar III (859-824 av. J.-C.). Devant la menace assyrienne, ils se constituèrent en fédération de tribus, autour d’Ecbatane, et s’emparèrent de Ninive en 612 av. J.-C. Cette victoire fut bientôt annulée par le triomphe du Perse Cyrus, qui réunit sous son autorité les deux peuples.


L’époque achéménide*

L’Empire achéménide, le plus vaste que l’Orient ait connu, vit éclore un art nouveau. Ayant vécu pendant plus de deux siècles sur une conception politique despotique, il donna naturellement naissance à un art fondé sur l’exaltation de la personne royale. Il chercha aussi à unir à un fond proprement iranien les éléments hétérogènes fournis par les civilisations non iraniennes des peuples soumis. La première capitale, Pasargades, est iranienne pour l’essentiel : monuments dispersés sur une grande superficie, isolés au milieu de jardins irrigués, tous conçus selon le principe de la salle hypostyle, dont l’origine doit être recherchée dans le nord de l’Iran, par exemple à Hasanlu IV (v. 1000-800 av. J.-C.), où existe une salle hypostyle à deux rangées de colonnes. En revanche, l’art ionien fait déjà sentir son influence dans la façon dont sont taillées les bases de colonnes, cannelées, et dans le traitement des reliefs, où les premières ébauches du drapé achéménide des vêtements sont probablement inspirées de modèles grecs. Cependant, le tombeau de Cyrus lui-même, en forme de maison couverte d’un toit à double pente, demeure à l’abri de ces contaminations étrangères.