Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

information (suite)

En 1851, Julius Reuter (1816-1899), qui avait également travaillé chez Havas, fonda à Londres un bureau d’informations télégraphiques qui devint en février 1865 la Reuter’s Telegram Company ; après des débuts difficiles, l’Agence Reuter s’imposa, et son importance fut à la mesure de l’étendue du réseau anglais de câbles télégraphiques et de l’importance de l’Empire britannique. En 1925, la Press Association, groupement de journaux provinciaux anglais, prit le contrôle de l’agence ; en 1941, la Newspaper Proprietors’ Association (groupement des journaux nationaux), puis des associations de journaux australiens et néo-zélandais s’y associèrent, et, aujourd’hui, l’Agence Reuter (Reuters Ltd) est une sorte de trust à forme plus ou moins coopérative.

Alors que, dans tous les pays européens, une agence réussit à imposer son monopole, aux États-Unis la richesse et la diversité des journaux permirent la constitution de plusieurs grandes agences rivales. On donne souvent comme origine à la plus ancienne, l’Associated Press (AP), l’association de six journaux new-yorkais qui, en mai 1848, décidèrent de renoncer à la ruineuse concurrence qui les opposait dans la recherche des nouvelles européennes. Mais cette agence mit longtemps à se développer. Elle fut en 1892 réorganisée sous une forme coopérative. En 1906, W. R. Hearst créa dans son trust de presse l’International News Service, et, en 1907, l’United Press naquit dans le groupe Scripps-McRae. En 1958, ces deux agences fusionnèrent sous le nom de United Press International (UPI), qui fonctionne comme entreprise commerciale ordinaire.

Jusqu’en 1914, Havas, Reuter et Associated Press s’étaient partagé le marché mondial des nouvelles par toute une série d’accords d’exclusivité et d’échanges auxquels les autres agences nationales étaient associées. Ces accords entre agences alliées ne résistèrent pas à la Première Guerre mondiale : l’impérialisme des agences américaines, l’indépendance agressive des agences des pays totalitaires brisèrent l’entente, et, dans l’entre-deux-guerres, la concurrence sauvage fut la règle ; encore aujourd’hui, si les relations sont meilleures, la rivalité subsiste.


Les cinq grandes agences mondiales contemporaines

À l’heure actuelle, cinq grandes agences dominent le marché et disposent, tant pour la collecte que pour la diffusion des nouvelles, d’un réseau mondial. Leurs bureaux permanents, répartis à travers le monde, collectent les nouvelles par leurs correspondants spéciaux et par accord avec les agences nationales locales. Les grands événements sont couverts par des envoyés spéciaux. Les informations transmises télégraphiquement ou par radio au bureau central sont mises en forme et transmises, après avoir été éventuellement traduites, aux différents clients qui les reçoivent à domicile partout dans le monde sur les téléscripteurs, qui peuvent transcrire plusieurs milliers de mots à l’heure. Les services centraux de ces agences sont divisés en plusieurs services (desks) spécialises : service général, service économique, service parlementaire, service hippique, service religieux et services en langue étrangère... Ces services ne se contentent plus de transmettre de simples dépêches de nouvelles (flashes), mais de plus en plus aussi des textes d’information élaborée sous forme de synthèses (roundups) ou d’articles rédigés (features). Chaque agence cherche naturellement à fournir la première des informations originales ou sensationnelles (scoops).

Pour leurs transmissions internationales, les agences utilisent les câbles télégraphiques et les liaisons radio par faisceaux hertziens et plus récemment par satellites. Certaines agences ont entrepris des études pour doubler leurs services par téléscripteurs d’un service par terminaux reliés à un ordinateur central qui, véritable banque de données, emmagasinerait les informations dans sa mémoire électronique et pourrait répondre, sur leur demande, aux besoins de ses clients. Déjà, pour les informations boursières, l’Agence Reuter et l’Associated Press (en liaison avec le Wall Street Journal) ont créé des services très complets. La généralisation de ce système à l’ensemble des services des agences représenterait une véritable révolution, mais exigerait aussi des investissements énormes, et il faudra sans doute plusieurs décennies pour le mettre en place.

Les investissements nécessaires à la modernisation de l’infrastructure des transmissions, le coût élevé de leur entretien, le prix élevé de l’usage des câbles, faisceaux hertziens et satellites augmentent continuellement le prix des services des grandes agences.

Les agences américaines AP et UPI sont les deux plus grandes du monde contemporain. L’Associated Press a 104 bureaux à l’étranger, et United Press International 95. Elles ont toutes deux un excellent service photographique qui diffuse par des appareils dérivés du bélinographe des photos pour les journaux ou la télévision. Reuter a des bureaux dans 87 pays et collecte l’information dans 183 pays ou territoires. Son service économique est particulièrement réputé. L’A. F. P. a également un réseau très étendu de 92 bureaux à l’étranger qui collectent les informations de 157 pays ou territoires. Ses services sont diffusés dans 139 pays. Comme les ressources de ses clients, journaux, agences de presse, stations de radio ou de télévision et divers clients privés, sont limitées, son budget est dans une proportion voisine de 50 p. 100 supporté par l’État, auquel elle fait de nombreux services dans les administrations et les ambassades. La qualité de ses services est reconnue à l’étranger, où ils complètent utilement et concurrencent souvent ceux des agences anglo-saxonnes. L’A. F. P. tient une place particulièrement importante en Amérique du Sud.

Sans avoir encore atteint la même ampleur internationale que les agences occidentales, l’agence soviétique Tass (Telegrafnoïe Aguentstvo Sovetskogo Soïouza), fondée en 1925 et dont le directeur a depuis janvier 1972 rang de ministre, a considérablement accru ces dernières années son réseau à l’étranger, et elle distribue ses services dans 76 pays. Depuis 1961, elle est doublée par l’agence de presse Novosti (APN), qui diffuse des articles, des émissions de radio ou des films pour la télévision et qui tend à faciliter les échanges avec les autres pays.