Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Ibsen (Henrik) (suite)

La mer joue un rôle important dans les pièces d’Ibsen. C’est un pouvoir vivant qui exerce sur l’esprit une grande influence, et les termes liés à la mer prennent dans la bouche des personnages d’Ibsen un sens très particulier. D’autre part, Ibsen présente volontiers la mort comme une force fascinante, triomphante que la mer peut symboliser. Hedvig, le canard sauvage (précédemment noyé et repêché), va retrouver la mort dans le grenier, qui représente la mer. Dans la Dame de la mer, Ellida, éprouve une étrange attirance envers la mer. Précédemment fiancée à un marin, elle est hantée par son souvenir. Elle le croit mort en mer, mais elle avait juré de lui appartenir pour toujours. Ellida a peur, car, mort ou vivant, le marin la réclamera. Celui-ci revient ; son image est à la fois associée à l’assassinat qu’il a commis, à l’idée de noyade, aux apparitions surnaturelles et à la mer, mais, en fin de compte, il représente la mort. Il réclame Ellida, qui sent l’étau se refermer sur elle, mais il la veut de son plein gré. Wangel, le mari d’Ellida, lui donne la possibilité de choisir. Cette liberté nouvelle permet d’échapper à l’emprise de l’homme venu de la mer. Dans le Petit Eyolf, la disparition de l’enfant est intimement liée à la mer, il se noiera en cherchant « la femme aux rats » qui le fascine.

Dans les dernières œuvres revient le thème de l’ascension. En fait, l’ascension (Solness gravit sa construction, Borkman la pente enneigée pour contempler son royaume, Irène et Rubek gravissent la montagne) est un symbole. Entreprendre l’ascension, c’est se libérer d’une contrainte qui empêche de vivre. Mais cela signifie également la mort, car il s’agit d’êtres en rupture avec la vie et la société, quoique tous de façon différente. L’élément de base qui provoque la rupture est une volonté de puissance qui rend la vie de la « vallée » impossible. Chacune de ces pièces met également en scène un mariage conventionnel raté, les personnages tendant à un amour à l’image de leur génie.

En marge des thèmes centraux, il faut faire une place particulière au suicide. Il est remarquable qu’Ibsen se serve du suicide comme d’un élément du dénouement ou plutôt de la rupture finale. Ibsen était lui-même préoccupé par ce problème, et, dans ses pièces, ce moment dramatique ne constitue pas la dénégation, mais, au contraire, une affirmation de soi. Le suicide a un sens ; c’est un choix. Solution extrême de l’homme qui veut se réaliser. Il y a en fait deux catégories de suicides. La première est constituée par les suicides « créatifs », c’est-à-dire qui signifient l’affirmation de soi et qui sont des suicides réels : ainsi les suicides de Rosmersholm, celui de Hedda Gabler. La mort de Hedvig dans le Canard sauvage est un peu différente. Hedvig se tue pour prouver son amour à l’égard de son père, c’est-à-dire pour réaliser cet amour aux yeux du père. La seconde catégorie est faite des lents suicides spirituels (Brand) ou des suicides de l’« ascension », correspondant à une exaltation spirituelle. Solness gravit sa tour et meurt. Irène et Rubek gravissent la montagne pour ne plus redescendre, acte qui annonce la volonté d’une extension de la vie, au-delà de la mort.

Ibsen utilise des symboles, et certains reviennent constamment. Ils sont à double sens, c’est-à-dire que le personnage se sent attiré et repoussé par les mêmes éléments. Ainsi, la lumière peut signifier à la fois ce à quoi on tend (la force intérieure qui veut la réalisation de l’être) et l’élément que l’on fuit (la fuite devant la réalité). La réaction de Hedda Gabler est, à ce point de vue, très significative : Hedda craint la lumière, comme elle craint son propre feu intérieur, et préfère l’obscurité. Ainsi, l’obscurité masque ce qui opprime (ce contre quoi le personnage se bat) ou ce qui soulage (mensonge vital) et est à la fois prison ou refuge. Le temps et le paysage correspondent aussi souvent à l’état d’esprit des personnages (le froid hiver de Maison de poupée, l’idée des marécages dans le Canard sauvage). L’éclat de la vérité même est à double sens : ou celle-ci apporte le salut, comme dans les Piliers de la société, ou elle provoque la destruction, comme dans le Canard sauvage. En fait, la vérité de l’individu se fonde sur des valeurs contradictoires selon les situations. Et l’intérêt de l’œuvre d’Ibsen réside moins dans les solutions qu’elle offre aux problèmes humains que dans les questions qu’elle pose.

S. C.

 M. Bigeon, les Révoltés scandinaves (Grasilier, 1894). / F. Bull, F. Paasche, A. Winsnes et P. Houm, Histoire de la littérature norvégienne (en norvégien, Oslo, 1923-1937 ; 5 vol.). / H. Koht, The Life of Ibsen (New York et Londres, 1931 ; 2 vol.). / Lugné Poe, Ibsen (Rieder, 1936). / J. W. McFarlane, Ibsen and The Temper of Norwegian Literature (Oxford, 1960) ; Discussions of Henrik Ibsen (Lexington, Mass., 1962). / G. W. Knight, Ibsen (Londres, 1962). / D. Haakonsen, Henrik Ibsens « Peer Gynt » (Oslo, 1967).

Ichtyosaures

Reptiles marins qui ont vécu du Trias moyen au Crétacé supérieur et qui, par suite de leur mode de vie, rappellent dans une certaine mesure les Poissons.
C’est en raison de cette ressemblance que le nom d’Ichtyosaures a été attribué à ces reptiles.



Découverte

Des restes d’Ichtyosaures sont connus depuis longtemps : dès le xviiie s., un naturaliste suisse, Jean-Jacques Scheuchzer (1672-1733), avait décrit des vertèbres d’Ichtyosaures, mais il considérait celles-ci comme des vertèbres humaines. Le premier squelette complet d’Ichtyosaure fut découvert en 1811 par une enfant, Mary Anning, fille d’un marchand de coquillages fossiles ; cette pièce avait été mise au jour dans le Lias de Lyme Regis (Angleterre). Georges Cuvier ensuite, donna une étude précise de l’anatomie des Ichtyosaures dans ses Recherches sur les ossements fossiles. Les plus beaux squelettes d’Ichtyosaures connus proviennent du Lias d’Holzmaden (Wurtemberg). On peut observer sur ces fossiles la trace des contours mêmes et de la peau de l’animal.