Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hannibal (suite)

Les délices de Capoue

Quoi qu’il en soit, Hannibal laissa d’abord ses troupes séjourner à Capoue, où elles goûtèrent aux délices de la civilisation grecque. Puis vint le jour où les Romains assiégèrent Capoue. Hannibal chercha à les attirer sur un autre terrain, les battit en plusieurs occasions, prit entre-temps des villes de la côte (Tarente, Héraclée, Thurium, Métaponte), mais il n’arriva pas à faire lâcher prise aux assiégeants de Capoue. C’est dans le cadre de ces opérations de diversion qu’il faut situer sa marche sur Rome, en 211.

Hannibal apparut sous les murs de la ville, campa quelques jours au bord de l’Anio et alla reconnaître les murailles. Une violente ondée fit tourner court les préparatifs d’un combat en rase campagne, et Hannibal n’insista pas. Son apparition devait laisser aux Romains le souvenir d’une terreur légendaire, mêlée d’estime pour l’adversaire. Capoue tomba peu après au pouvoir des Romains, qui traitèrent la ville avec barbarie. Hannibal en fut très affecté, toutes ces opérations ayant eu pour objet de détourner ses adversaires de Capoue. La guerre se poursuivit sans but précis, mais non sans ravages : en 210, Hannibal aurait pris et saccagé quatre cents localités de l’Italie méridionale (car les Italiens se ralliaient de nouveau à Rome). Dans l’ensemble, il perdait pied et se voyait repoussé graduellement vers le Bruttium. Malgré la fidélité chancelante des Latins, en 209, malgré l’arrivée tardive des renforts envoyés par Carthage (Hasdrubal Barca, puis Magon, frères d’Hannibal), il ne put que se maintenir sur un territoire de plus en plus restreint. Quand, en 203, Carthage le rappela, à la suite du débarquement de Scipion en Afrique, il n’occupait plus que Crotone et ses abords immédiats. C’est alors qu’il fit graver au temple d’Era Lacinia ses exploits, qu’il pouvait croire achevés.

Il quitta donc le Bruttium, non sans l’avoir saccagé, débarqua en Afrique, rencontra Scipion dans un espoir de négociation et engagea la bataille de Zama dans des conditions qui lui étaient défavorables. Le désordre fit le reste, et Carthage fut vaincue (202).


L’après-guerre

Hannibal fit accepter les dures propositions de paix de Scipion, puis, devenu suffète, accomplit d’importantes réformes dans le gouvernement de Carthage et restaura l’activité économique. Son activité inquiéta à la fois Rome et ses ennemis politiques. Aussi, en 195, il jugea bon de fuir et de se réfugier à la cour du roi de Syrie, Antiochos III Mégas (223-187 av. J.-C.), dont il devint le conseiller. Mais les intrigues de cour, son échec à la tête d’une escadre, lors de la bataille navale qui eut lieu à l’embouchure de l’Eurymédon (190), et la paix d’Apamée (188), qui le contraignit à fuir en Bithynie, où il rendit de nombreux services au roi Prousias († v. 182 av. J.-C.) et où il continua à intriguer contre Rome, ont fait de ses vieux jours une période de déceptions sans fin : Rome était partout victorieuse, et Carthage le traitait en suspect. Menacé d’être livré aux Romains, Hannibal s’empoisonna.

Nous ne connaissons que les actions d’Hannibal et nous nous efforçons d’en tirer ses intentions, ce qui est difficile. Il est certain qu’il fut aussi un grand politique et qu’il a cherché à recruter des alliés contre Rome. Il n’a pas réussi à former une coalition avec Syracuse et la Macédoine. Il a guerroyé avec opiniâtreté contre Rome, comme en une croisade, médiocrement soutenu par Carthage. Il a été servi par sa connaissance de la tactique macédonienne, l’un des éléments de sa culture hellénique. Il gardait sur son armée toute son autorité, tout son ascendant dans les pires circonstances. Mais peut-être mêlait-il, comme l’a observé C. Jullian, ses qualités de réflexion à l’entêtement et à l’imagination aventureuse. Il avait aussi certains défauts : la cruauté, le goût immodéré du pillage et du butin, la ruse et même la perfidie, et Michelet n’a pas eu tellement tort de le considérer comme un condottiere.

R. H.

➙ Carthage / Puniques (guerres) / Rome.

 G. P. Baker, Hannibal (New York, 1929 ; trad. fr. Annibal, Payot, 1952). / G. R. De Beer, Alps and Elephants. Hannibal’s March (Londres, 1955 ; trad. fr. Route Annibal, Nilson, 1962). / J. Carcopino, Profils de conquérants (Flammarion, 1961). / J. Pernoud, Annibal (Julliard, 1962). / G. Charles-Picard, Hannibal (Hachette, 1967).

Hanoi

Capit. de la république démocratique du Viêt-nam (Viêt-nam du Nord) ; environ 1 million d’habitants.


Le rôle politique de Hanoi (ou Hanôi) remonterait au iiie s. de notre ère, quand elle aurait été capitale du Viêt-nam sous l’autorité chinoise (de 111 av. J.-C. à 939, le delta du Sông Khôi [fleuve Rouge] fut gouverné par les Chinois). Cela explique le choix de la position : la ville se trouve à la tête du delta, ou presque. C’est, en effet, légèrement en amont que le « canal des Rapides », qui est non pas un canal, mais un défluent naturel (Sông Luông), quitte le bras principal du Sông Khôi (ou Sông Nhi Ha) pour rejoindre le Sông Thai Binh et la mer. À une époque où les transports s’effectuaient par voie d’eau, cette position permettait, par le bras principal, en dépit de son régime très irrégulier, de communiquer avec tout le sud du delta et, par le Sông Luông, avec l’est de ce delta. Hanoi commande ainsi tout le delta. Par ailleurs, la ville était en liaison facile avec la Chine, moins par le haut Sông Khôi ou ses affluents, Sông Da (rivière Noire) et Sông Lô (rivière Claire), qui ne mènent nulle part, que par la vallée du Sông Luc Nam et le col de la « Porte de Chine ». Par contre, le site est difficile. À l’abri des hautes digues qui, très tôt à l’époque chinoise, enfermèrent le fleuve, la ville est installée sur la rive droite, dans une zone très basse (le « casier de Ha Dông »), menacée par les inondations, à demi amphibie. Aujourd’hui encore, elle est limitée au nord par le Grand Lac et le lac de Trung Bach, cependant qu’elle encercle le ravissant « Petit Lac ».

Après que le Viêt-nam eut secoué l’autorité chinoise, elle fut choisie en 1010 comme capitale par les premiers rois nationaux. Lors des guerres intestines entre la dynastie des Lê et les Nguyên, elle resta la capitale du Nord. Écartée au profit de Huê par Gia Long en 1801, elle fut de 1887 à 1945 capitale de l’Indochine française.

Elle comprend un quartier ancien, à l’ouest et au nord du Petit Lac, aux rues pittoresques, et deux quartiers légués par l’époque coloniale : celui de l’ancienne « Concession » de 1874, au sud du Petit Lac, aux rues parallèles, et celui qui s’étend à l’ouest de la Citadelle (construite au xviiie s.).