Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

habillement (suite)

Les grands tailleurs, dont le nombre s’élevait à une trentaine avant 1914 et qui n’étaient plus, en 1971, qu’une dizaine, évoluent dans le même sens que les couturiers : ils ouvrent boutiques sur rue (Larsen), et certains (Francesco Smalto, Cristiani) fabriquent de petites séries de prêt-à-porter de 60 à 80 pièces. Toutefois, si la couturière en chambre est passée au second plan, la couture n’a pas perdu droit de cité chez le particulier, même dans les pays nettement industrialisés ; en 1970, on a vendu aux États-Unis pour trois milliards de dollars de matériel destiné à la couture.

La couture en Europe

• La couture italienne figure parmi les secteurs les plus importants du commerce extérieur italien après le tourisme. Les principaux pays acheteurs sont l’Allemagne fédérale, les États-Unis, la France, la Hollande, la Suisse, la Grande-Bretagne et la Suède. La haute couture produit également un prêt-à-porter de luxe. Parmi les créateurs, il faut citer : Emilio Pucci, Mila Schön, Valentino, Antonelli. La mode masculine est illustrée par Cerruti, Nino Laus, Remo Argenti. Un prêt-à-porter de luxe est produit par Avolio, Litrico, Bertoli, Wanda Roveda, Jean-Baptiste Caumont, Ottavio Missoni (spécialisé dans la maille), Graziella Fontana, etc. Le prêt-à-porter italien fait appel à des modélistes étrangers tels que Karl Lagerfeld ou Kenzo.

• La couture britannique a marqué la mode avec la minijupe, vulgarisée par Mary Quant dans le prêt-à-porter, illustré aussi par Alice Pollock et Ossie Clark. Parmi les grands couturiers, il faut citer Norman Hartnell et Hardy Amies.

• L’Espagne voit dans la haute couture une source de développement. Ses modèles sont classiques, parfaitement finis. Elle exporte sa production vers les États-Unis (73 p. 100) et fonde des espoirs sur les possibilités de marchés futurs en Afrique et en Chine. Son principal couturier est Pertagaz, digne héritier de Balenciaga. Son prêt-à-porter de luxe lui a rapporté en 1968 pour 2 500 millions de pesetas.

• La couture irlandaise est très marquée par le folklore chez Clodagh, Mary o’Donnel, Donald Davies.

• La couture en Europe septentrionale est illustrée par Marimekko, Armi Ratia (Finlande), par Margit Brandt, A. Lund Jensen, célèbre pour ses tissages (Danemark), et par Anne Modellen, Dranella (Suède).


Le prêt-à-porter de grande diffusion

Le prêt-à-porter de luxe est venu combler le fossé qui séparait, avant la guerre, la haute couture d’une confection caractérisée par des articles de qualité très moyenne. Devant les perspectives d’un marché élargi à de nouvelles couches de consommateurs, celle-ci a amélioré à tel point la qualité de sa production que le terme de confection tend de plus en plus à se confondre avec celui de prêt-à-porter.

La production du prêt-à-porter français est liée en 1971 à des entreprises très diversifiées : entreprises anonymes travaillant à la fois pour les couturiers et pour des chaînes de distribution ; industriels également liés à la couture, mais diffusant aussi des articles à leur nom ; enfin, entreprises très industrialisées et ne distribuant qu’une production à leur marque (Indreco, les Fils de Joseph Weil, Robert Weill, Thierry et Sigrand, Renoma, etc.). Ces dernières sont équipées de façon à sortir des milliers de vêtements par jour, dans de très longues séries (de 5 à 10 000 unités). Les stylistes ont joué un rôle déterminant dans l’expansion du prêt-à-porter : ce sont les couturiers de la masse. Le stylisme s’est affirmé dans les années 60 avec E. Khanh, Michèle Rosier et Christiane Bailly. Déjà, en 1955, Denise Fayolle avait créé à l’intention du grand public des modèles de caractère à des prix raisonnables. Certaines boutiques diffusent à leur nom un prêt-à-porter de stylistes qu’elles font fabriquer en petites séries : Karl Lagerfeld, Tan Giudicelli, Kenzo travaillent pour des boutiques françaises ou italiennes, à moins qu’ils n’ouvrent eux-mêmes boutique (Elie Jacobson, Kenzo). Des accords ont été signés entre stylistes et fabricants : depuis 1969, la Société française de prêt-à-porter ne fabrique plus que des modèles signés par E. Khanh ; enfin, plusieurs stylistes ont fondé leur propre maison : Daniel Hechter a créé en 1962 les Établissements Hechter et Fils ; la société Cacharel, créée en 1958, distribue à très grande échelle un prêt-à-porter de style, ainsi que Gaston Jaunet, sous la marque Get.

Depuis quelques années, un phénomène de concentration commence à se dessiner dans cette profession encore très marquée par des entreprises moyennes de type familial. De 1960 à 1970, plus du quart des sociétés ont disparu à la suite de fusions ou de regroupements dus au Marché commun. Le nombre d’entreprises est encore très important. Jusqu’ici, les regroupements qui ont eu lieu au niveau du textile (Boussac-Prouvost ; Agache-Willot D. M. C.) n’ont pas eu leur équivalent dans ce domaine. À part quelques grosses firmes, il y a en France très peu d’entreprises vraiment intégrées.

Ces entreprises sont déjà décentralisées : en plus des ateliers du Nord et de la région lyonnaise, d’autres ont été implantés dans le Centre (entre Nevers et Tours : chemiserie, lingerie), sur la Côte d’Azur (confection féminine et vêtements de plage) et en Bretagne, où ils fournissent du travail à une main-d’œuvre féminine moins chère que dans la région parisienne.

Cette évolution des structures s’accompagne d’un phénomène de « déspécialisation » qui abolit les variétés entre des catégories autrefois très cloisonnées : la distinction entre drapiers (spécialisés dans le costume) et cotonniers (spécialisés dans le vêtement de travail) a disparu ; les fabricants de vêtements de travail ont englobé dans leur production celle des vêtements de loisirs par l’intermédiaire du jean et ils ont développé certains articles, inédits pour eux, tels que les cirés employés sur les chantiers. Si la fabrication des vêtements de cuir ou des vêtements de pluie est encore du domaine de la spécialisation, il n’en demeure pas moins vrai que la production des entreprises les plus importantes (Weill, Indreco, Thierry et Sigrand) est de plus en plus diversifiée.