Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

gouvernementale (fonction) (suite)

Jusqu’en 1948, l’usage du pouvoir réglementaire était limité ; le gouvernement édictait des règlements à la demande du Parlement pour compléter une loi (règlements d’administration publique) ou en vertu d’une compétence qui lui avait été donnée expressément par ce dernier ; il réglementait spontanément en vue de régler les détails d’application d’une loi et dans certains domaines considérés comme étant les siens propres en l’absence de toute loi (règlements autonomes) ; pendant longtemps, on a considéré que le domaine de ces règlements autonomes était limité au fonctionnement des services publics et à la police. En vue d’accroître le domaine réglementaire, diverses procédures ont été employées, notamment le système des décrets-lois (apparu sous la IIIe République et continué sous la IVe malgré l’interdiction formelle de la Constitution de 1946) ou celui des lois-cadres préconisé par certains socialistes (le Parlement adopte une loi très courte posant les principes généraux d’une réforme et charge le gouvernement d’en préciser les détails). La loi du 17 août 1948 et les articles 34 et 37 de la Constitution de 1958 ont résolu le problème d’une façon plus élégante : le Parlement et le gouvernement voient définir les domaines qui leur sont réservés, celui qui est affecté au pouvoir réglementaire étant élargi considérablement aujourd’hui.

Le gouvernement prend les décrets et les arrêtés, tous passibles du contrôle des tribunaux administratifs. Il est tenu de soumettre à l’avis du Conseil d’État le texte des « règlements d’administration publique », des décrets intervenant dans les matières qui, avant 1958, étaient de la compétence du Parlement et, de façon générale, des décrets dits « décrets en Conseil d’État », mais, dans la quasi-totalité des cas, il n’est pas tenu de suivre l’avis rendu ; il peut également consulter le Conseil d’État pour des décrets simples ou des arrêtés. La consultation du Conseil économique et social est également parfois requise.


Les actes administratifs

La nomination aux emplois civils et militaires est, suivant les cas, de la compétence du président de la République ou du Premier ministre. Parmi les autres actes administratifs, on peut citer les déclarations d’utilité publique, les changements de nom, les déchéances de nationalité, les remises de débat, les dissolutions de conseils municipaux, etc.


Les attributions d’ordre judiciaire

Le président de la République a le droit de grâce, est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire et préside le Conseil supérieur de la magistrature (le ministre de la Justice, garde des Sceaux, en est le vice-président), qui fait les propositions pour les nominations des plus hauts magistrats et est consulté pour les nominations des autres magistrats du siège et sur les grâces*.

R. M.

➙ Administration / Démocratie / État / France / Grande-Bretagne / Juridiques (sciences) / Législative (fonction) / Parlement / Parlementaire (régime) / Réglementaire (pouvoir).

 M. Duverger, Institutions politiques et droit constitutionnel (P. U. F., 1955 ; 11e éd., 1970). / G. Bergeron, Fonctionnement de l’État (A. Colin, 1965). / P. Avril, le Gouvernement de la France (Éd. universitaires, 1969).

Goya (Francisco)

Peintre espagnol (Fuendetodos, province de Saragosse, 1746 - Bordeaux 1828).



Le milieu historique et social

Francisco Goya naît la même année où meurt le premier Bourbon d’Espagne, Philippe V. Depuis quarante-six ans, l’Espagne vit à l’heure française, ce qui a pour résultat d’exalter, par réaction, les valeurs traditionnelles du peuple hispanique. En fait, le remariage de Philippe V avec une Italienne, Elisabeth Farnèse, contrebalance largement l’influence de la France. À l’exemple de Paris, les ministres bourbonniens instaurent des académies : l’académie des beaux-arts San Fernando (fondée en 1744) est inaugurée en 1752, tandis que les peintres français tels que Michel-Ange Houasse (1680-1730), Jean Ranc (1674-1735) ou Michel Van Loo (1707-1771) introduisent à Madrid l’art du portrait de cour de Versailles ; mais, au milieu du xviiie s., l’art italien devient prépondérant avec le peintre napolitain Corrado Giaquinto (1703-1765) et le grand Vénitien Giambattista Tiepolo*.

Les maîtres étrangers forment des peintres espagnols qui ne possèdent pas tous le même mérite, bien que certains d’entre eux, comme Francisco Bayeu (1734-1795), Luis Paret (1746-1799), Antonio González Velázquez (1723-1793), comptent parmi les meilleurs artistes espagnols du xviiie s. En 1759, le quatrième fils de Philippe V, Charles III, monte sur le trône d’Espagne. Sous son règne s’entremêlent curieusement les effets d’une dévotion de plus en plus étroite et le développement de l’« esprit des lumières », qui suscitera toute une équipe de libéraux, philosophes, juristes, penseurs et poètes de très grande valeur.


La formation de Goya

C’est donc dans un climat particulièrement favorable, sur le plan à la fois esthétique et culturel, que naît Francisco Goya y Lucientes, le 30 mars 1746, à Fuendetodos, petite bourgade située au sud de Saragosse, en Aragon, dont sa mère, Gracia Lucientes, est originaire. Goya est le fils d’un maître doreur établi à Saragosse. Les terres que labourent les Lucientes appartiennent à Joaquín Pignatelli, comte de Fuentes, dans le palais duquel est installé le peintre José Luzán (1710-1785), le premier maître de Goya. Celui-ci travaille quatre ans dans l’atelier de Luzán. En 1763, il suit peut-être le peintre aragonais Francisco Bayeu, appelé à Madrid par Anton Raphael Mengs (1728-1779), premier peintre du roi, et se présente au concours de bourse de l’académie San Fernando, où il échoue. En 1766, le nom de Goya apparaît parmi les participants au concours triennal de l’Académie, qui est un nouvel échec pour lui. De 1766 au 20 avril 1771 — date d’une lettre qu’il adresse de Rome au comte Rezzonico, secrétaire perpétuel de l’académie de Parme —, on ne possède aucun renseignement sur l’activité du jeune artiste. Goya annonce au comte Rezzonico l’envoi d’un tableau qu’il a fait pour le concours de l’Académie ; l’unique prix est attribué à Paolo Borroni (1749-1819). Il est à signaler que l’académie de Parme a été fondée par l’infant Philippe, frère de Charles III d’Espagne, et que Tiepolo est membre de cette académie.