Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

glaucome (suite)

Glaucome chronique

C’est le type le plus fréquent. L’hérédité joue un rôle certain, et il est possible actuellement de prévoir dans une certaine mesure, grâce au test à la dexaméthasone (corticoïde instillé en collyre), le développement éventuel d’un glaucome chez les descendants de glaucomateux.

Le glaucome chronique passe par trois stades.

• Un premier stade d’hypertension oculaire pure s’observe chez 2 p. 100 des individus au-delà de 40 ans. Son diagnostic est difficile, car il ne se traduit par aucun symptôme subjectif ; seule la prise systématique de la tension oculaire permet de le dépister. Le chiffre de la tension oculaire présente une valeur supérieure à l’écart standard par rapport à la moyenne normale, c’est-à-dire supérieure à 21 mm Hg.

Dans les cas limites, il importe toujours de s’assurer du diagnostic et de pratiquer un certain nombre d’épreuves : courbe de tension toutes les 4 heures, à la recherche d’une élévation tensionnelle fugace mais pathogène au cours du nycthémère ; épreuves de provocation qui consistent à provoquer l’élévation de la tension oculaire par un moyen approprié, la réponse du glaucomateux étant nettement supérieure à celle du sujet normal ; tonographie, qui consiste à placer un tonomètre de Schiotz sur le globe oculaire pendant 4 minutes et à enregistrer graphiquement et électroniquement la chute de pression qui apparaît dans le globe oculaire sous l’effet du poids du tonomètre. Le stade de glaucome tonométrique est assez long et peut durer une dizaine d’années.

• Puis apparaît le stade campimétrique. Il s’observe plus rarement que le précédent (0,43 p. 100 des individus après 40 ans). Toutes les hypertensions oculaires ne mènent donc pas à ce stade dit « de glaucome chronique vrai ». L’acuité visuelle reste inchangée, mais apparaissent des altérations du champ visuel, d’abord localisées à la région paracentrale, autour de la tache aveugle (scotome de Bjerrum), puis s’étendant au champ nasal supérieur ou inférieur. Ces déficits progressent lentement, sans aucun symptôme subjectif le plus souvent, vers le point central. Lorsque ce dernier est atteint, l’acuité visuelle chute brutalement à 1 ou 2/10. Parallèlement, la tension oculaire s’est élevée et dépasse souvent 30 mm Hg. Il apparaît au fond de l’œil une excavation de la papille, avec rejet des vaisseaux contre son bord nasal.

• Le stade terminal est le stade du glaucome absolu, où l’acuité visuelle est nulle, la tension oculaire très élevée. Aucune récupération n’est possible.

Le traitement du glaucome chronique est avant tout médical : myotiques instillés en collyre (pilocarpine et ses dérivés, anticholinestérasiques). On peut associer à ce traitement des inhibiteurs de l’anydrase carbonique (acétazolamide et dérivés) ou des collyres sympathomimétiques dérivés de l’adrénaline qui entraînent une diminution de la sécrétion aqueuse.

Si le traitement médical ne peut enrayer l’évolution des altérations du champ visuel, un traitement chirurgical peut être envisagé. L’intervention consiste à mettre en relation, par l’intermédiaire d’une fente (iridencleisis) ou d’un trou (sclérecto-iridectomie) pratiqué au limbe, au niveau de l’angle irido-cornéen, la chambre antérieure de l’œil et les espaces sous-conjonctivaux, qui ainsi absorbent le trop-plein d’humeur aqueuse. On peut également pratiquer une trabéculotomie : il s’agit d’une nouvelle intervention que l’on pratique sous microscope opératoire et qui consiste à aborder le canal de Schlemm par un volet scléro-limbique, à ouvrir sa paroi externe, puis, à l’aide de trabéculotomes (sorte d’épingles à cheveux), à cathétériser et à effondrer la paroi interne et le trabéculum uvéo-scléral adjacent par un mouvement de rotation du trabéculotome vers le centre de la pupille.


Glaucome aigu

Il s’agit d’une augmentation de pression oculaire brutale et grave. Elle mérite un traitement d’urgence en raison du risque de cécité que la crise comporte.

Le glaucome aigu survient deux fois sur trois chez la femme, surtout après 50 ans. Une forte émotion, un traumatisme, une intervention chirurgicale y prédisposent, ainsi que la conformation anatomique de l’angle irido-cornéen initialement étroit. L’accolement de la racine de l’iris contre le trabéculum, fermant les pores d’évacuation de l’humeur aqueuse, constitue le facteur déterminant.

La crise est parfois précédée de céphalées, de brouillards oculaires, de « halos colorés » autour des lumières ; l’œil est très douloureux. Il devient rouge, la vision baisse à la seule perception de la lumière. À l’examen, la cornée est trouble, terne, la pupille dilatée ; l’œil est dur au palper, la tension oculaire est très élevée, à 60 mm Hg ou plus.

Abandonnée à elle-même, la crise évolue vers la cécité de l’œil atteint. Traitée précocement, elle disparaît en quelques jours, mais elle peut récidiver ou atteindre l’œil congénère.

Le traitement du glaucome aigu est d’abord médical et consiste en l’instillation très fréquente (toutes les heures, y compris la nuit) de pilocarpine. On y associe de l’acétazolamide ou des agents hyperosmotiques (déshydratants). Si la crise ne cède pas, il faut intervenir chirurgicalement. De toute façon, la crise passée, il importe, pour prévenir une récidive, d’opérer cet œil et de pratiquer une iridectomie ou une intervention fistulisante.


Glaucome congénital (buphtalmie ou hydrophtalmie)

Il survient dès les premiers mois ou les premières années de la vie. Il se manifeste au tout début par une augmentation de volume des yeux et notamment des cornées, qui accroissent leur diamètre (mégalocornée). Progressivement, la vue diminue, la cornée se trouble, s’ulcère, les yeux deviennent larmoyants, rouges, photophobes. Abandonné à lui-même, le glaucome congénital évolue vers la cécité.

Le glaucome congénital est dû à la présence au niveau de l’angle iridocornéen d’un reliquat embryonnaire formant membrane (membrane de Barkan) et empêchant l’humeur aqueuse de s’écouler au travers des pores du trabéculum uvéo-scléral.

Le glaucome congénital peut s’associer à d’autres malformations congénitales, oculaires ou générales.