Gand (suite)
L’universalité de la peinture gantoise s’affirma à travers l’œuvre de deux de ses plus grands peintres du xve s. : en premier lieu, Hugo Van der Goes*, doyen de la guilde de Gand de 1474 à 1476, diffusa l’influence flamande en Italie et dans les régions rhénanes. L’Italie du quattrocento reçut et admira son retable des Portinari (Offices, Florence), commandé par l’agent des Médicis en Flandre et qui valut à l’artiste une renommée sans précédent. Le second des grands peintres gantois, Joos Van Wassenhove (v. 1435/1440 - apr. 1480), dit Juste de Gand, triompha à la cour d’Urbino*. Au xve et au xvie s., un vaste atelier de peintres miniaturistes se développe à Gand, en liaison avec Bruges* et parfois avec la cour de Bourgogne*, comme le laisse supposer l’œuvre du Maître de Guillebert de Metz, actif pendant la première moitié du xve s. L’art de ce dernier demeure très proche de celui du Maître du privilège de Gand, connu par son manuscrit du musée de Vienne. Au xve s., Gheraert Horenbaut (v. 1465-1540) procède encore d’Hugo Van der Goes. La famille des Bening, enlumineurs très actifs, travaille à Gand et à Bruges entre 1470 et 1560 ; Simon Bening (1483-1561) exprime un sentiment nouveau de la nature, dont s’inspirera Pieter Bruegel*.
Le xvie s. est l’âge d’or de l’architecture gantoise : un style gothique très fleuri s’y juxtapose aux éléments de la Renaissance, comme on le voit à l’hôtel de ville. Cet édifice aurait dû être le plus important de Belgique sans les luttes religieuses qui interrompirent sa construction au xvie s. La cathédrale Saint-Bavon, dont la construction s’échelonne de 1228 à 1628, illustre plusieurs styles : type français dans les piliers du chœur et du déambulatoire, type brabançon dans ceux de la nef et du transept. Cette constance de la tradition architecturale gantoise, où s’harmonisent des styles divers, apparaît plus encore dans l’église Saint-Michel, commencée en 1440 et achevée au xviie s., dans le petit béguinage Notre-Dame, fondé en 1234 et reconstruit en 1600, et aussi le long des quais, où les pignons ornés du xvie s. voisinent avec la maison romane de l’Étape. Les vestiges de la puissante féodalité gantoise se retrouvent dans le château des comtes, fondé au ixe ou au xe s., ainsi que dans le célèbre beffroi (1313-1321), haut de 91 m, garni de statues d’hommes d’armes et surmonté d’un dragon de cuivre doré. Attenant au beffroi, la halle aux Draps (1426-1441) témoigne de la puissance commerciale européenne des textiles gantois.
La ville ne devait retrouver cette vitalité économique et artistique qu’au xixe s. C’est à Sint-Martens-Latem (Laethem-Saint-Martin), à quelques kilomètres au sud de Gand, que travaillèrent entre 1893 et 1903 deux jeunes artistes gantois : le peintre Valerius de Saedeleer (1867-1941) et le sculpteur Georges Minne (1866-1941). Représentants d’une tendance spiritualiste, ils furent suivis plus tard par un second groupe d’artistes, tous natifs de Gand, qui firent de l’expressionnisme* une source de l’art belge contemporain.
P. H. P.