Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

enfant (suite)

De 6 à 9 ans

Le besoin de se situer dans le monde ambiant domine l’activité consciente, physique et sociale. C’est d’abord l’intérêt pour le nom de famille et pour les relations de parenté (toute instabilité des repères socio-familiaux crée la désorientation et la ruine du sentiment du réel), le goût de la compétition pour « se mesurer » aux autres, le souci de l’intégration dans le groupe de pairs (« être comme les autres enfants ») et dans la famille, avec des rôles repérables. L’âge de raison, à ses débuts, se marque par la tendance à la généralisation abusive des faits d’expérience. De là le danger d’une information sur le monde centrée sur les accidents, les maladies, les dangers de mort. L’école et les premiers apprentissages scolaires (lecture, écriture) ainsi que les relations avec les enfants du même âge souffrent des conséquences d’une infériorité éventuelle : désorientation affective, exclusion sociale ou déficits instrumentaux (dyslexie, dysorthographie, dysgraphie, dyscalculie). Lorsque l’intelligence est libre de toute inhibition affective ou sociale, et d’un niveau normal, les acquisitions se font à un rythme extraordinaire, mais l’imagination perd peu à peu de la richesse qui était sienne à l’âge préscolaire. Pendant ces années, l’enfant est actif et énergique, porté à se valoriser et à se dépasser continuellement. La réflexion se renforce et commence à précéder l’action, il fait preuve de préoccupations morales. Les caractères se différencient, de même que les comportements féminin et masculin. Sur le plan social, la participation au groupe est établie, mais ces groupes n’ont pas de stabilité. Le garçon et la fille normaux de cet âge s’associent à n’importe quel groupe de manière transitoire. Les jeux sociaux montrent le souci de la règle comme impératif transcendant, par rapport auquel ils jugent les autres et évaluent moralement (conforme = bien ; non conforme = mal). C’est dans cette période que le décalage naturel de la maturation entre filles et garçons commence à apparaître, au bénéfice des filles.


De 9 ans à la fin de l’enfance

Cette période est marquée par la participation intensive à des petits groupes clos ayant leurs règles internes, leurs rôles, leurs buts, leurs jeux surtout et leurs antipathies à l’égard d’autres petits groupes. À l’occasion de cette intensification restrictive du lien social se développe une nouvelle conception de la règle socio-morale comme convention du groupe, discutée librement d’abord, mais impérative une fois acceptée. Se développent aussi le sens de la responsabilité et de la justice, les valeurs de loyalisme et de prestige. La seconde sous-période (prépuberté) constitue un nouveau bourgeonnement de la volonté de puissance, de l’initiative et de l’autodétermination. C’est l’âge ingrat, au cours duquel s’accumulent les comparaisons, les contestations, les jugements critiques sur les parents et sur les règles en vigueur dans la famille. Travaillés par les grands bouleversements de la puberté, qui s’approche, les « grands enfants » ne veulent plus être traités en petits, boudent, renâclent et peuvent saboter leurs résultats scolaires.


Les facteurs du développement de l’enfant

Comme on vient de le voir par le schéma du développement normal, l’évolution de la naissance à la fin de l’enfance suit une courbe spécifique ayant ses paliers et sa loi propres. La définition et le repérage des acquisitions caractéristiques de chaque âge ont permis d’établir des tests mentaux chargés de définir l’écart en plus ou en moins par rapport à une norme.

Cependant, le développement normal ne se fait pas dans le vide ni à partir de rien. Le cadre dans lequel il apparaît comporte l’influence de variables majeures : l’hérédité et le milieu.

Le dégagement de leur importance respective a fait l’objet de nombreuses études de la part des psychologues. L’importance de l’hérédité des caractéristiques psychiques dans le destin individuel a été battue en brèche depuis un siècle au bénéfice de l’influence du milieu, qui s’exerce par le biais de l’éducation. Ainsi, à notre époque, on ne croit plus à l’hérédité des maladies mentales : la pathogénie est restreinte à l’influence de la maladie des parents (ou de l’un des deux) sur la qualité de la relation, distordue fréquemment, que ceux-ci établissent avec leur enfant. De la même façon, toute ressemblance de caractère que l’on peut observer entre parents et enfants est maintenant attribuée à l’imitation précoce. La transmission héréditaire des caractéristiques intellectuelles a été longtemps un débat central en psychologie. En effet, il est courant d’observer que le niveau intellectuel des enfants est très proche du niveau intellectuel de leurs parents, et que les niveaux élevés sont plus fréquents parmi les couches sociales ayant un haut niveau économique et culturel.

De nombreuses études, celles de René Zazzo notamment, ont montré que deux jumeaux homozygotes (c’est-à-dire issus du même ovule et du même spermatozoïde, donc ayant un potentiel héréditaire strictement identique) présentent une ressemblance psychique beaucoup plus forte que deux jumeaux hétérozygotes (issus de deux ovules et de deux spermatozoïdes différents, donc ayant des potentiels héréditaires non identiques), ces derniers se ressemblant autant que deux enfants d’une même famille.

Lorsque deux vrais jumeaux sont élevés séparément dans deux milieux socio-économiques différents, leur niveau intellectuel n’est plus identique, la différence étant toujours en la faveur du jumeau qui a grandi dans le milieu socio-économique le plus favorisé. Outre le conditionnement des conduites et des jugements, le milieu socio-culturel agit par ses modèles de comportement, donc par le truchement des conditions éducatives, et son influence est déterminante par le fait même que la relation enfant-milieu structure le moi de l’enfant.


Psychopathologie de l’enfant

Nous ne citerons que les troubles d’origine psychique, en laissant de côté ceux qui ont une cause biologique : génétique (mongolisme), neurologique (épilepsie) ou sensorielle (surdi-mutité) par exemple.

• Les déficiences intellectuelles peuvent être attribuées dans certains cas à une affection organique évidente périnatale, mais le plus souvent c’est une perturbation affective ou une déficience du milieu socio-culturel qui en est la cause (on parle alors de pseudo-débilité).

• Les troubles caractériels s’expriment fort diversement (mensonges, vols, fugues, colères) et traduisent une structuration pathologique de la relation enfant-milieu.