Algonquins ou Algonkins (suite)
À l’est du Wisconsin et autour des Grands Lacs, les Algonquins étaient principalement des chasseurs et des pêcheurs. Répartis autour des rives, disséminés dans les forêts, sans organisation civile hiérarchisée, sans institution militaire, ils habitaient dans des wigwams et se déplaçaient en canoës légers. Ces différents groupes ethniques, vivant isolés les uns des autres sur un immense territoire, n’avaient plus en commun que la langue algonquine et une mythologie très vivante. À l’ouest, de très petits groupes familiaux pratiquaient la chasse et la pêche sur des territoires strictement délimités. Les tribus ne se réunissaient qu’à l’occasion de fêtes saisonnières, au cours desquelles on invoquait les astres, les planètes et les deux créateurs de la mythologie algonquine : Gluskap, la force créatrice, et son frère Malsum, la force antagoniste. Des communications avec les esprits de la déesse s’établissaient soit en rêve, soit par l’intermédiaire des chamans.
Les tribus algonquines payèrent lourdement leur esprit d’indépendance et leur défaut d’organisation militaire. Près des Grands Lacs, les Chippewas (ou Ojibwas) furent contraints, par les Sioux et les Dakotas, d’abandonner leurs domaines, et ce n’est qu’au xviiie s. qu’ils en reprirent possession. Mais, dans les actuels États de Pennsylvanie et de l’Ohio, les Algonquins ne surent jamais repousser les Iroquois. En revanche, sur le littoral, ils tirèrent profit de ce voisinage pour faire face à des agressions renouvelées à l’ouest comme au sud-est. Quelques villages se groupèrent en confédérations, dont la plus célèbre fut celle de Powhatan (auj. en Virginie). Ces confédérations, qui accueillirent d’abord favorablement les Français et les Anglais, se lièrent avec les Iroquois. Par la suite, elles devaient être sauvagement décimées par les Américains. Les rescapés moururent en déportation. Les Iroquois empruntèrent aux Algonquins, dont ils avaient conquis le territoire, les traits principaux de leur mythologie et l’art de la fabrication des wampums.
Les Chippewas et les Crees s’appliquaient à décorer leurs vêtements de broderies aux couleurs vives. L’écorce de bouleau était utilisée pour façonner des coffres peints ; autour des Grands Lacs, tout particulièrement, ces coffres étaient recouverts de piquants de porc-épic violemment teintés et disposés en motifs géométriques. Ces motifs n’ont jamais eu le sens d’un message, à la différence de ceux qui s’élaborèrent sur des ceintures, à partir de coquillages importés de la côte orientale. C’est sur la côte même que les Algonquins taillaient dans l’épaisseur de la coquille de buccin des pièces allongées, qu’ils travaillaient jusqu’à l’obtention de perles tubulaires, ou wampums. Les perles blanches et les perles rouges, plus précieuses encore, étaient achetées par les chefs de tribu et confiées à un initié pour être assemblées sur des ceintures de fibres végétales. Mythe, récit de bataille, traité conclu avec une autre tribu, chacun de ces sujets était traduit en une théorie de motifs géométriques s’enchaînant entre eux. L’introduction des outils de métal favorisa la production en nombre des ceintures de wampums, qui perdirent leur caractère cérémoniel et leur valeur de message. Ces ceintures servirent de monnaie, puis de parures ; les wampums furent remplacés par des perles de fabrication européenne.
La christianisation des Algonquins de l’Est se poursuivit ; ceux-ci furent, cependant, presque tous exterminés. Par contre, les tribus des Grands Lacs, les Chippewas, les Menominees, résidant sur des terres pauvres, ont réussi à maintenir quelques-unes de leurs activités traditionnelles dans les réserves.
V. B.
➙ Indiens d’Amérique.