Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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chromosome (suite)

Dans ces espèces, et dans l’espèce humaine en particulier, c’est le mâle qui est responsable de la détermination du sexe de la progéniture. En effet, le mâle produit deux types de gamètes, l’un porteur du chromosome X, l’autre porteur du chromosome Y, et c’est en fonction de la nature du spermatozoïde fécondant que sera déterminé le sexe de l’enfant. Il est clair, en effet, qu’un individu femelle ne peut produire qu’un seul type de gamètes, tous porteurs du chromosome X. Si le spermatozoïde fécondant est porteur d’un chromosome X, le produit sera du sexe féminin ; s’il est porteur d’un chromosome Y, le produit sera du sexe masculin.

Dans certaines espèces, en particulier chez les Oiseaux, c’est le sexe femelle qui est hétérogamétique.

Le fait que dans l’espèce humaine, par exemple, l’homme est porteur d’un seul chromosome X et la femme de deux chromosomes X est extrêmement troublant, si l’on songe que dans les deux sexes l’activité métabolique des gènes portés par le chromosome X est identique. Par exemple, les cellules sanguines produisent dans les deux sexes la même quantité de facteurs antihémophiliques (on sait que les deux gènes responsables de la synthèse des facteurs antihémophiliques sont portés par les chromosomes X). L’explication de ce phénomène est fournie par le fait qu’un seul chromosome X est actif durant l’interphase cellulaire, et que tout chromosome X surnuméraire est inactivé (hétérochromatine) et prend la forme du corpuscule de Barr, situé à la périphérie du noyau.

Du point de vue de l’évolution des espèces, l’apparition de deux chromosomes sexuels différents morphologiquement est un phénomène extrêmement intéressant. Il semble que ce dimorphisme chromosomique soit une garantie essentielle pour la conservation du dimorphisme sexuel. Certains auteurs pensent que, à l’origine des espèces, les deux chromosomes sexuels étaient identiques. Puis, au cours de l’évolution, l’un d’eux, le chromosome Y, s’est « débarrassé » de tous les gènes non spécifiquement « sexuels » pour devenir le vecteur des caractères mâles (dans les espèces où le sexe mâle est hétérogamétique). Le chromosome X porte, en revanche, un grand nombre de gènes ayant un caractère purement somatique, tels que les gènes de la coagulation, de la vision colorée, de la glucose-6-phosphate-déshydrogénase, etc. Et il semble bien que, dans de nombreuses espèces, supérieures du moins, l’X porte ces mêmes gènes.

Une autre remarque d’intérêt est que, dans l’espèce humaine, le chromosome Y présente de grandes variations de taille, non seulement entre individus, mais également d’une race à l’autre. Chez les Sémites et les Japonais, il est particulièrement long.


La morphologie des chromosomes

Les chromosomes ont essentiellement une structure en forme de bâtonnet, mais on peut leur reconnaître plusieurs « accidents » de structure. Il existe toujours une constriction principale, que l’on appelle « centromère ». Dans de très nombreux cas, on observe des constrictions secondaires, mais celles-ci sont inconstantes. La place du centromère permet de distinguer deux bras, le bras long et le bras court. Lorsque le centromère est distal, le chromosome est dit « acrocentrique » ou « subacrocentrique » ; lorsque le centromère est médian, le chromosome est dit « médiocentrique ». Dans certains cas, le centromère a une position extrêmement distale, le bras court étant alors réduit à un court segment. Dans de nombreuses espèces, chez l’Homme en particulier, certains chromosomes sont caractérisés par la présence de satellites ; ce sont des segments chromosomiques de petite taille reliés au corps du chromosome par une constriction importante réduisant le chromosome à un simple filament.


Nombres de chromosomes

Les nombres chromosomiques sont extrêmement variables d’une espèce à une autre, mais il semble bien que, pour la majorité des espèces, ou du moins pour toutes les espèces ayant la même importance évolutive, la quantité totale de matériel chromosomique soit la même ; en d’autres termes, c’est le découpage en chromosomes qui varie. De même, la morphologie des chromosomes varie considérablement. Beaucoup d’espèces sont caractérisées, par exemple, par la présence de chromosomes uniquement acrocentriques.

Les nombres chromosomiques ont certainement joué un grand rôle dans l’évolution des espèces. C’est ainsi que des espèces voisines ont souvent des chromosomes ayant une grande similitude entre eux.

Les nombres chromosomiques n’ont généralement pas de relation avec le degré d’évolution de l’espèce. Voici quelques exemples de nombres chromosomiques :
— Primates : Marmouset commun, 46 ; Marmouset pygmée, 44 ; Cercopithèque, 60 ; Chimpanzé, 48 ; Gibon, 52 ; Gorille, 48 ; Homme, 46.
— Artiodactyles : Porc domestique, 38 ; Sanglier, 36 ; Vigogne, 74 ; Cerf, 68 ; Bovins, 60 ; Mouton domestique, 54. (Dans toutes ces espèces, la majorité des chromosomes sont acrocentriques.)
— Périssodactyles : Cheval sauvage de Mongolie, 66 ; Zèbre, 32 ; Cheval domestique, 64 ; Âne, 62 ; Mulet, 63.
— Carnivores : Chien, 78 ; Coyote, 78 ; Ours noir, 74 ; Ragon, 38 ; Skunks, 50 ; Furet, 40 ; Chat domestique, 38 ; Ocelot, 36.
— Rongeurs : Écureuil, 46 ; Hamster chinois, 22 ; Hamster doré, 44 ; Souris, 40 ; Rat, 42 ; Chinchilla, 64.


Les anomalies chromosomiques

Le matériel chromosomique est fragile, et on connaît chez de nombreuses espèces des individus ayant des anomalies du nombre ou de la structure des chromosomes.

Les anomalies peuvent être de deux ordres : numériques ou structurales.

• Les anomalies numériques peuvent porter sur des lots entiers de chromosomes. Chez l’individu normal, les cellules somatiques contiennent 2N chromosomes, c’est-à-dire un nombre diploïde de chromosomes. Les cellules reproductrices, ou gamètes, contiennent la moitié de ce nombre de chromosomes, c’est-à-dire le nombre haploïde. La polyploïdie est caractérisée par l’augmentation du nombre de lots haploïdes, et on pourra voir des organismes triploïdes, tétraploïdes, etc.

Si l’anomalie porte sur un seul chromosome, on parlera de monosomie en cas de perte d’un chromosome et de trisomie en cas d’acquisition d’un chromosome surnuméraire.