Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

chromosome (suite)

• Les aberrations de structure sont la conséquence de cassures chromosomiques suivies de recollement. On admet, sans que la chose soit absolument démontrée, que, pour qu’un chromosome demeure viable, il doit comporter son extrémité, ou télomère. Toute perte ou délétion de chromosome est donc la conséquence d’une double cassure chromosomique suivie par une perte du fragment intermédiaire et recollement du télomère. On peut voir également la formation de chromosomes en anneaux par perte des deux télomères et recollement des deux extrémités rompues. Lorsque les cassures intéressent deux chromosomes, on assiste à la formation de néo-chromosomes, remaniés par « translocation », par transfert d’un fragment de chromosome sur un autre.

Ces aberrations chromosomiques surviennent pendant la méiose, c’est-à-dire pendant la formation des gamètes. Il est certain que la majorité des aberrations doit être spontanée, mais on connaît de nombreux facteurs qui augmentent la fréquence d’apparition des aberrations chromosomiques : ce sont, en particulier, les rayonnements, qui provoquent des cassures chromosomiques. On connaît également certains virus susceptibles de provoquer des cassures, par exemple le virus SV 40. On connaît aussi des substances chimiques responsables de cassures chromosomiques : c’est le cas de tous les antibiotiques antitumoraux.


Le caryotype humain

La définition du seul nombre chromosomique de notre espèce a donné lieu à de très nombreux travaux, qu’il serait fastidieux d’énumérer. Les estimations ont longtemps varié selon les auteurs. Ce n’est qu’en 1956 que J. H. Tjio et Albert Levan, dans leur étude sur les chromosomes humains en culture de tissu, établirent le nombre chromosomique de l’Homme une fois pour toutes : 2N = 46.

Peu après la publication de J. H. Tjio et A. Levan, Charles Ford et John Hammerton reprirent l’étude des chromosomes des spermatocytes humains en utilisant une nouvelle technique de séparation des cellules par dilacération des tubules et écrasement de la préparation après fixation. Ces auteurs conclurent que le nombre diploïde normal est bien de 46, et que dans les préparations méiotiques on retrouvait bien 23 bivalents (v. méiose).

Les chromosomes peuvent être appariés et classés en fonction de leur taille et de la place du centromère. Ils sont numérotés de 1 à 22 et répartis en 7 groupes de A à G. Les chromosomes sexuels X et Y sont classés à part. Les conventions de Denver (1960) et de Chicago (1966) ont défini la nomenclature internationale du caryotype humain. On symbolise ce dernier en inscrivant le nombre total des chromosomes, une virgule, les chromosomes sexuels, une virgule, les anomalies autosomiques. Ainsi : 46,XY correspond au caryotype d’un homme normal ; 46,XX, à celui d’une femme normale ; 47,XY,21+, à celui d’un garçon trisomique 21 (c’est-à-dire atteint de mongolisme) ; 45,X, à celui d’un syndrome de Turner.


Mode d’étude du caryotype humain

On étudie le caryotype humain essentiellement à partir de deux types de cellules : les cellules sanguines et les fibroblastes.

Les lymphocytes du sang sont des cellules qui ne se divisent normalement pas in vivo. On peut cependant obtenir leur division in vitro par certaines stimulations antigéniques, par exemple au moyen d’un extrait du Haricot, la phytohémagglutinine. Ce produit est responsable de la division des lymphocytes lorsque ceux-ci sont mis en culture dans un milieu convenable. Pratiquement, il suffit de prélever quelques gouttes de sang à un individu, de mettre ce sang dans quelques millilitres de milieu de culture et, après avoir ajouté de la phytohémagglutinine, on place ce milieu dans l’étuve à 37 °C. Au terme de 3 jours, on bloque la culture par de la colchicine, qui interrompt les divisions cellulaires au stade de la pro-phase-métaphase, puis on soumet les cellules à un choc hypotonique qui a pour but de disperser les chromosomes ; on les fixe et on les colore sur une lame. Il suffit alors d’examiner les figures de division cellulaire au microscope, de photographier ces métaphases et d’établir le caryotype en découpant les chromosomes sur la photographie.

On peut également mettre en culture des fragments de tissu ou d’aponévrose. Dans ce cas, on obtient une culture de fibroblastes, et, au bout de 15 jours environ, on peut traiter ces fibroblastes exactement comme les cellules sanguines. Cette technique a l’avantage de compléter l’examen sanguin si l’on soupçonne chez un individu la possibilité d’une mosaïque chromosomique.


Aberrations chromosomiques chez l’Homme


Mécanismes des aberrations

Les aberrations chromosomiques observées chez l’Homme peuvent survenir soit durant l’une ou l’autre des méioses, maternelle ou paternelle, ayant donné naissance aux gamètes dont l’individu est issu, soit lors de l’une des toutes premières divisions du zygote, c’est-à-dire de l’œuf fécondé.

• Aberrations méiotiques (au cours des méioses). On sait que la méiose normale a pour objet de fabriquer des gamètes, c’est-à-dire des cellules porteuses de 23 chromosomes, à partir de cellules diploïdes normales à 46 chromosomes. La méiose se produit soit dans l’ovaire, soit dans le testicule et aboutit à la formation de l’ovule et du spermatozoïde. Les aberrations pouvant se produire durant cette méiose sont de deux types : elles peuvent être de nombre ou de structure.

Les aberrations numériques correspondent essentiellement à une non-disjonction chromosomique lors de la méiose, et aboutissent à la formation d’un gamète porteur des deux chromosomes d’une paire ou de zéro chromosome d’une paire, au lieu d’un. La fécondation d’un tel gamète anormal par un gamète normal aboutira par nécessité à un zygote trisomique ou monosomique pour le chromosome donné.

Les aberrations de structure sont le résultat de cassures chromosomiques ; elles aboutissent essentiellement à des délétions, c’est-à-dire à des pertes de fragments chromosomiques ; à la formation de chromosomes en anneau ; à la formation de translocations, que nous avons déjà définies plus haut.

Le risque génétique d’avoir un enfant malformé lorsque l’on est porteur d’une translocation équilibrée est de l’ordre de 10 à 20 p. 100. Ce risque semble du reste être plus faible si c’est l’homme qui est porteur d’une translocation que si c’est la femme.