Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cassini

Famille d’astronomes et de géodésiens français d’origine italienne.



Jean Dominique, dit Cassini Ier

(Perinaldo, comté de Nice, 1625 - Paris 1712). Il professe tout d’abord l’astronomie à l’université de Bologne pendant dix-huit ans. Élu membre de l’Académie des sciences au début de l’année 1669, il obtient, grâce à Colbert, sur les conseils de l’abbé Jean Picard (1620-1682), l’autorisation de se fixer à Paris. Logé à l’Observatoire royal, qui vient d’être créé, il reçoit de Louis XIV, en 1673, des lettres de « grande naturalisation » et devient rapidement le savant le plus actif de sa seconde patrie. Ses premières recherches portent sur l’étude de la marche des comètes. Puis il perfectionne les tables du Soleil qu’il avait déjà établies en 1653-1655 à Bologne et calcule de nouvelles tables ; celles-ci lui permettent, en 1679, de présenter une réforme du calendrier qui aurait été plus précise que la réforme grégorienne, adoptée en 1582. En 1666-1699, il étudie le mouvement complexe de rotation de la Lune autour de son axe et s’attaque à l’étude systématique des planètes et de leurs satellites, en particulier de Jupiter et de Saturne. Il constate que la première présente un aplatissement sensible aux pôles et découvre que Saturne est entourée de deux anneaux (division de Cassini) et possède quatre satellites, dont il détermine les orbites. Enfin, avec Philippe de La Hire (1640-1718), il participe aux premières mesures géodésiques sur la méridienne de France.


Jacques, dit Cassini II

(Paris 1677 - Thury, Beauvaisis, 1756). Fils du précédent, il est élu à l’Académie des sciences en 1699 et succède à son père à la direction de l’Observatoire de Paris. En 1740, il publie des Éléments d’astronomie. Mais il se rend surtout célèbre par ses mesures géodésiques sur la méridienne de France, dont il donne les conclusions dans son Traité de la grandeur et de la figure de la Terre (1720). Il conclut à une forme allongée suivant la ligne des pôles, contrairement aux prévisions que l’on pouvait tirer de la théorie de l’attraction universelle de Newton et contrairement aussi aux observations de la planète Jupiter faites par son père quelques années plus tôt. C’est pour lever cette incertitude que Louis XV, en 1735, sur les conseils de Jean-Baptiste Bourguignon d’Anville (1697-1782), premier géographe du Roi, décide d’organiser deux mesures d’arc de méridien, l’une aussi près que possible du pôle, l’autre aussi près que possible de l’équateur. Ces deux mesures historiques, dont la seconde fut beaucoup plus difficile que la première, permettent, en 1749, d’affirmer l’aplatissement de la Terre aux pôles. Mais, dès 1739, Cassini II fait reprendre les mesures de la méridienne de France entre Paris et Perpignan. Les résultats obtenus, qui seront confirmés par la mesure de l’arc de méridien à l’équateur, dont les chiffres ne seront publiés que dix ans plus tard, concluent à un aplatissement aux pôles : la dimension et la forme d’ensemble ont des caractéristiques voisines de celles qui sont adoptées de nos jours.


César François, dit Cassini de Thury ou Cassini III

(Thury 1714 - Paris 1784). Fils du précédent, il succède à son père à la direction de l’Observatoire de Paris et devient membre de l’Académie des sciences en 1735. Il est d’abord associé avec l’abbé Nicolas Louis de La Caille (1713-1762) aux travaux de révision de la méridienne de France. Lors de la campagne de Fontenoy, il lève la carte des pays occupés et présente en 1747 son travail au roi, qui le charge d’établir à l’échelle d’une ligne pour 100 toises (1/86 400) la carte du royaume. Cette entreprise ne sera terminée qu’en 1789. La carte de France ainsi dressée, dite « carte de Cassini », servira de modèle à la carte au 1/80 000, dite « carte de l’état-major », partiellement en service de nos jours.


Dominique, comte de Cassini, dit Cassini IV

(Paris 1748 - Thury-sous-Clermont 1845). Fils du précédent, il continue l’œuvre de son père. Il est appelé à la direction de l’Observatoire de Paris et est élu à l’Académie des sciences (1770).

P. T.

Castelnau (Édouard de Curières de)

Général français (Saint-Affrique 1851 - Montastruc-la-Conseillère 1944).


Mangin l’avait surnommé le « vieux gentilhomme », d’autres le « capucin botté ». Il possédait en effet une foi religieuse profonde et ne s’en cachait pas plus qu’il n’atténuait à certaines heures son langage viril de soldat. S’il représente parfaitement l’officier français d’avant 1914, il est aussi le seul des commandants d’armées du début de la campagne qui ait terminé la guerre au front avec des responsabilités plus importantes encore.

Aveyronnais taillé en vigueur, remarquablement équilibré dans sa santé et son intelligence, persuadé que lorsqu’on fait ce qu’on peut on fait ce qu’on doit, il commande déjà comme jeune saint-cyrien en 1871 une compagnie à l’armée de la Loire. Lorsque, promu général (1906), il quitte son cher 37e d’infanterie, qu’il a marqué de son empreinte, une foule compacte envahit la gare de Nancy pour lui faire ses adieux. Distingué par Joffre, le silencieux commandant du 2e corps à Amiens, alors qu’il commande lui-même la 7e brigade à Soissons, Castelnau est appelé à Paris en juin 1911 par le futur généralissime pour devenir son major général. C’est lui qui dirige excellemment la préparation de la mobilisation générale, avant de partir en guerre en 1914 à la tête de la IIe armée, en même temps que six de ses huit fils (trois seront tués). Battu initialement à Morhange (18-20 août), il sauvera Nancy quelques jours plus tard au Grand-Couronné (5-12 sept.) grâce aux brillantes dispositions tactiques prises contre le flanc droit des Bavarois, qui se précipitèrent inconsidérément dans la trouée de Charmes. Transportée ensuite en Picardie, la IIe armée attaque, est bloquée, mais s’accroche au sol entre l’Oise et Albert. Placé par Joffre, en juin 1915, à la tête du groupe d’armées du Centre, Castelnau prépare méthodiquement la grande offensive du 25 septembre en Champagne, qui échoue devant la seconde position allemande, mal identifiée, bien qu’en certains secteurs on ait été à deux doigts de la rupture du front. En décembre, Castelnau, nommé adjoint de Joffre, apporte à un G.Q.G. assez guindé et satisfait de lui-même non seulement beaucoup de clairvoyance, mais un peu de jovialité. Après une mission à Salonique, c’est lui qui, délégué par Joffre à Verdun, prendra, dès le 25 février 1916, la décision capitale de confier à Pétain le commandement sur les deux rives de la Meuse. À l’arrivée de Nivelle au G.Q.G. (déc.), il prend le commandement du groupe d’armées de l’Est, qu’il abandonne quelques semaines en janvier 1917 pour accompagner Doumergue à Petrograd, où la révolution gronde. En 1918, son groupe d’armées est peu touché par les opérations, mais Clemenceau, dont les opinions philosophiques sont à l’opposé des siennes, l’a pris en amitié et n’hésite pas à l’inviter à sa table. L’armistice du 11 novembre prévient le déclenchement de l’offensive minutieusement préparée par Castelnau sur Metz et qui, coupant infailliblement aux Allemands leur ligne de retraite, les eût contraints à capituler en rase campagne. Frustré de sa victoire, il l’est aussi du bâton de maréchal, que beaucoup espéraient pour lui.