Caspienne (mer) (suite)
Les caractères hydrologiques de la Caspienne sont très originaux : les fonds sont azoïques, mais les eaux superficielles renferment une faune assez riche (la Caspienne est par excellence la mer de l’esturgeon) ; les taux de salinité varient de 10 à 20 p. 1 000. Le bassin sud est exempt de gel, tandis que le bassin nord peut être pris par les glaces durant plus de trois mois. L’empire russe, puis l’Union soviétique ont favorisé le développement de nombreuses activités maritimes.
La pêche fournissait un demi-million de tonnes, soit les deux tiers des prises de toutes les mers de Russie au début de ce siècle ; toutefois, ce chiffre est tombé à moins de 200 000 t après 1960. Le trafic consiste en une activité de cabotage et en un trafic à grandes distances, composé pour la moitié d’hydrocarbures des champs de Bakou. Ce dernier port et Astrakhan effectuent un trafic de l’ordre de 10 Mt chacun. Les tankers de moyen tonnage remontent la Volga ou passent dans la mer Noire par le canal Volga-Don. Au total, 40 à 50 Mt de marchandises sont annuellement transportées sur la Caspienne, ce qui représente le cinquième ou le quart du trafic maritime total de l’U. R. S. S.
Mais l’assèchement — par conséquent la réduction de la superficie — de cette mer fermée s’accélère depuis quelques décennies. On évalue à 6 m la différence de niveau des eaux dans le bassin nord entre 1800 et 1950 ; depuis 1930, cette différence est de plus de 2 m. Ainsi, des golfes sont colmatés et les ports s’envasent et perdent leur importance ; il faut construire des avant-ports. Ce comblement rapide est causé avant tout par la construction des barrages-réservoirs de la Volga : une partie des eaux qui s’écoulaient vers le sud est utilisée en vue du ravitaillement des villes ou des industries, ou pour les besoins de l’irrigation.
Plusieurs plans ont été proposés en vue de restituer à la Caspienne le volume d’eau qui lui est ainsi soustrait. Le plan Davidov envisageait le détournement des eaux des fleuves sibériens se dirigeant vers l’Arctique (Ob et Ienisseï) vers une vaste mer intérieure, dite « mer sibérienne », dont une partie aurait été acheminée vers la Caspienne. Ce plan ne fut jamais appliqué. Actuellement, on s’oriente vers une autre solution : détourner les eaux des fleuves de Russie se dirigeant vers le nord (Petchora et Vytchegda) en direction de la Volga, qui restituerait ainsi le volume d’eau soustrait ; c’est l’objet du plan Apollov. Mais on a constaté qu’outre les inconvénients graves, pour les régions de la Kama, résultant de la construction de trop vastes barrages (submersion de bonnes terres) ce projet ne permettrait même pas de stabiliser le niveau de la Caspienne, qui continuera à baisser. Un troisième projet visait à retenir les eaux du bassin septentrional par des digues percées d’écluses, mais le séparant du bassin méridional (Guidroprojekt, « projet hydraulique ») ; cependant la mégalomanie de ce plan ne permettra pas techniquement et financièrement de le réaliser. On vient de proposer une autre solution : relier la mer d’Azov à la Caspienne par un canal géant empruntant la dépression Kouma-Manytch, utilisant les 26 m de différence de niveau entre les deux mers et permettant un apport considérable des eaux de la mer Noire (laquelle reçoit plus d’eau des fleuves ukrainiens qu’elle n’en perd) en direction du bassin nord de la Caspienne ; ce canal, qui serait utilisé pour la navigation, aurait une largeur de 400 m et une profondeur de 10 m. La multiplicité de projets gigantesques qui ne seront peut-être jamais complètement réalisés montre l’intérêt que les scientifiques et les économistes attachent au maintien des activités actuelles liées à la présence de cette vaste mer intérieure au milieu de régions en voie de développement. Mais les grands travaux entrepris dans le domaine de l’irrigation ainsi que les succès remportés dans la recherche de ressources minérales constituent aussi d’autres facteurs de croissance.
A. B.