Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

byzantin (Empire) (suite)

Les Arabes

Deux décennies de troubles intérieurs à Byzance avaient ranimé leurs ambitions : en 717, ils se présentent de nouveau sous les murailles de la ville, mais elle est âprement défendue par Léon III. Le feu grégeois, la peste, la famine et l’intervention des Bulgares obligent les assaillants à lever le blocus dans l’été de 718. Ils n’en continuent pas moins leurs raids annuels en Asie Mineure, mais la grande défaite qu’ils essuient à Akroïnon, près d’Amorion, en 740, les contraint à évacuer la partie occidentale de l’Anatolie. Leur puissance est de surcroît ébranlée par une grave crise intérieure : au terme d’une longue guerre civile, la dynastie des ‘Abbāssides supplante celle des Omeyyades.

Les Byzantins en profitent pour reprendre l’offensive : en 746, Constantin V pénètre en Syrie septentrionale, et, l’année suivante, une flotte arabe est anéantie près de Chypre ; en 752, l’empereur remporte de nouveaux triomphes en Arménie et en Mésopotamie. Mais les querelles religieuses et politiques qui secouent Byzance amènent un revirement : en 781, les Arabes victorieux imposent aux Grecs un traité de paix humiliant qui ne leur vaut d’ailleurs qu’un répit de courte durée. L’empereur Nicéphore Ier ose interrompre le versement du tribut, mais, en 806, Hārūn al-Rachīd l’amène à composition : Byzance, vaincue, sollicite la paix et reprend le versement du tribut.

En 822, les Arabes apportent une aide efficace au général rebelle Thomas, qui assiège Constantinople durant plus d’un an. Quelques années plus tard, la Crète est enlevée par des corsaires musulmans ; elle sera durant 150 ans la base d’opérations des pirates arabes de l’Égée. Ils prennent pied en Sicile en 827, et la conquête de l’île leur est facilitée par les dissensions entre gouverneurs locaux et l’absence d’une puissante flotte de guerre byzantine. Au centre de l’Asie Mineure, l’Empire affronte le calife Mu‘taṣim, qui s’empare d’Ancyre et d’Amorion en 838 : Byzance atterrée fait appel à l’Occident, mais n’en reçoit que des promesses.


Les Bulgares

Depuis leur installation dans la péninsule balkanique, les Bulgares entretenaient des relations pacifiques avec les Grecs : ils avaient aidé Justinien II à reprendre le pouvoir en 705 et lutté contre les Arabes en 718. Mais les Bulgares prennent prétexte de la fortification de la frontière par les Byzantins pour déclencher la guerre en 755. Constantin V les bat sur le littoral de la mer Noire en 762 et, jusqu’à sa mort, organise contre eux plusieurs expéditions, en général heureuses, mais les Grecs sont vaincus à leur tour en 792 et obligés de payer tribut.

L’empereur Nicéphore reprend la lutte, mais son armée est anéantie en 811 dans les Balkans, et lui-même est tué. Le khān Krum se rue sur la Thrace, dont il déporte les populations au-delà du Danube, et assiège Constantinople en 813. Son successeur, Omurtag, conclut avec Byzance une paix de trente ans qui sera rompue par le khān Malamir en 831.


La querelle iconoclaste

Durant plus d’un siècle, le monde byzantin fut bouleversé par la querelle des images. Le mouvement iconoclaste se présente comme une réaction contre le culte jugé superstitieux rendu aux représentations des saints. Le conflit divisa l’Empire : les provinces orientales se déclarèrent iconoclastes et les provinces occidentales iconodoules. Au sein de la société, les images trouvèrent dans les moines des défenseurs fanatiques.

Léon III publie le premier édit contre les images en 726 et ordonne d’enlever à Constantinople une célèbre icône du Christ. Cette première mesure déclenche une émeute dans la capitale et une insurrection en Grèce. Mais l’empereur fait approuver son édit par une assemblée de hauts dignitaires civils et ecclésiastiques en 730 ; le patriarche Germain, récalcitrant, est déposé, et la destruction des images commence. Rome s’émeut et anathématise les iconoclastes. Léon III riposte en soustrayant à la juridiction papale la Calabre, la Sicile et l’Illyricum.

Constantin V mène la lutte avec encore plus de vigueur que son père. Il se livre à une active propagande et un concile, dont les 338 membres sont tous ses créatures, sanctionne la doctrine officielle en 754 : la représentation des saints est interdite et la vénération de leurs images prohibée. L’empereur s’emploie à appliquer ces décisions : on badigeonne les icônes, on disperse les reliques et on leur substitue des peintures profanes à sujet végétal et animal, surtout des décorations à la gloire de l’empereur. Le fanatisme de Constantin V ne recule pas devant le meurtre : plusieurs hauts fonctionnaires sont exécutés en 766, et l’abbé du mont Saint-Auxence, Étienne, est mis en pièces par une foule furieuse en 765. De son hostilité, les moines sont les principales victimes : des monastères sont sécularisés, leurs propriétés confisquées, des moines et des religieuses sommés de se marier. L’intransigeance impériale va jusqu’à interdire le culte de la Vierge et des saints.

L’impératrice Irène, fervente iconodoule, prépare habilement la restauration du culte des images, qu’elle fait sanctionner par un concile à Nicée en 787 : l’iconoclasme est condamné comme hérésie et la vénération des icônes rétablie. Les moines recouvrent du même coup leurs privilèges et leurs énormes richesses.

La querelle se rallume sous Léon V : les iconodoules intransigeants sont malmenés et prennent la route de l’exil. En 815, un concile iconoclaste réuni à Sainte-Sophie rejette les décisions du concile de Nicée et ordonne la destruction des images. Avec Michel II, le mouvement iconoclaste connaît une accalmie, mais la restauration des images n’est pas rétablie. Théophile leur livre un dernier combat : une violente persécution se déchaîne contre les iconodoules et notamment contre les moines, mais le mouvement ne lui survécut pas. Le 11 mars 843, un synode réuni à Sainte-Sophie rétablit solennellement et définitivement le culte des images.