Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Buenos Aires (suite)

Buenos Aires est le centre des activités tertiaires du pays. Ainsi, dans le Grand Buenos Aires, le secteur tertiaire occupe un peu plus de 60 p. 100 des actifs. Buenos Aires est le centre unique des grandes banques de l’Argentine, le lieu d’implantation de tous les sièges sociaux des grandes entreprises commerciales, la grande capitale intellectuelle, culturelle et artistique. C’est, en outre, le lieu où s’effectue l’essentiel de la production industrielle du pays.

Le Grand Buenos Aires groupe environ 45 p. 100 des établissements industriels du pays et fournit plus de 50 p. 100 de l’ensemble des emplois secondaires. C’est là que se concentrent 65 p. 100 des investissements industriels. Plus de 800 000 ouvriers travaillent ainsi dans les grandes usines de fabrication automobile (dont les noms évoquent l’origine des capitaux : Ford, Chevrolet, Peugeot, Citroën), dans des filatures et tissages (souvent aussi propriétés étrangères), dans les industries chimiques et mécaniques (dominées toujours par les capitaux étrangers). D’autres activités industrielles sont liées à la valorisation des produits des activités agro-pastorales de la Pampa : frigorifiques géants pour la viande, minoteries, huileries, industries du cuir, etc.

Très grande ville, Buenos Aires est un vaste centre de consommation de produits agricoles ; cet aspect de la capitale a entraîné, dans une couronne plus ou moins large autour de la ville, la transformation de l’agriculture pampéenne : on y pratique une polyculture intensive destinée à la consommation urbaine. Mais la capitale elle-même représente un vaste espace de plus de 3 000 km2, destiné à abriter ses habitants et l’ensemble des activités industrielles et tertiaires.


Le Grand Buenos Aires et ses problèmes

Si la situation de Buenos Aires a été à la source de son prodigieux essor, par contre le site lui-même ne présente pas de conditions bien favorables à l’organisation de l’espace urbain et à la construction d’une grande ville.

Au cœur de cette immense plaine de la Pampa, où il est difficile de cerner des reliefs bien précis, le site se présente comme une petite terrasse sur le bord d’une rivière, près du Río de la Plata. Deux conséquences peu propices à l’édification d’une ville découlent des particularités de ce site : d’une part, Buenos Aires est victime de ces grands vents qui affectent fréquemment les étendues plates de la Pampa ; d’autre part elle est menacée d’inondations. En outre, les environs immédiats du site primitif, occupés au fur et à mesure de la croissance de la ville, font partie d’une zone de marécages qu’il a fallu drainer et parfois contourner dans le cas des bas-fonds les plus humides. Ainsi Buenos Aires s’est développé à partir d’un site bien médiocre et parfois difficile à utiliser.

La vieille ville espagnole avec son plan quadrillé et ses places, telle la Plaza de Mayo, est devenue le centre des affaires et constitue le cœur de Buenos Aires, offrant le spectacle de ses petites rues étroites et animées, mais aussi, maintenant, celui des deux grands axes qui ont été percés en diagonale à travers la vieille ville pour assurer une circulation plus aisée et permettre la liaison entre le centre des affaires et les autres quartiers. Ce quartier des affaires est truffé d’immeubles élevés, et se vide progressivement de ses habitants au profit des activités de bureau, évolution analogue à celle de la plupart des centres des très grandes villes.

Autour de ce vieux noyau, l’espace urbain se distribue en plusieurs unités. Au nord, s’étend la zone des grands immeubles de luxe, construits récemment ; cette zone assure la transition entre la vieille ville et les banlieues riches, également situées au nord de la ville proprement dite. Au sud, au contraire, s’étend une zone d’habitat dégradé, où subsiste un artisanat de petits métiers. Ces quartiers du sud précèdent les banlieues industrielles et ouvrières, trop souvent encombrées de bidonvilles, qui témoignent de la faiblesse du niveau de vie des ouvriers, et peut-être plus encore de l’importance des sans-travail. Dans les quartiers ouest, enfin, pullulent des villas individuelles, plus ou moins modernes, qui constituent un habitat de transition entre le nord, consacré à l’aristocratie, et le sud, ouvrier. C’est une zone charnière entre la ville et une série d’anciens villages qui se transforment en banlieues au fur et à mesure que Buenos Aires se développe, empiétant chaque jour davantage sur l’espace agricole de ce bord atlantique de la Pampa.

Buenos Aires offre donc le paysage d’une ville où l’espace proprement urbain, déjà vaste, est prolongé par une série de tentacules au long des lignes de chemin de fer et des routes. Ces tentacules s’allongent tout au long de la rive du Río de la Plata et s’étirent en quatre branches vers l’ouest, à l’intérieur de la plaine, prolongeant sur 10 ou 15 km, voire même 20 à 25 km, l’espace urbain par un espace suburbain relativement continu, hormis les quelques zones non bâties que représentent les marécages trop humides pour être drainés.

Deux problèmes particulièrement aigus se posent à ceux qui tentent d’aménager l’espace urbain. C’est d’abord le problème de la crise du logement, née du déséquilibre entre les offres de logement et les possibilités financières d’une grande fraction de la population au niveau de vie extrêmement bas. Les lotissements précaires où manquent l’eau, l’électricité et les installations sanitaires se sont multipliés.

À côté de ce problème du logement des pauvres, se pose, aux urbanistes, celui de la circulation des riches. En effet, l’adaptation du plan de Buenos Aires et l’aménagement de grandes artères sont restés bien en deçà de la trop rapide croissance des zones résidentielles et se montrent tout à fait inadéquats devant la multiplication des moyens de transport individuels.

Par ailleurs, l’agencement du réseau de chemin de fer, profondément inséré au cœur même du tissu urbain, rend plus complexe encore le problème de la circulation dans la ville, fréquemment coupée par les lignes de chemin de fer, aboutissant à de trop nombreuses gares.