Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Buenos Aires (suite)

Pour tenter de résoudre les difficultés d’aménagement du Grand Buenos Aires, il faudrait en fait limiter sa croissance démographique, en particulier en fixant les migrations sur des villes-relais, situées en dehors de l’espace du Grand Buenos Aires. C’est vers ce but que tend à l’heure actuelle le Service de planification du Grand Buenos Aires, en favorisant la promotion de villes-satellites situées à 100 ou 150 km de la capitale, et en lançant une politique d’aménagement de l’espace urbain, visant à préserver la ville d’un accroissement trop accéléré.

M. R.


Buenos Aires, centre d’art

Depuis le début du siècle, Buenos Aires est un centre musical de premier ordre, aussi bien par l’exigence de ses amateurs que par le talent de certains interprètes. Il faut dire que cette « capitale culturelle » de l’Amérique du Sud bénéficie du décalage des saisons lyriques par rapport à l’hémisphère Nord. Si les arts plastiques attiraient moins que la musique ou les mouvements littéraires, on peut dire que, depuis 1945, Buenos Aires est devenu, à cet égard aussi, un centre international important.

Les peintres J. Del Prete (né en 1897), Luis Seoane (né en 1910), Juan Batlle Planas (1911-1966), le sculpteur L. Líbero Badii (né en 1916), qui allaient rayonner surtout à partir de 1945, font le pont entre le passé (v. Argentine) et l’avant-garde. Curieusement, un certain nombre d’artistes nés entre 1910 et 1920 renouent avec ce passé, avec un art traditionnel qu’ils n’améliorent pas. Par contre, les générations des années 1920-1945 amènent une prolifération intéressante d’artistes. Au risque de vexer certains, il faut pourtant reconnaître que cette jeunesse non conformiste de l’« école de Buenos Aires » (qui compte beaucoup de provinciaux et d’étrangers) se distingue surtout par l’adaptation habile de choses déjà vues — américaines dans la plupart des cas — plutôt que par l’originalité de l’invention. Le cosmopolitisme de Buenos Aires pousse les artistes à voyager et à être au courant de tout ce qui se fait dans le monde. Mais presque la moitié de ceux qui voyagent ne rentrent plus à Buenos Aires : par goût de l’exil volontaire, mais aussi par manque de débouchés dans le pays.

Parmi les précurseurs de la nouvelle vague, on trouve deux mouvements assez originaux : le groupe Arte Concreto Invención (1945) et son dédoublement, le groupe Madí (1946). Le grand animateur du premier fut T. Maldonado (né en 1922), connu aujourd’hui comme « designer » ; celui du deuxième étant Gyula Kosice (né en 1924), qui continue seul ses recherches d’art cinétique « hydraulique ». Parmi les « concrets » purs citons les peintres Antonio Fernández Muro (né en 1920), Sara Grilo (née en 1921) et Miguel Ocampo (né en 1922), les sculpteurs Claudio Girola (né en 1923) et Ennio Iommi (né en 1926). Les autres abstraits — lyriques ou expressionnistes — sont notamment Sergio de Castro (né en 1922), Clorindo Testa (né en 1923), Kazuya Sakai (né en 1927), Marcelo Bonevardi (né en 1929) et Ronaldo de Juan (né en 1930).

Pour parler de la génération suivante, il faut se référer à un critique-promoteur, Jorge Romero Brest (né en 1905), qui fonda une revue, Ver y estimar (1948), où il sut s’entourer de jeunes critiques, réussissant à intéresser les artistes et le public d’avant-garde. Plus tard, à la tête du musée des Beaux-Arts puis de l’Instituto Di Tella, il se consacra à promouvoir les mouvements qui l’intéressaient, écartant le reste de façon peut-être trop rigide. C’est surtout grâce à lui que Buenos Aires a vu défiler, dans les années 60, toutes les tendances d’un art chaque fois moins conformiste.

Parmi les artistes les plus doués, citons un expressionniste « à la Francis Bacon* », Rómulo Macció (né en 1931) ; un « constructeur » en plastiques, Rogelio Polesello (né en 1939) ; un surréaliste, Roberto Aizenberg (né en 1928) ; une « exploratrice » qui pratique un art de contestation, Marta Minujín (née en 1941). Les meilleurs sculpteurs et « cinétistes » argentins sont fixés à Paris. Outre les plus connus, Alicia Penalba (née en 1918) et Julio Le Parc (né en 1928), citons Marino Di Teana (né en 1920), Luis R. Tomasello (né en 1915), Gregorio Vardanega (né en 1923), Martha Boto (née en 1925) et Leonardo Delfino (né en 1928).

D. B.

 S. Makarius, Buenos Aires, mi ciudad (Buenos Aires, 1963). / G. Bourdé, Buenos Aires (Aubier, 1974).

Buffet (Bernard)

Peintre français (Paris 1928).


Il constitue un cas singulier, tant par la rapidité de son succès que par sa situation dans l’art du xxe s. Ce qui frappe d’abord, dans les premiers paysages de Bernard Buffet, en 1943, c’est la signature : ostentatoire et griffue déjà, elle s’étale en plein ciel. Le jeune peintre commence à se chercher dans les lieux sans prestige chers à Utrillo* et au Vlaminck* d’après le fauvisme, avec la palette brumeuse du second. Pourtant, ce qui s’affirme dès 1947, irrévocablement, c’est une composition quasi géométrique obtenue grâce à un trait d’une raideur extrême, dédaigneux de toute sensualité. À cette date, Buffet est donc en possession de son système. La certitude où il est d’avoir « trouvé » lui vaut une assurance sans doute contagieuse, puisqu’en 1948 il reçoit le prix de la Critique (ex aequo avec Bernard Lorjou, un peintre chevronné) et, en 1949, obtient un contrat pour exposer chaque année à la galerie Drouant-David. Après avoir peint indifféremment natures mortes, scènes d’intérieur et paysages, il décide de s’imposer annuellement un thème précis : la Passion en 1951, Paysages en 1952, Nus et Bestiaire en 1953, Horreur de la guerre en 1954, le Cirque en 1955, Paysages de Paris en 1956, Vie de Jeanne d’Arc en 1957, etc. En 1958, la galerie Charpentier lui consacre une rétrospective. Entre-temps, la cote de ses tableaux n’a cessé de monter, Buffet est devenu une vedette que s’arrache le Tout-Paris, et les journaux nous entretiennent de ses châteaux, de ses voitures, de sa femme Annabel.