Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
W

Wou Tchen (suite)

Aujourd’hui, parmi les quelques dizaines de ses œuvres conservées dans les collections publiques et privées, on peut distinguer deux styles : un style grandiose dans les copies et imitations des peintres des xe et xie s. et un style familier dans les petites compositions de paysages, bambous, fleurs, etc., qui reflètent le décor quotidien de la vie. Citons parmi ces dernières le rouleau horizontal conservé au musée du Palais à Taibei (T’ai-pei) et représentant une branche de bambou : en quelques touches, il illustre bien la conception d’un art simple et aimable et peut expliquer la critique de Xia Wenyan. Cependant, l’harmonie entre la peinture, le poème et la calligraphie qui l’accompagnent atteint à une rare perfection ; d’où l’influence de Wu Zhen sur les peintres lettrés jusqu’à nos jours.

H. C.-l.

Wou Tch’eng-ngen

En pinyin Wu Cheng’ en, lettré chinois de la dynastie Ming (1500-1582).


Il naît dans une famille de petits fonctionnaires locaux. Recalé plusieurs fois aux examens provinciaux, il n’obtient que des postes subalternes. Arrogant, plein d’esprit critique et conscient de sa valeur, il a du mal à supporter l’ambiance mesquine et servile des bureaux de province et finit par démissionner. Il se retire à la campagne, où il mène une vie sur laquelle nous n’avons aucun détail. Il arrange et remanie plusieurs histoires populaires des Song et, vers la fin de sa vie, il entreprend sa grande œuvre, la compilation du Xiyouji (Si-yeou-ki), ou Voyage en Occident. C’est l’un des quatre grands romans populaires en langue vulgaire de la littérature chinoise. La genèse de ce récit est assez complexe, car les sources en sont diverses. À l’origine, il s’agit du voyage aux Indes, à la recherche des livres bouddhiques, du saint moine Xuanzang (Hiuan-tsang) au viie s. Mais sur ce voyage réel se greffe un certain nombre de personnages de fiction populaire qui évoluent avec aisance dans l’immense panthéon bouddhique. Certains voient dans Sun Wukong (Souen Wou-k’ong), le Singe aux merveilleux pouvoirs, qui est en fait le héros du roman, un avatar de Hanumant, ce dieu-singe qui joue un rôle essentiel dans le Rāmayāṇa. Sous les Song, les aventures du Singe pèlerin faisaient déjà les délices des conteurs publics, mais c’est grâce à Wu Cheng’ en que l’ensemble prit forme et unité.

Les véritables héros du Xiyouji sont les compagnons que le moine s’adjoint en route grâce à Guanyin (Kouan-yin), qui favorise son projet. Il s’agit du Singe Sun Wukong (Sun, qui a saisi le Vide), du Sanglier Zhu Bajie (Tchou Pa-tsie) [Sanglier aux huit vœux] et de Sha Wujing (Cha Wou-tsing), le Cheval. Ces trois animaux aident le moine, surnommé Tripitaka, à traverser les cent contrées plus bizarres et dangereuses les unes que les autres qui les séparent de la loi de Bouddha. Selon une allégorie simple du salut, ils sont chargés de mener à bien cette tâche pour racheter leurs méfaits passés. Le livre débute par l’histoire de Sun Wukong lorsqu’il était jeune, indépendant et roi des Singes. La critique actuelle chinoise voit en lui le type accompli du grand révolutionnaire, de l’anarchiste qui lutte sans merci contre l’ordre établi. Car le roi des Singes n’hésite pas à se révolter contre le Seigneur d’En-Haut. Avec un petit côté gavroche qui ne manque ni d’audace ni d’humour, il va voler les pêches d’immortalité et ravager le verger des dieux. Puis ses troupes bien exercées portent le combat jusqu’aux portes du Ciel. Il faut l’intervention d’urgence des plus grandes divinités de Bouddha et de Guanyin pour mettre fin à la révolte et faire prisonnier le Singe. Huit cents ans plus tard, Guanyin la miséricordieuse lui propose de se racheter en accompagnant le moine dans les contrées d’Occident. L’intelligence de Sun, sa force, ses pouvoirs occultes, ses capacités de décision, de ruse et de persévérance en font un héros populaire parfait. Sans compter une certaine vulgarité et un certain mépris des conventions établies qui ne sauraient déplaire. D’ailleurs, sous ses abords rudes, Sun a bon cœur et n’hésite pas à perdre de précieuses journées pour sauver une jeune fille aux mains de monstres ou libérer un peuple esclave de démons malfaisants. Quant à Zhu Bajie, son apparence est aussi terrifiante que la réalité de sa force. Pourtant, il est moins obtus que sa face ne laisserait croire et il est souvent de bon conseil, même contre le Singe, victime de son emportement. Mais il aime volontiers jouer la mauvaise tête et c’est au fond bien malgré lui qu’il poursuit ce pèlerinage.

Le symbolisme est surtout apparent dans les ennemis des voyageurs et les pays traversés. Il rappelle un peu les utopies de notre xvie s., surtout les voyages de Pantagruel à la recherche de la Dive Bouteille. Superstition, bêtise, convoitise, luxure, gourmandise, tous les péchés sont pour ainsi dire incarnés dans un monstre ou un pays. Dragons des fleuves, génies des montagnes, anges déchus, animaux féroces, jeunes filles fatales, faux moines anthropophages, les plus vilains défauts se cachent souvent sous les apparences les plus innocentes. Il faut le flair du Singe pour échapper à ces démons aussi audacieux qu’astucieux et réussir finalement à trouver les livres de la Loi, qui, ô surprise, ne sont que des pages blanches.

D. B.-W.

Wren (sir Christopher)

Architecte anglais (East Knoyle, Wiltshire, 1632 - Hampton Court 1723).


Rien ne prédisposait Wren à devenir architecte. Il aurait pu être évêque comme son oncle ou simplement recteur comme son père ; mais la science, au temps de Cromwell, prenait le pas sur la religion et l’adolescent étudia les mathématiques, l’astronomie et la physique. Aussi est-ce comme professeur d’astronomie qu’il entre en 1657 au Gresham College de Londres ; quelques années plus tard, professeur à Oxford, il compte déjà, au dire de Newton, parmi les meilleurs géomètres de son temps. Sa curiosité étendue, son sens pratique jusque dans la fabrication d’appareils de météorologie lui valent d’être consulté pour la restauration de la cathédrale Saint Paul de Londres et chargé d’édifier un théâtre à Oxford, une chapelle à Cambridge (1663). Mais il n’a pas encore choisi sa voie.