Wren (sir Christopher) (suite)
1666 : la City détruite
C’est après un voyage d’étude en France, en 1665, et devant la tâche immense offerte l’année suivante par le grand incendie de Londres* que Wren abandonne toute autre préoccupation pour se consacrer à l’architecture. L’heure est d’ailleurs aux techniciens : avec Robert Hooke (1635-1703), son collègue de géométrie au Gresham College, Wren fait partie de la commission de reconstruction. Faute de voir adopter son tracé directeur, il va proposer des règles d’urbanisme et aura la haute main sur leur application. Mais là ne se borne pas son rôle. Chargé de reconstruire les cinquante églises de la City, Wren les traite comme autant de motifs émergeant de cette masse de brique aux façades larges et plates ; et, d’un ensemble utilitaire assez morne, il fait une composition équilibrée et vivante. Le clocher de Saint Vedast (1697) offre des épaulements diagonaux selon un thème baroque qu’utilisera Nicholas Hawksmoor (1661-1736) ; d’autres, plus nombreux, montrent les soucis de leur auteur pour le chantier de Saint Paul : en 1670, la flèche de Saint Mary-le-Bow est déjà supportée par une colonnade périptère, et, en 1702, celle de Saint Bride’s (l’édifice lui-même, de plan basilical vitruvien, date de 1670-1684) reprend l’étagement en pagode du projet « Warrant ». Dans un tel contexte, la reconstruction de la cathédrale prend sa dimension véritable.
1675-1709 : la cathédrale de Londres
À l’exemple de Bramante, Wren a d’abord songé au Panthéon romain et à la basilique de Constantin. Cependant, son premier projet, en 1670, manque d’ampleur. Trois ans plus tard, avec le « Great Model », il parvient à une vaste coupole sur un corps massif, un octogone allégé de quatre faces concaves. Projet magnifique, mais tout le contraire d’un plan en croix latine, en dépit de la saillie du portail. Pour se conformer à la tradition, Wren propose alors (« Royal Warrant », 1675) un massif horizontal d’où émerge à peine une coupole soutenant une énorme lanterne et une flèche de sept étages. C’est sans plus de succès, car l’acuité du profil obtenu, par trop nordique (les intérieurs des églises de Wren rappellent souvent la Hollande, eux aussi), ne répond pas mieux à la majesté requise. Finalement, l’architecte réalisera, sous un large dôme charpenté, une double coque destinée à supporter une lanterne et à obtenir un éclairage indirect. L’idée, qui sera reprise par Soufflot*, venait de François Mansart* ; mais, traduite à l’échelle de Saint-Pierre de Rome, elle plaçait son interprète parmi les plus hardis concepteurs de coupoles de tous les temps.
Wren, qui continuait à œuvrer pour ses anciens confrères (à l’observatoire de Greenwich en 1675, à la bibliothèque de Trinity College de Cambridge en 1676-1684, notamment), fut chargé, au titre de surveyor general, des grands chantiers royaux. Celui du palais de Winchester, ouvert en 1683, fut abandonné deux ans plus tard, à la mort de Charles II ; et la transformation de Hampton Court, en 1690-1696, ne fut que partielle. La réalisation des hôpitaux royaux de Chelsea (1682-1691) et de Greenwich (1698-1707) est plus significative. Le premier est très sobre ; quant au second, Wren, bien qu’ayant proposé un plan fermé très intéressant, dut le traiter sous forme de blocs séparés de part et d’autre de l’axe fourni par la maison de la Reine d’Inigo Jones*. Le classicisme français, dans toutes ces œuvres, fait équilibre à la tradition de Palladio* ; et cette préférence n’est pas seulement formelle : elle devait apporter au bâtisseur des solutions satisfaisantes du point de vue structural.
H. P.
J. Summerson, Sir Christopher Wren (Londres, 1953). / V. Fuerst, The Architecture of Sir Christopher Wren (Londres, 1956).