Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vertébrés (suite)

L’évolution des Vertébrés


Le stade agnathe

Les Agnathes* (Vertébrés sans mâchoires) n’ont pas encore le premier arc du squelette viscéral transformé en mâchoire inférieure. Le paléontologiste suédois E. Stensiö a montré, en 1927, que les Agnathes (ou Cyclostomes) de l’ère primaire représentent le stade le plus primitif de l’évolution des Vertébrés. Les Agnathes de l’ère primaire sont des « Poissons cuirassés » apparus vraisemblablement dans le milieu marin. Ils sont trop spécialisés pour que l’on puisse en faire les ancêtres des Vertébrés à mâchoires.


Le stade gnathostome

Il caractérise tous les autres Vertébrés. Le premier arc squelettique s’y est transformé pour donner la mâchoire inférieure et la mâchoire supérieure. Les membres pairs de type nageoire caractérisent les Poissons, groupe hétérogène même après élimination des Agnathes. La classe des Chondrichthyens, ou Poissons cartilagineux, renferme les Sélaciens* (Raies et Requins) et les Holocéphales (Chimères*), dont les mâchoires sont constituées par l’arc mandibulaire. Les Ostéichthyens, ou Poissons osseux, sont caractérisés par un squelette osseux. Ils méritent d’être subdivisés en 3 classes : les Actinoptérygiens, ou Poissons à nageoires rayonnantes (ce sont surtout les Téléostéens*, qui constituent la majorité des Poissons actuels) ; les Dipneustes*, qui sont capables de pratiquer à la fois la respiration branchiale et la respiration pulmonaire ; les Crossoptérygiens*, dont les nageoires paires ont une structure très particulière, plus ou moins symétrique de part et d’autre d’un axe médian.


Le stade tétrapode

Les Crossoptérygiens comprennent 3 lignées. Les Actinistiens ou Cœlacanthiformes, connus dès le Dévonien moyen et dont le dernier représentant est le Latimeria chalumnæ actuel, n’ont pas évolué. Les Strumiformes ont disparu sans descendance. Les Rhipidistiens sont plus importants, car la possession de narines internes, ou choanes, en fait les précurseurs des Tétrapodes. Les Rhipidistiens ont été divisés par E. Jarvik, d’après l’anatomie de la région nasale, en Porolépiformes, dont la structure rappelle celle des Amphibiens Urodèles, et en Ostéolépiformes, qui rappellent les autres Tétrapodes, y compris les Batraciens Anoures. Ces recherches aboutissent donc à la notion du diphylétisme des Tétrapodes et de l’hétérogénéité du groupe des Batraciens.

Les premiers Tétrapodes connus sont des Amphibiens, les Stégocéphales, caractérisés par les replis compliqués de l’émail dentaire (d’où leur nom de Labyrinthodontes) et par la position latérale des membres par rapport au tronc. Les Ichthyostega* du Dévonien supérieur sont les plus primitifs et les plus intéressants par leur mélange de caractères de Poissons (nageoire caudale) et de Tétrapodes (nageoires paires transformées en pattes à 5 doigts).


Le stade amniote

Les premiers Reptiles sont les Cotylosauriens, qui se rapprochent des Stégocéphales par de nombreux caractères, comme la disposition des os du crâne et la structure des vertèbres. Chez les Reptiles, comme chez les Oiseaux et les Mammifères, l’embryon est pourvu d’annexés, l’amnios et l’allantoïde. Dès le sommet du Carbonifère, au Pennsylvanien, deux tendances évolutives se manifestent chez les Reptiles. Le groupe des Pélycosauriens montre des caractères considérés comme mammaliens : une seule fenêtre temporale de chaque côté du crâne, processus rétro-angulaire de la mandibule incurvé vers le bas, angulaire pourvu d’une lame réfléchie. Ces Reptiles mammaliens, ou Théropsidés, forment la lignée synapside, dont l’évolution est caractérisée par l’adjonction progressive de nouveaux caractères mammaliens : construction d’un palais secondaire, réduction de la mandibule au seul os dentaire, remplacement de l’articulation mandibulaire (de type reptilien) entre l’articulaire et le carré par une articulation (de type mammalien) entre le squamosal et le dentaire, disposition des membres en position parasagittale, etc. Le genre Diademodon du Trias est caractéristique de cette évolution ; on a même supposé que ce Reptile avait acquis la viviparité et l’homéothermie.

Ces faits nous montrent que la délimitation de la classe des Mammifères, facile lorsqu’on se limite aux formes actuelles, devient difficile si l’on prend en considération les formes fossiles qui ne sont ni des Reptiles vrais ni des Mammifères vrais, mais des formes intermédiaires. L’exemple le plus curieux est sans doute Diarthrognathus du Trias supérieur, qui possédait à la fois les deux types d’articulation de la mandibule, ce qui était considéré avant sa découverte comme une impossibilité.

L’autre lignée est celle des Sauropsidés, qui sont à l’origine des Reptiles actuels et des Oiseaux. Là encore, nous trouvons à l’origine des Oiseaux un être composite réunissant des caractères de Reptiles et d’Oiseaux : l’Archæopteryx*. En conclusion, il serait plus logique de scinder les Amniotes en une lignée synapside issue des Reptiles mammaliens et réunissant ces derniers avec les Mammifères, et en une lignée sauropsidienne réunissant les autres Reptiles et les Oiseaux. Au niveau des Mammifères et des Oiseaux, l’évolution des Vertébrés se poursuit par l’acquisition de l’homéothermie, tandis que les Mammifères acquièrent la viviparité.


Le rôle des Vertébrés dans la biosphère

L’acquisition d’un squelette interne a permis aux Vertébrés d’acquérir une taille plus grande que les Invertébrés. Bien que moins nombreux en espèces et en individus, les Vertébrés jouent un rôle important dans la biosphère. Ils ont colonisé tous les milieux grâce à la variété de leurs types biologiques, en particulier sur terre. Cela est surtout vrai pour les Reptiles et les Mammifères, les Amphibiens ayant eu des possibilités évolutives plus limitées. Alors que les Reptiles étaient les maîtres de la terre à l’ère secondaire, les Mammifères les ont supplantés à l’ère tertiaire en les remplaçant dans la majorité de leurs niches écologiques. Le développement de l’intelligence, les soins aux jeunes, l’indépendance de plus en plus grande vis-à-vis des facteurs du milieu ont été pour beaucoup dans le succès des Mammifères, qui représentent le degré d’évolution le plus complexe réalisé chez les Vertébrés, de même que les Insectes ont réalisé l’évolution la plus poussée chez les Invertébrés.

R. D.

➙ Amphibiens / Mammifères / Oiseaux / Poissons / Reptiles.