Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

autoroute (suite)

Après les opérations de libération des emprises ou pendant leur déroulement, sont lancés les travaux de construction des ouvrages d’art, qui sont des passages supérieurs ou inférieurs. La circulation traversant l’autoroute peut ainsi être rétablie au-dessus des chantiers ou en dessous. On réserve par ailleurs des possibilités de passage sur la plate-forme de l’autoroute aux engins de terrassements.

Les passages supérieurs routiers sont usuellement en France des ponts à quatre travées (dotés de trois piles et de deux piles-culées enterrées), comportant des tabliers d’épaisseur constante, constitués par des dalles continues en béton armé pour les faibles portées (distance entre deux piles, ou longueur d’une travée, inférieure à 10 ou 15 m) et en béton précontraint pour les portées plus grandes. Pour les très grandes portées, on peut avoir recours à des dalles en béton précontraint élégies ou nervurées. Certains passages supérieurs ne comportent pas d’appuis sur le terre-plein central de l’autoroute et ne présentent ainsi que trois travées. De coût plus élevé que les passages supérieurs à quatre travées, ils ont l’avantage d’éviter la présence d’une pile entre les deux courants de circulation de l’autoroute. Les types d’ouvrages utilisés dans ce cas peuvent être des ponts à tablier continu en ossature mixte acier-béton, des ponts à béquilles à tablier de béton précontraint ou des ponts à tablier en dalle continue élégie précontrainte. En France, on construit très peu de ponts à deux travées dotés de deux culées et d’un appui sur le terre-plein central, sauf dans certains cas exceptionnels, comme la construction d’ouvrages dans des zones d’affaissements miniers, où des piles-culées ne seraient pas capables de résister aux efforts dus à des tassements de terrains importants.

Les passages inférieurs des autoroutes françaises sont usuellement des ponts en cadre fermé ou en portique ouvert en béton armé. Ces ouvrages sont en effet robustes, faciles à construire et d’un moindre coût que les ponts à tablier en dalle continue ou à poutres, dans les cas usuels de rétablissement de routes de faible largeur.

Les ouvrages d’art courants des autoroutes, dont il vient d’être question, sont construits suivant des procédés industriels. Les ponts de longueur exceptionnelle, franchissant les fleuves, les voies ferrées, etc., peuvent aussi donner lieu à une industrialisation (préfabrication de poutres en béton précontraint, ponts métalliques).

Les chantiers de terrassements suivent la construction des ouvrages d’art. Des engins de grande puissance (scrapers, bulldozers) sont utilisés. Ils permettent des cadences élevées de travail et l’abaissement des prix de revient, leur emploi étant cependant sensible aux conditions atmosphériques. Le rythme de 15 000 m3 de terrassements par jour est couramment atteint, l’importance des terrassements pouvant varier en moyenne de 100 000 à 300 000 m3 de terre remuée par kilomètre d’autoroute.

La construction des chaussées constitue la troisième étape de la réalisation d’une autoroute. On distingue les chaussées souples, dites « noires », et les chaussées rigides, dites « blanches ». Les chaussées souples comportent quatre ou cinq couches de matériaux superposés, d’une hauteur totale variant en moyenne de 40 à 80 cm. On recourt beaucoup en France à la technique des graves traitées aux liants hydrauliques (grave-ciment, grave-laitier, sable-laitier) pour les couches inférieures, la ou les couches de surface étant constituées de matériaux enrobés au bitume. Les chaussées rigides sont constituées d’une dalle en béton de ciment de 25 à 28 cm d’épaisseur en moyenne, reposant sur une couche de fondation d’une quinzaine de centimètres de hauteur.

La construction d’une chaussée d’autoroute atteint le rythme de 1 km par jour. Des centrales, produisant de 200 à 300 t à l’heure de matériaux enrobés au bitume, ou bien des machines à coffrages glissants, assurant la construction continue des chaussées en béton de ciment, permettent d’obtenir de telles cadences.


Financement des autoroutes de liaison

Les autoroutes coûtent cher, et leur financement est un problème difficile. Certains pays ont recours à un mode de financement « budgétaire », les ressources provenant des impôts ou des taxes perçus par l’État ou les collectivités locales et prélevés en particulier sur les prix de vente des carburants. Les États-Unis, la République fédérale allemande, la Grande-Bretagne, la Belgique et les Pays-Bas pratiquent une telle politique de financement. Les taxes perçues peuvent éventuellement servir à financer les annuités de remboursement d’emprunts émis par l’État pour la construction des autoroutes.

La France et, avec elle, des pays comme l’Italie, le Japon, l’Espagne ont choisi une politique de perception de péages sur les autoroutes de liaison, dont les recettes viennent compléter les ressources budgétaires.

C’est ainsi qu’en France cinq sociétés d’économie mixte, où l’État est majoritaire, sont concessionnaires, pour une durée totale de trente-cinq ans, de l’exploitation des autoroutes Paris-Lille, Paris-Lyon, Lyon-Marseille, Montpellier-Nîmes, Estérel-Côte d’Azur et Paris-Rouen. Ces autoroutes ont été financées pour un peu moins d’un tiers par des subventions budgétaires provenant du Fonds spécial d’investissement routier (alimenté par un certain pourcentage des taxes spécifiques sur les carburants) et pour le reste par des emprunts « gagés » sur les péages et émis auprès de la Caisse nationale des autoroutes, établissement public créé en 1963. Le produit des péages perçus par les sociétés d’économie mixte permet ainsi de prélever trois fois moins d’impôts ou taxes d’une autre nature pour le financement des autoroutes que si ce dernier était assuré entièrement par des ressources budgétaires.

La concession de la construction et de l’exploitation de certaines autoroutes à des groupements privés, avec une subvention réduite de l’État, est un troisième moyen de financement utilisé en France. Il a pris une grande importance depuis 1970 et intéresse notamment les itinéraires de Paris à Poitiers et au Mans, Paris - Metz, le réseau alpin. Dans ce cas, la recherche de l’équilibre des recettes procurées par la perception des péages autoroutiers et des dépenses de construction et d’exploitation de l’autoroute peut conduire à la réduction de certaines des caractéristiques techniques de l’autoroute et, par là, du niveau de service procuré aux usagers. Cependant, l’inconvénient de cette diminution du niveau de service peut être considéré par les responsables comme devant être compensé par l’avantage de l’obtention de ressources financières nouvelles, permettant une réalisation plus rapide de l’ouvrage.