Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

Tchö-kiang (suite)

Ce relief tourmenté s’enfonce sous la mer : de là une côte de subsidence, extrêmement découpée avec une multitude d’estuaires, de rades, de caps ; côte rocheuse très belle au sud de l’estuaire de Hangzhou. Cette côte est frangée de nombreuses îles et, en particulier, du grand archipel des Zhoushan (Tcheou-chan), au large de l’estuaire de Hangzhou. Cet estuaire est très fortement remonté par la marée, dont l’importance est exceptionnelle (elle dépasse parfois 8 m et progresse aussi vite que celle du Mont-Saint-Michel).

La partie méridionale est presque tropicale : la moyenne de janvier est supérieure à 8 °C jusqu’à Wenzhou (Wen-tcheou) ; au-delà, vers le nord, et notamment à Hangzhou, l’hiver devient plus rude. L’été est chaud, les pluies sont abondantes, supérieures à 1 500 mm, on compte en moyenne 180 jours de pluie : ce sont surtout des pluies d’été, apportées par la mousson, mais aucun mois ne reçoit moins de 25 mm ; les côtes sont ravagées, chaque année, en septembre et octobre, par des typhons. Ce climat permet une magnifique végétation sur les basses pentes des montagnes, où se mêlent plantes tropicales à feuilles persistantes (camphriers) et à feuilles caduques (laquiers, bambous) et des lianes tempérées (chèvrefeuille, glycine) dominant myrtes et azalées.

Les vallées, les bassins et la plaine septentrionale portent des rizières, très intensivement cultivées ; en hiver, elles sont aménagées en billons et portent des cultures variées (maïs, tabac, légumes). Quelques spécialisations apparaissent, à la place du riz : le jute aux environs de Hangzhou (la moitié de la production chinoise), le mûrier autour de Hangzhou et au sud du lac Taihu (autour de Huzhou [Hou-tcheou]), le coton (Jiaxing [Kia-hing] et Shaoxing [Chao-hing]). Le bassin de Jinhua (Kin-houa) est célèbre dans toute la Chine par son élevage de porcs. La région au sud du Taihu ajoute, à l’élevage du ver à soie, une très active pisciculture. Les pentes ont été partiellement mises en valeur par des champs en terrasses (maïs, millet, patates douces) ou portent des vergers (orangers de Wenzhou, pêchers de Fenghua), ou encore des jardins de théiers, principalement autour de Wenzhou ; ailleurs, deux ou trois ans de culture de maïs sont suivis de la plantation de conifères, coupés à vingt ans. Les côtes sont les plus actives de toute la Chine pour la pêche en mer, et l’archipel des Zhoushan est le centre le plus important à cet égard (usines de farine de poisson). Les jonques sont construites notamment à Ningbo (Ning-po), qui fournit également un grand nombre de jonques à la navigation sur le Yangzi. Dans toutes les villes côtières, une part importante de la population vit sur sampans.

Le Zhejiang n’a guère de ressources minières (fer à Shaoxing). Par contre, le Xin’anjiang, affluent du Zhejiang, a été barré aux gorges de Zhongguan (Tchong-kouan) : l’électricité ainsi produite alimente, principalement, les industries de Shanghai. Le Zhejiang est peu industrialisé. Il est traversé par la voie ferrée Canton-Shanghai sur laquelle s’embranche une voie vers Ningbo ; un second embranchement mènera de Jinhua à Wenzhou.

Hangzhou, la capitale provinciale, compte plus de 700 000 habitants : ancienne capitale des Song (1127-1279), elle est la plus célèbre ville d’art de la Chine. Tout le nord du Zhejiang montre d’ailleurs, jusque dans les maisons populaires, une grande originalité architecturale (maisons à étage, cloisons à panneaux amovibles, etc.).

J. D.

Tchokwés ou Tchokoués

Ethnie de l’Angola, du Zaïre et de la Zambie.


Comprise au nord entre les fleuves Kwilu et Kasaï, elle s’étend au sud-ouest en Angola vers le pays ovimbundu et au sud-est en Zambie dans la région balovale. Il y a près d’un million de Tchokwés. C’est une population constituée d’un mélange de deux groupes ethniques : des populations matrilinéaires d’Angola et des Lundas. Elle occupe une zone géographique assez différenciée : au centre et au nord, c’est la forêt du bassin du Congo ; au sud (Katanga, Zambie), des plateaux et des prairies herbeuses se succèdent jusqu’aux confins désertiques du Kalahari.

Ces oppositions écologiques expliquent la prédominance de la chasse dans le nord et de l’agriculture dans le centre et le sud. Les Tchokwés font de leurs chasseurs une classe privilégiée au statut élevé. On distingue la chasse collective villageoise (ou même d’un groupe de villages) et les chasseurs individuels, professionnels. La qualité de chasseur s’hérite et des rites religieux ou magiques correspondent à cette activité. L’agriculture vivrière dans le sud comprend le manioc, l’igname, les patates douces, le mil, le sorgho, les haricots et l’arachide. Il y a peu d’élevage (volaille, moutons, chèvres). Les hommes assument le débroussage, mais le reste du travail agricole est le fait des femmes.

En Zambie, on rencontre deux types de village selon la région naturelle : au nord, pays de la chasse, les cases sont en paille, les installations temporaires et les cases entourent un espace où se trouve le tsoka, ou maison de réunion, alors qu’au sud les villages, plus grands et mieux ordonnés, sont constitués de maisons en banco. La société tchokwé est matrilinéaire et patrilocale. Les enfants appartiennent au « lignage » (le terme n’existe pas) de la mère. C’est le frère de la mère (nato) qui est responsable des enfants. Seuls les hommes riches ou puissants ont plusieurs femmes. Au plan politique, les Tchokwés sont organisés comme les Lundas et ils étaient traditionnellement de grands marchands d’esclaves. Il n’y a pas de chef suprême, mais une série de sous-chefferies dont l’origine remonterait au partage opéré entre plusieurs frères. Ce sont enfin des forgerons fameux. Dans chaque village il y a une forge communale, gérée par le chef de village, mais tout le monde peut l’utiliser. Ce sont aussi de très habiles sculpteurs de bois. La religion connaît un Être suprême (Nzambi), le créateur de tout et la raison de toutes choses. Il est lié aux esprits des ancêtres. Lorsqu’il est associé aux phénomènes naturels (pluie, tonnerre), il prend le nom de Kalunga. À sa mort, chaque individu laisse un mukishi, un être invisible. S’ils se sentent négligés, ils peuvent punir et posséder leurs descendants. La magie et la sorcellerie, auxquelles correspondent des séances de divination parfois publiques, ont leur importance. Enfin, il existe des rites de passage, de circoncision (mukanda) pour les garçons. L’initiation peut durer de deux à neuf mois.

J. C.

 M. Mac Culloch, Ethnographic Survey of Africa. West Central Africa, I : The Southern Lunda and Related People (Londres, 1951).