Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Tchernikhovsky (Saül) (suite)

Après avoir participé à la Première Guerre mondiale comme médecin militaire, il revient en 1919 à Odessa, où il écrit ses Sonnets de Crimée, puis, en 1922, part pour l’Allemagne. De 1926 à 1928, il assume la direction littéraire de Ha-tekufa et, de 1929 à 1931, travaille pour l’encyclopédie Eshkol, pour laquelle il rédige des articles sur les sciences naturelles et la médecine. Il écrit lui-même sous différents pseudonymes : Jacob Tam, Ben-Gutman.

En 1931, il arrive en Palestine : il y publie les Cantiques du pays et devient à la mort de Bialik* président de l’Association des écrivains hébreux. En 1940 paraît Re’i adama (Vois, terre !), qui lui vaut le prix Bialik (1941).

Toute son œuvre est parcourue de grands thèmes : l’héroïsme, la vengeance, mais aussi l’attente de la beauté et de la liberté. Il aime la nature, et il en introduit les forces personnifiées par diverses déités dans la littérature hébraïque : mal compris, il fut accusé de paganisme (Face à la statue d’Apollon).

Si Bialik exprime la renaissance spirituelle du peuple juif, Tchernikhovsky en magnifie la renaissance humaine, à travers la synthèse des valeurs éthiques de la tradition juive et des principes esthétiques de la culture occidentale. Il est ainsi le plus direct précurseur de la poésie israélienne.

N. G.

 J. Lichtenbaum, Saül Tchernikhovsky, sa vie et son œuvre (en hébreu, Tel Aviv, 1946). / J. Klausner, Saül Tchernikhovsky, l’homme et le poète (en hébreu, Jérusalem, 1947). / B. Kurzweil, Bialik et Tchernikhovsky, leur œuvre poétique (en hébreu, Jérusalem, 1963).

Tchernychevski (Nikolaï Gavrilovitch)

Philosophe et écrivain russe (Saratov 1828 - id. 1889).


« Même ceux de ses articles qui devaient passer par la censure furent des enseignements qui formèrent une pépinière de vrais révolutionnaires » (Lénine). Bien des étudiants et des chefs révolutionnaires voient effectivement en Tchernychevski leur père spirituel, le plus typique représentant de ce prolétariat intellectuel qui, à partir des années 1860, tient le devant des lettres russes et s’oppose à cette génération idéaliste et noble des années 40, pour laquelle le motif moral était inséparable de son expression esthétique. Herzen* appelait Tchernychevski et ses amis Dimitri Ivanovitch Pissarev (1840-1868) et Nikolaï Aleksandrovitch Dobrolioubov (1836-1861) la « bande des bilieux », et Tourgueniev* lui déclara sans ambage : « Vous êtes un serpent, mais Dobrolioubov est un serpent à sonnette. »

Tchernychevski, fils d’un prêtre orthodoxe, connaît une jeunesse relativement aisée ; il fréquente le séminaire de Saratov, sa ville natale, puis fait des études de philosophie à Saint-Pétersbourg. Il a vingt ans lorsque éclatent les grands événements politiques et sociaux de 1848, et ces bouleversements marquent sa génération. Il entre alors au Contemporain, où il reprend et défend les idées de Belinski*. Il conçoit la littérature comme un moyen d’action sociale, susceptible d’instruire le peuple — Gogol* est son maître —, mais pas encore comme un instrument politique. Cependant, une thèse qu’il fait paraître en 1855 renouvelle complètement la manière d’envisager les rapports entre l’art et la réalité et attire sur lui l’attention. Pour Tchernychevski, la réalité est supérieure à l’art ; toute forme d’esthétique, de culture raffinée doit être rejetée ; en même temps, il rend un culte aux sciences de la nature, moteur du progrès, et popularise la philosophie scientifique naturaliste. De ses études critiques sur Gogol naît un nouveau courant littéraire qu’on nomme « utilitariste ».

À partir de 1857, Tchernychevski passe à l’action en combattant les réformes d’Alexandre II, qu’il juge tout à fait insuffisantes. De petites cellules se créent sur son initiative ; après 1861, il préconise même l’action révolutionnaire directe et adresse une proclamation aux paysans russes, ce qui lui vaut d’être arrêté et interné à la forteresse Pierre-et-Paul à Saint-Pétersbourg.

C’est là, pendant deux ans, que Tchernychevski écrit son célèbre roman Que faire ?, considéré à la fois comme un plaidoyer pour l’union libre, comme une réflexion sur l’antagonisme des générations et surtout comme un éloge du radical idéal, pur, fort et austère. Le livre, publié dans le Contemporain, déclenche de violentes polémiques et servira de bible pour les jeunes révolutionnaires.

En mai 1864, Tchernychevski est alors condamné au bagne à vie, dans les mines de Nertchinsk. Son comportement témoigne de tant de courage et de simplicité que les gendarmes du bagne doivent constater : « On nous a confié un criminel, nous conduisons un saint ! » Après dix-neuf ans de bagne, Tchernychevski est autorisé à vivre à Astrakhan, puis à Saratov, où il meurt. Ses détracteurs l’ont accusé d’amoralisme ; en réalité, prompt à s’indigner contre les injustices, Tchernychevski croit en la libération des individus, même s’il nie la vie spirituelle et la plénitude créatrice.

S. M.-B.

Tchö-kiang

En pinyin Zhejiang, province de la Chine du Sud-Est. Capit. Hangzhou (Hang-tcheou).


La province de Zhejiang (qui tire son nom du fleuve qui la traverse) couvre 101 000 km2 et compte environ 30 millions d’habitants, soit une densité voisine de 300 habitants au kilomètre carré (troisième rang en Chine après le Jiangsu [Kiang-sou] et le Shandong [Chan-tong]). Province littorale, elle est bordée aussi par les provinces de Jiangsu [Kiang-sou], d’Anhui [Ngan-houei], de Jiangxi [Kiang-si] et de Fujian [Fou-kien].

Le Zhejiang comprend deux régions naturelles très différentes : au nord, la très ample vallée du Zhejiang, qui s’achève dans le vaste estuaire de Hangzhou et se prolonge jusqu’au lac Taihu (T’ai-hou), dont la province possède la rive sud, et au delta du Yangzijiang ; au sud, une zone montagneuse, beaucoup plus étendue, qui se continue au Fujian. La basse vallée du Zhejiang et le début du delta du Yangzi forment une plaine alluviale très basse et très plate. Les montagnes du sud ne sont pas très élevées (le plus haut sommet n’atteint pas 1 900 m), mais elles sont très abruptes et pittoresques. Elles dessinent deux alignements principaux orientés S.-O. - N.-E. Les vallées (hautes vallées du Zhejiang et de son affluent le Xin’anjiang [Sin-ngan-kiang], vallée du Wujiang [Wou-kiang]) sont le plus souvent étroites et encaissées (de sorte que les superficies cultivables sont très réduites).