Tcheou Ngen-lai (suite)
Bien qu’il ait abandonné ses fonctions de ministre des Affaires étrangères en 1958 — il sera remplacé par le maréchal Chen Yi (Tch’en Yi) —, il reste le maître d’œuvre de la politique extérieure chinoise. Ainsi passe-t-il une semaine à Delhi en 1960 pour tenter de dénouer le conflit sino-indien. Ses séjours chez plusieurs voisins de la Chine et un périple en Afrique (déc. 1963 - févr. 1964) permettent à son pays de rompre un peu plus l’isolement dans lequel il est tenu.
En politique intérieure, le Premier ministre développe et répercute les thèses du président Mao Zedong. Dès le début de la Révolution culturelle*, en 1966, il prend part au mouvement et s’adresse à plusieurs millions de gardes rouges venus à Pékin. Il n’est pas exagéré d’affirmer que l’extraordinaire activité déployée par Zhou au cours de cette période influe considérablement sur le déroulement de la Révolution culturelle. Par son habileté politique, sa volonté de concilier l’inconciliable, son souci de ne jamais ignorer la réalité non seulement politique mais aussi économique, le Premier ministre oriente le mouvement qui secoue la Chine pendant quatre ans vers une voie moyenne. Grâce à son pragmatisme, éloigné de toute doctrine, il évite tous les écueils alors que presque tous ses pairs voient leur étoile décliner. Sa maturité politique, son expérience de la diplomatie et ses talents reconnus de persuasion font de lui l’un des personnages clés de la Révolution culturelle. Paradoxalement, son sens de l’organisation, mais aussi un certain opportunisme l’auront finalement porté au tout premier rang d’un parti où il n’aurait peut-être joué que les seconds rôles.
Malgré quelques attaques de gardes rouges, l’autorité de Zhou se voit raffermie dès la fin de 1967 après qu’il a réussi à éviter l’affrontement à Wuhan entre deux factions rivales. La chute de Lin Biao en septembre 1971 le place au second rang de la hiérarchie de l’État chinois. Il reprend alors son rôle d’ambassadeur extraordinaire de la Chine populaire : il est en Corée du Nord en 1970, à Hanoi en 1971 et joue un rôle capital dans le rapprochement sino-américain et la venue du président Nixon à Pékin en février 1972. Grâce à lui, l’image de la Chine d’hier a totalement disparu.
En août 1973, c’est à lui que revient l’honneur de faire le rapport politique du Xe Congrès du P. C. C. Il est hospitalisé pendant l’été 1974 à cause de troubles cardiaques, mais fait une rentrée politique remarquée lors de la célébration de l’avènement de l’armée rouge (1er août 1927), dont il avait été l’organisateur quarante-sept ans plus tôt. Jusqu’à sa mort, Zhou Enlai a bien représenté le « profil haut de la politique chinoise ».
C. H.
➙ Chine / Mao Tsö-tong / Révolution culturelle prolétarienne (Grande).