Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

syphilis (suite)

Examens de laboratoire

La recherche du Tréponème s’impose en cas de lésions chancriformes suspectes. Elle est indispensable pour confirmer le diagnostic clinique de l’accident primaire. Elle permet de commencer le traitement sans attendre les données de la sérologie quand il existe des lésions muqueuses secondaires. Elle se fait avec l’ultramicroscope, qui permet de voir le Tréponème vivant se déplaçant dans le champ du microscope. Le Tréponème pâle a la forme d’un filament fin, effilé aux deux extrémités, long de 10 à 15 μ ; il est spirale, comportant une dizaine de tours de spire. Il sera différencié de certains Spirochètes et d’autres Tréponèmes : Spirochète refringens, Spirochète de Vincent, Treponema dentium.

Les réactions sérologiques sont celles de Bordet-Wassermann, de Kline, de Ruben Leon Kahn ou de V. D. R. L. Les unes sont des réactions d’hémolyse et les autres de floculation. Elles sont tantôt négatives et cotées (–), tantôt douteuses et cotées (±), tantôt positives et, suivant leur intensité, cotées de 1 à 3 croix (+, ++, +++).

La positivité s’opère entre le 10e et le 15e jour de l’accident primaire ; elle est constante et totale en cas de syphilis secondaire. Il existe des fausses réactions, soit par erreur du laboratoire, soit au cours ou au décours de l’hépatite virale, de la maladie de Hogdkin, du lupus érythémateux, de l’herpès, du chancre mou. Ces fausses réactions peuvent être éliminées par le test de Nelson et l’immunofluorescence. Le test de Nelson est de technique délicate, nécessitant d’être pratiqué dans des laboratoires hautement qualifiés. Sa positivité est sensiblement en retard sur les réactions sérologiques conventionnelles. La réaction d’immunofluorescence a le gros avantage d’être de technique facile et d’être précoce (dès le 7e jour du chancre). Le test de Nelson est d’intérêt majeur au cours de la syphilis primaire, lorsque l’examen à l’ultramicroscope n’a pas été pratiqué ou est resté négatif du fait d’un traitement local intempestif. Lui-même et l’immunofluorescence sont toujours positifs en cas de lésions tertiaires, pour lesquelles les réactions conventionnelles sont restées douteuses, voire négatives.


Pronostic

Si la syphilis reste actuellement d’une très grande fréquence, son pronostic est totalement différent de ce qu’il était avant la pénicillinothérapie. Traité dans les tout premiers jours du chancre, alors que la sérologie est encore négative, le syphilitique guérit complètement. À la phase de sérologie positive du chancre (à partir du 10e au 18e jour environ), le malade bien traité échappera aux accidents secondaires, et la sérologie deviendra rapidement négative. Lorsque la thérapeutique n’est instituée qu’à la période secondaire (roséole, syphilides, alopécie...), la guérison clinique s’effectuera en quelques semaines, mais la sérologie exigera plusieurs mois pour devenir négative. Traitées tardivement (syphilis secondaire tardive, syphilis tertiaire), les manifestations cliniques sont encore réductibles, mais la sérologie risque d’être longtemps, voire définitivement positive.


Traitement

Avec l’avènement de la pénicilline, la plupart des bases classiques minutieusement codifiées ont été ébranlées. Si tous les syphiligraphes s’accordent pour considérer la pénicilline comme étant la meilleure thérapeutique actuelle, ils diffèrent d’avis en ce qui concerne les doses et la nécessité d’un traitement de consolidation. Certains, du reste peu nombreux, préconisent l’injection unique de 3 millions d’unités de pénicilline-retard, mais la majorité des spécialistes préfèrent prescrire entre 10 et 15 millions d’unités en injections musculaires de 1 million d’unités répétées quotidiennement ou à 2 ou 3 jours d’intervalle.

En cas de syphilis primaire sérologiquement négative, cette cure est suffisante, mais un contrôle sérologique est à faire tous les 2 mois pendant le premier semestre et deux fois le semestre suivant (BW et test de Nelson). Concernant la syphilis primaire sérologiquement positive et la syphilis secondaire, nombreux sont les syphiligraphes qui estiment qu’un traitement de consolidation est nécessaire. Deux semaines après la cure de pénicilline, ils prescrivent 18 injections intramusculaires de sels de bismuth-oléosoluble à raison de 2 injections par semaine. Après un arrêt de 6 semaines, nouvelle cure de bismuth. Le traitement et les périodes d’arrêt seront poursuivis jusqu’à la négativation totale des réactions sérologiques classiques ainsi que du test de Nelson et de l’immunofluorescence. La bismuthothérapie est formellement contre-indiquée en cas d’albuminurie et impose un examen des urines avant chaque cure. Le traitement de consolidation peut alors être poursuivi avec des cures répétées de pénicilline. Tous les syphiligraphes ne prescrivent pas un tel traitement, se fondant sur le fait que, dans de nombreux cas (mais non toujours), la sérologie devient négative d’elle-même en 6 mois à 2 ans après la cure de pénicilline.

Le traitement de la syphilis aortique est délicat et doit être conduit en liaison avec le cardiologue. Il est à base de pénicilline et de cyanure de mercure. L’auréomycine pourrait parfois être plus bénéfique que la pénicilline (J. Thiers).

Le tabès fixé ne nécessite pas de traitement, mais une surveillance attentive, alors que le tabès évolutif est, après un préalable de cyanure ou de cortisone, à traiter à doses progressives de pénicilline. La paralysie générale, actuellement rarissime, est une indication majeure de la pénicillinothérapie, laquelle, en cas d’échec, peut être suivie de la malariathérapie.

La syphilis congénitale précoce et floride impose un traitement d’urgence de pénicilline sous corticothérapie protectrice ; on doit commencer par des doses très faibles pour totaliser un demi-million d’unités pour la cure. La syphilis tardive congénitale exige le même traitement que pour l’adulte, mais il faut éviter les préparations procaïnées (pénicillines retard) avant l’âge de trois ans.