Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Suède (suite)

De l’alphabet romain, les peuples du Nord ont tiré leurs runes. Des inscriptions plus ou moins bien déchiffrées subsistent sur des bijoux, des objets, et sur les célèbres pierres runiques, qui portent parfois des scènes figurées et dont certaines demeurent dressées à leur emplacement d’origine. L’époque proprement dite des Vikings, guerriers et navigateurs, marchands déjà cosmopolites et amateurs d’art (fin du viiie s. - début du xie), a laissé des traces de villes-marchés (fouille de Birka, dans une île du lac Mälaren) et un art décoratif d’une luxuriance particulière, associant les représentations figuratives et le décor curviligne, l’entrelacs byzantin et sa variante zoomorphe venue d’Irlande* (sculptures sur bois, armes, objets et bijoux de métal incrustés d’argent et d’or, pierres tombales).


Le Moyen Âge

• Au début du xie s. commence à se développer un art chrétien qui prolongera pendant un certain temps les formes d’ornementation des Vikings ainsi que leur architecture de bois (nombreuses églises, pour la plupart disparues).

En Scanie, province longtemps unie au Danemark, subsiste la cathédrale romane de Lund (xiie s.), qui s’apparente à des modèles lombards et rhénans. La pénétration des cisterciens bourguignons a pour témoins les ruines de l’abbaye d’Alvastra (1143) et l’église de Varnhem, rebâtie au xiiie s. dans un style de transition romano-gothique.

• Le gothique français est représenté par les cathédrales d’Uppsala (xiiie-xve s.) et de Västerås, tandis que la cathédrale de Linköping relève de l’influence germanique, qui l’emporte au xve s. Du début de ce siècle date la belle église, aux voûtes complexes, du couvent de Vadstena, maison mère de l’ordre de Sainte-Brigitte. Un centre important de l’architecture gothique est l’île de Gotland, qui ne conserve pas moins de quatre-vingt-dix églises anciennes ; dans la ville fortifiée de Visby, un musée abrite d’importants spécimens de sculpture sur bois : Mater dolorosa, saints, crucifixions. Plus caractéristiques que les grands sanctuaires, certaines petites églises conservent des peintures de voûtes exécutées à la fin de l’époque gothique dans un style populaire.


Le xvie et le xviie siècle

Sous Gustave Ier Vasa, au xvie s., l’église catholique cède le pas à la Réforme. On ne construit plus d’églises, et l’art se met au service d’un pouvoir séculier qui entreprend de hausser le pays au niveau des grands États européens.


Architecture

D’importants travaux de fortification sont effectués au début de cette période : châteaux forts à tours rondes (Landskrona, Gripsholm, Vadstena, reconstruction de la forteresse de Malmö), places fortes de Marstrand et de Karlskrona. Dès la fin du xvie s., certains de ces châteaux, et de plus anciens (Kalmar), reçoivent des aménagements d’une qualité supérieure ; de nouveaux sont entrepris : Uppsala, Svartsjö, doté d’une cour circulaire.

Toutefois, la Suède ne possède pas encore d’école nationale, et la véritable pénétration du classicisme s’accomplira au cours du xviie s. sous les influences extérieures : allemande (église de la Trinité de Kristianstad), hollandaise (série de châteaux, notamment en Scanie, et d’hôtels urbains), puis française avec les architectes Simon († 1642) et Jean (1620-1696) de La Vallée. Un Suédois, Nicodemus Tessin l’Ancien (1615-1681), commence en 1662 le château de Drottningholm, près de Stockholm*.


Sculpture

Elle est soumise à diverses influences étrangères et ne joue qu’un rôle effacé.


Peinture

Le principal artiste officiel est l’Allemand David Klöcker von Ehrenstrahl (1629-1698), surtout portraitiste et animalier-paysagiste, entouré de quelques Suédois et Hollandais.


La fin du xviie siècle et le xviiie siècle

L’influence française devient capitale grâce à l’inclination du roi Gustave III et aux voyages que font à Paris de nombreux artistes suédois. L’Académie suédoise des beaux-arts est créée en 1735 par le peintre français Guillaume Taraval (1701-1750).


Architecture

Nicodemus Tessin le Jeune (1654-1728) reprend la décoration intérieure du château de Drottningholm et dessine son parc à la française. Il entreprend en 1697 sa grande œuvre, la reconstruction du château royal de Stockholm, et fait appel à de nombreux artistes et ouvriers français pour décorer celui-ci. Son fils, le diplomate Carl Gustav Tessin, rassemble lors de ses séjours à Paris une monumentale collection de livres, de gravures et de dessins (notamment des projets d’architecture), qui sont aujourd’hui l’une des richesses du Musée national de Stockholm. Le château royal, terminé vers 1754 seulement, donne une impulsion qui se répercute dans les œuvres d’autres architectes, tels Carl Harleman (1700-1753), qui y collabore d’ailleurs, et Carl Fredrik Adelcrantz (1716-1796). Jean Eric Rehn (1717-1793) évolue du style rococo jusqu’à un néo-classicisme qu’illustrent Erik Palmstedt (1741-1803) et le Français Louis Jean Desprez (1743-1804).


Sculpture

Le Flamand Nicolas Millich (seconde moitié du xviie s.) et l’Allemand Burchard Precht le Vieux (1651-1738) travaillent pour les châteaux et surtout pour l’aménagement intérieur des églises. Les Français René Chauveau (1663-1722) et Bernard Fouquet (ainsi que son frère aîné, le peintre Jacques Fouquet) participent à la première campagne de décoration du château royal (ensembles rappelant Versailles avec une tendance au baroque). Le milieu du xviiie s. est dominé par d’autres Français, tels Jacques Philippe Bouchardon* et Pierre Hubert Larchevêque (1721-1778 ; statue équestre de Gustave-Adolphe). Larchevêque forme le Suédois Johan Tobias Sergel (1740-1814), qui travaillera à Paris, à Rome et à Stockholm, et qui sera gagné par l’idéal néo-classique (l’Amour et Psyché, Musée national).


Peinture

Un certain nombre d’artistes, qui font une bonne part de leur carrière en France, ont peu d’influence sur révolution artistique de la Suède : Charles Boit (miniaturiste sur émail, 1663-1727), Carl Gustav Klingstedt (miniaturiste, 1657-1734), Gustaf Lundberg (pastelliste, 1695-1786), Per Adolf Hall (miniaturiste, 1739-1793), les bons portraitistes Alexander Roslin (1718-1793) et Adolf Ulrik Wertmüller (1751-1811 ; carrière en France et aux États-Unis), le miniaturiste et gouachiste Niklas Lafrensen le Jeune, dit Lavreince (1737-1807), dont on gravera les sujets légers. D’autres peintres travaillent en Allemagne ou, comme le puissant Carl Gustaf Pilo (1711-1793), au Danemark.