Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

soufre (suite)

Principaux dérivés

L’hydrogène sulfuré, gaz dont le point d’ébullition est – 60 °C, s’ionise en solution dans l’eau et se comporte comme un diacide faible :
H2S ⇄ HS + H+ ;
HS ⇄ S– – + H+.

L’hydrogène sulfuré présente de nettes propriétés réductrices. Ainsi, H2S brûle avec l’oxygène de l’air selon la réaction :
2 H2S + O2 → 2 S + 2 H2O,
ou 2 H2S + 3 O2 → 2 SO2 + 2 H2O.

La première de ces réactions est la source du soufre produit à Lacq à partir d’un gaz naturel riche en hydrogène sulfuré.

En solution, on observe ainsi :
H2S + Cl2 → 2 HCl + S ;
H2S + H2O2 → 2 H2O + S ;
H2S + 2 FeCl3 → 2 FeCl2 + 2 HCl + S ;
de même, l’hydrogène sulfuré réduit les bichromates et les permanganates.

La formation de sulfures métalliques a été souvent utilisée en analyse minérale et peut être organisée pour donner des groupes limités de sulfures selon les conditions de précipitation.

Le dioxyde de soufre est un gaz dont le point d’ébullition est – 10 °C. Il se dissout dans l’eau en manifestant des propriétés de diacide assez faible et donne des séries de sels tels que les sulfites K2SO3, CaSO3 ou les hydrates Na2SO3, 7 H2O ; ZnSO3, 1/2 H2O.

Le dioxyde de soufre a des propriétés réductrices. Il se combine à l’oxygène pour donner du trioxyde de soufre SO3. Il réduit en milieu acide les iodates en iode, et l’iode peut même être réduit en acide iodhydrique par un excès de dioxyde de soufre en solution dans l’eau :
2 IO3 + 5 HSO3 + 2 H+ → I2 + 5 HSO4 + H2O ;
I2 + SO2 + 2 H2O → 2 HI + H2SO4.

Les solutions acides d’un permanganate ou d’un chromate sont réduites par les solutions d’acide sulfureux (solution de dioxyde dans l’eau) respectivement en sel manganeux et en sel chromique.

Le dioxyde de soufre peut également être réduit, par exemple par l’hydrogène ou l’hydrogène sulfuré :
SO2 + 3 H2 → 2 H2O + H2S ;
SO2 + 2 H2S → 2 H2O + 3 S.

Le trioxyde de soufre a une molécule plane à l’état gazeux et se présente à la température ordinaire à l’état solide, dont on connaît trois formes, la présence de traces d’eau favorisant la formation d’aiguilles constituées par des macromolécules linéaires : cette forme constitue le trioxyde β.

L’anhydride sulfurique est oxydant et peut provoquer des réactions d’addition. Avec l’eau, il donne l’acide sulfurique H2SO4. Avec des oxydes basiques, il donne des sulfates :
BaO + SO3 → BaSO4.

Il s’additionne au fluorure d’hydrogène en donnant l’acide fluorosulfonique FSO3H et au chlorure d’hydrogène en donnant l’acide chlorosulfonique ClSO3H (ou chlorhydrine sulfurique).

L’acide sulfurique est fabriqué industriellement en très grande quantité. La majeure partie provient du procédé dit « de contact », qui comporte une préparation de trioxyde de soufre par oxydation catalytique du dioxyde, puis dissolution de ce trioxyde dans l’acide sulfurique : on obtient ainsi des oléums (solutions concentrées de trioxyde de soufre). Un autre procédé, dit « des chambres de plomb », fournit des solutions aqueuses d’acide sulfurique adaptées à la fabrication des superphosphates. Ce procédé consiste à envoyer dans de grandes chambres de plomb un mélange de dioxyde de soufre, d’air et d’eau pulvérisée en présence de vapeurs nitreuses dont les gaz (SO2 et air) se sont chargés en traversant des tours (dites « de Glover ») où ruisselle de l’acide chargé de produits nitreux.

Les vapeurs nitreuses catalysent la formation d’acide sulfurique : SO2 + 1/2 O2 + H2O → H2SO4 : une partie (env. 25 p. 100) de l’acide se forme déjà dans la tour de Glover. Le gaz traverse quelques chambres à parois de plomb (ce métal résiste bien à l’acide sulfurique), puis pénètre dans une tour (dite « de Gay-Lussac ») où ruisselle un acide sulfurique assez concentré provenant de la tour de Glover. Dans cette tour de Gay-Lussac, presque tous les produits nitreux se dissolvent dans l’acide ruisselant dans la tour et sont ainsi récupérés. L’acide des chambres titre environ de 65 à 70 p. 100 d’acide sulfurique. L’acide chargé de produits nitreux est versé ensuite en haut de la tour de Glover, dans laquelle il abandonne les produits nitreux aux gaz chauds qui circulent à contre-courant et proviennent des fours de production du dioxyde de soufre après un dépoussiérage qui est nécessaire si ce dioxyde est formé par grillage de pyrite ou d’un autre sulfure.

L’acide recueilli à la base de la tour de Glover est plus concentré que l’acide qui est versé en haut de cette tour et il est aussi plus abondant.

L’acide sulfurique à 100 p. 100 est un liquide visqueux ; on observe l’existence de plusieurs hydrates de trioxyde de soufre. L’acide sulfurique donne avec l’eau un azéotrope à 98,3 p. 100 d’acide pour une pression d’une atmosphère et à une température de 338 °C, qui est une température maximale d’ébullition.

L’acide à 100 p. 100 est faiblement ionisé, et la dissociation ionique est dans ce cas :
H2SO4 ⇄ HSO3+ + OH
ce qui explique les réactions de sulfonation des hydrocarbures aromatiques par l’acide sulfurique très concentré ou les oléums.

En solution aqueuse, l’acide sulfurique est un diacide fort, et la dissociation ionique se fait nettement en deux étapes :
H2SO4 + H2O ⇄ H3O+ + HSO4 ;
H2O + HSO4 ⇄ H3O+ + SO4– –.

L’acide sulfurique est un acide fixe et stable qui déplace de nombreux acides de leurs sels (HF, HCl par exemple).

Il est oxydant et à ce titre est réduit à chaud par le cuivre, le soufre, le carbone avec dégagement de dioxyde de soufre. Dilué par de l’eau, il attaque certains métaux comme le zinc ou le fer avec dégagement d’hydrogène.

Il donne naissance à différentes familles de sels (hydrogénosulfates, pyrosulfates et surtout sulfates neutres).