Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Soissons (suite)

Vieille ville épiscopale et administrative sous l’Ancien Régime, elle a pris depuis le xixe s. une importance industrielle croissante, au point que le secondaire l’emporte largement (60 p. 100) sur le tertiaire (35 p. 100). L’industrie est dominée par la métallurgie (47 p. 100), avec surtout deux firmes parisiennes de chauffage (Société générale de fonderie, Établissements Bignier-Schmid-Laurent). Le reste se partage entre les industries alimentaires (sucrerie, minoterie, conserverie), la verrerie (Saint-Gobain à Vauxrot), le papier-carton (Cartonneries de Saint-Germain à Villeneuve-Saint-Germain), la chimie (Société A. Wolber [pneumatiques]). À la transformation déjà ancienne de produits locaux se sont ajoutées des implantations de l’extérieur, surtout de Paris, Soissons disposant de liaisons faciles par rail et par eau avec la région parisienne.

La fonction tertiaire reste en retard sur le développement industriel, surtout pour l’encadrement moyen et supérieur, voire le commerce (le rayon d’action est limité à 15 ou 20 km par Compiègne, Saint-Quentin, Laon, Reims et Château-Thierry, ou même Paris).

Cependant, l’agglomération est en plein essor économique (taux de croissance industrielle de 3 p. 100 par an et net développement d’un emploi féminin longtemps très réduit) et démographique : son accroissement de 1962 à 1975 est le plus fort des villes de l’Aisne (près de 2 p. 100 par an), dû à égalité au croît naturel et à un solde migratoire positif, la ville même continuant à croître et à attirer les immigrants. Soissons devient ainsi le centre directeur d’une vallée où affluent les industries parisiennes le long de l’axe de l’Aisne canalisée, en cours d’équipement au gabarit européen dans la perspective d’une liaison Seine-Est.

J.-P. M.


L’histoire

La cité romaine d’Augusta Suessionum, capitale des Suessions, s’élevait au nord-ouest de la ville actuelle, sur la rive droite de l’Aisne.

La religion chrétienne y fut prêchée dès le iiie s. et illustrée par le martyre, vers 287, des saints Crépin et Crépinien, cordonniers de leur état, qui devinrent plus tard les patrons de cette corporation. Dès 290, un évêque y était établi. En 486, Clovis y remporta une victoire sur Syagrius, chef de l’armée romaine ; en 511, la ville devenait la capitale du royaume mérovingien de Neustrie. Le duc Hugues le Grand, père d’Hugues Capet, parvint à s’emparer de Soissons en 948.

Au xe s. fut créé un comté de Soissons, qui fut possédé successivement par les maisons de Bar, de Nesle, de Coucy et de Luxembourg. En 1487, le comté passa aux Bourbons par le mariage de Marie de Luxembourg avec François de Bourbon-Vendôme, et, au xvie s., une partie du comté revint à la Couronne. L’autre partie échut en 1557 à Louis Ier de Bourbon, premier prince de Condé et tige de cette maison, devint ensuite l’apanage de la branche cadette des Condés, les comtes de Soissons, puis, au xviie s., des Savoie-Carignan et enfin des Orléans.

Au xiie s., le roi Louis VII avait octroyé à Soissons une charte communale. La commune fut abolie au début du xive s. et remplacée par un régime prévôtal. Sous l’Ancien Régime, Soissons, rattachée à l’intendance de l’Île-de-France, était le siège de nombreux services administratifs : baillage, généralité, élection, bureau des finances, maîtrise des eaux et forêts, etc.

En 1814, puis en 1815, les armées coalisées réussirent à neutraliser la ville et à franchir l’Aisne avant de marcher sur Paris. En 1870, Soissons opposa une vive résistance aux troupes allemandes et subit un violent bombardement avant de capituler.

Au cours de la Première Guerre mondiale, les Allemands s’en emparèrent dès le 2 septembre 1914, mais ils en furent délogés quelques jours plus tard. Le front se fixa dès lors au nord de la cité, qui fut fréquemment bombardée. L’offensive de Ludendorff en mai 1918 provoqua de nouveau l’occupation de Soissons par les Allemands. L’attaque de Mangin délivra définitivement la ville le 2 août 1918. Lors de l’armistice, Soissons était en grande partie détruite.

P. R.


Soissons ville d’art

Les œuvres d’art conservées à Soissons appartiennent à son passé médiéval. La plus vénérable par sa date est l’ancienne abbaye de Saint-Médard, qui remonte à l’époque carolingienne. C’est à cette abbaye que Louis le Pieux donna en 827 le célèbre Évangéliaire enluminé dit « de Saint-Médard de Soissons », aujourd’hui à la Bibliothèque nationale. Les cryptes voûtées d’arêtes de l’abbaye sont un rare témoin de l’art carolingien. De l’ancienne église Saint-Pierre-au-Parvis subsistent la façade et deux travées de la nef de la fin du xiie s.

Le bras sud du transept de la cathédrale, qui présente la particularité d’être arrondi, date de la même époque. Le reste de la cathédrale est du xiiie s. Commencé un peu avant 1200, le chevet en était terminé en 1212. Contemporaine de la cathédrale de Chartres, la cathédrale Saint-Gervais-et-Saint-Protais est une œuvre d’un gothique très pur, proche de l’art chartrain dans ses proportions et dans son élévation, et plus élégante même dans ses arcs-boutants, mais la façade a fait l’objet de remaniements et les vitraux ont été dispersés. Le bras nord du transept est un peu plus récent que le reste de l’église, et des chapelles latérales ont été ajoutées au cours des siècles.

L’église de l’ancienne abbaye de Saint-Léger, aujourd’hui musée, possède un chevet, une crypte et un transept du début du xiiie s., mais la nef a été refaite au xviie s. Le musée abrite des collections antiques et médiévales ainsi que des peintures et des sculptures françaises des xviie et xviiie s. Enfin, à l’entrée méridionale de la ville, se dresse la magnifique façade de Saint-Jean-des-Vignes, élevée de la fin du xiiie s. au début du xvie s. L’église elle-même a disparu, mais une partie du monastère adjacent a été conservée : le cellier et le réfectoire à deux nefs du xiiie s., deux galeries du grand cloître du xive s., une partie du petit cloître et le logis de l’abbé du xvie s.

A. P.