Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Saos ou Sôs

Ensemble de populations ayant occupé jadis les rives ouest et sud du lac Tchad ainsi que le bas Chari et dont le territoire est actuellement réparti entre le Nigeria, le Nord-Cameroun et le Tchad.


Le nom des Saos est connu au sud jusqu’au pays des Falis et la Bénoué, où l’archéologie confirme leur influence.

Les Saos ont laissé dans la légende le souvenir de géants merveilleux, et la plupart des sites archéologiques des basses terres qui s’étendent du Bornou au Chari leur sont attribués.

Les Saos du Nord ont été conquis du xive au xvie s. par l’empire du Bornou*, puis écrasés et assimilés : leurs descendants se trouvent au sein du peuple Kanouri. Les Boudoumas, insulaires du lac Tchad, ainsi que les Gamergous du sud du Bornou et surtout les Kotokos du bas Chari paraissent être les descendants directs des Saos. L’étude de ces peuples, confrontée à l’archéologie, permet de se faire une idée de la civilisation des anciens Saos. Des fouilles menées depuis 1936 au Tchad et au Cameroun par Jean-Paul Lebeuf, et notamment à Makari, ont pu être confrontées avec celles qu’a effectuées Graham Connah à Daima (Nigeria).

On peut considérer comme certain que les Saos parlaient une ou plusieurs langues de la famille dite « tchadienne », dont le haoussa est actuellement le plus remarquable représentant. Cette famille groupe de nombreuses langues parlées par des peuples dont les civilisations sont fort variées, mais elle présente avec le groupe chamito-sémitique quelques affinités structurales qui doivent s’expliquer par des contacts, vers 5000 avant notre ère, avec les peuples pasteurs qui ont occupé alors le Sahara.

La chasse a longtemps gardé un grand rôle chez les Saos, et la pêche reste une activité majeure des Boudoumas et Kotokos. Les traditions recueillies par Jean-Paul Lebeuf parlent de chasseurs à la sagaie venus du nord (Kanem), de chasseurs à l’arc venus de l’est (lac Fittri) et de pêcheurs venus du sud-ouest (Bénoué). Cette image d’éléments composites confluant pour former une ethnie est sans doute vraie dans ce cas, comme partout en Afrique. Mais il paraît s’agir ici de traditions plus récentes se rapportant plus spécialement à la seule ethnie kotoko.

L’agriculture, fondée sur les céréales et particulièrement sur le mil, ne paraît s’être établie qu’au Ier millénaire av. J.-C., et le fer n’est sans doute apparu qu’au ve s. de notre ère.

Lebeuf a distingué trois principaux types de sites saos, d’après leur morphologie, et il a tendance à donner un sens chronologique à ce classement. Sao I correspond à des petits sites isolés, toujours abandonnés depuis et qui étaient occupés par une population faible et dispersée. Les sites de Sao II, qui sont souvent ceux de villes kotokos modernes, témoignent d’une concentration importante de la population et d’une véritable urbanisation, marquée par des murailles. Ils ne seraient jamais antérieurs au xiie s. Sao III correspond à de petits centres analogues aux premiers, mais beaucoup plus récents.

Sao III est une civilisation de type soudanais qui s’est transmise en partie aux contemporains. Elle est caractérisée par un grand usage de la terre cuite, notamment par de remarquables statuettes anthropomorphes. La sépulture consistait en d’énormes jarres enfouies. Il a fallu l’islām pour effacer ces caractères chez les Kotokos modernes.

À partir du xiie s., les Saos paraissent donc s’être organisés en cités-États qui évoquent celles des Haoussas. Tandis que ceux du Nord étaient peu à peu écrasés par le Bornou et que les Boudoumas gardaient leur liberté lacustre, cette civilisation continuait à se développer chez les Kotokos, isolés dans le Sud.

Cependant, depuis le xvie s., les Kotokos, ou du moins une partie d’entre eux, paient tribut au Bornou et ils ne peuvent se tenir à l’écart des remous politiques des empires soudanais. De la fin du xvie à celle du xviiie s., toutes leurs cités passent successivement à l’islām. Vassales du Bornou, elles essaient de garder de bonnes relations avec le Baguirmi et se soumettent à temps, en 1892, au conquérant Rabah, ce qui leur évite de trop grands désastres avant la conquête européenne, qui s’est produite en 1900.

Partagés entre le Tchad et le Cameroun et isolés dans une zone marginale, les Kotokos modernes, derniers héritiers des Saos, sont cependant une société peu dynamique.

Y. P.

 J.-P. Lebeuf, Archéologie tchadienne (Hermann, 1962).

sapeurs-pompiers (corps des)

Formation militaire ou communale chargée des secours et de la protection contre les incendies ou accidents de toute nature menaçant la sécurité publique.



Bref aperçu d’une très longue histoire

Dans l’Antiquité, Hébreux, Grecs et Égyptiens organisent, pour se protéger du feu, des patrouilles chargées de donner l’alarme en cas de besoin. Vingt ans avant notre ère, Rome, à son tour, prend des mesures pour lutter contre le feu. En France, il faut attendre les incendies catastrophiques du Moyen Âge pour que s’esquisse une organisation qui fait intervenir le guet bourgeois, les corporations du bâtiment, les moines et les « filles communes chargées de venir à la rescousse et de demeurer au feu, de porter l’eau et faire leur devoir à peine d’en être punies par main de bourreaux, fustigées et bannies à jamais hors de la cité ».

Pendant des siècles, le procédé le plus efficace consiste à faire la part du feu en démolissant les maisons les plus menacées par l’incendie pendant que les sauveteurs font la chaîne des seaux d’eau. En 1699, François Dumouriez du Périer, comédien de Molière, importe de Hollande une machine « propre à jeter l’eau contre le feu ». Louis XIV lui donne pour trente ans le privilège de la fabrication et de l’exploitation de ces pompes, servies pendant quelques années par des bonnes volontés de rencontre. Le premier corps de gardes-pompes « toujours en état de servir lesdites pompes » est créé le 23 juin 1716. En 1725, ces gardes-pompes sont dotés d’un uniforme. En 1733, Louis XV décrète la gratuité des secours et, à l’exemple de Paris, les grandes villes du royaume s’équipent progressivement. En 1789, la capitale dispose de 263 gardes-pompes, 56 pompes et 42 tonneaux sur roues. La Convention intègre les gardes-pompes dans une organisation inspirée de la garde nationale. Mais dans la nuit du 1er au 2 juillet 1810, l’incendie tragique de l’ambassade d’Autriche, où l’impératrice manque périr, sonne le glas du corps des gardes-pompes parisiens.