Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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saisies et voies d’exécution (suite)

Le déroulement de la procédure varie selon que la saisie est une mesure conservatoire ou une voie d’exécution et, dans ce dernier cas, suivant que son objet est un meuble ou un immeuble, qu’il est ou non aux mains du débiteur, que le créancier possède ou non un titre exécutoire ; un examen sommaire des procédures appelées saisie-exécution, saisie-arrêt, saisie conservatoire et saisie immobilière fait apparaître ces distinctions.


La saisie-exécution

La saisie-exécution est le type même des saisies mobilières ; elle permet au créancier muni d’un titre exécutoire de faire vendre un meuble corporel appartenant à son débiteur et détenu par lui pour se faire payer sur le prix de la vente. Il s’agit d’une procédure « extra-judiciaire », qui se déroule sans intervention du juge et qui est relativement simple. La créance doit être certaine, liquide et exigible : elle doit être constatée par un titre exécutoire, mais il existe sur ce point une exception en faveur de l’État, des départements et des communes. Le bien saisi doit être un meuble corporel, propriété du débiteur saisi et détenu par lui ; il doit, en outre, être saisissable.

La procédure comprend trois phases successives : commandement de payer, saisie proprement dite et vente. Le commandement de payer est destiné à avertir le débiteur et à le mettre en demeure de payer ; il s’effectue par exploit d’huissier notifié au débiteur. A l’expiration du délai dont est assorti le commandement de payer, l’huissier mandaté procède à la saisie, c’est-à-dire qu’après avoir invité de nouveau le débiteur à acquitter sa dette, et faute par ce dernier de le faire, il procède à un inventaire minutieux des meubles corporels saisissables et en établit un procès-verbal qui comporte la désignation d’un gardien pour les objets saisis ; si l’huissier ne trouve rien à saisir, il dresse un procès-verbal de carence. La vente, ou réalisation du bien, suivra la saisie, mais ne pourra intervenir immédiatement, cela pour permettre, d’une part, au saisi de rassembler éventuellement les fonds nécessaires au paiement et, d’autre part, au saisissant d’effectuer les formalités préparatoires à la vente ; celle-ci se fait par adjudication aux enchères publiques, et l’adjudicataire est le plus fort enchérisseur. Les incidents qui peuvent surgir au cours de cette procédure, qu’ils émanent du saisi lui-même, d’un tiers ou d’autres créanciers du saisi, sont de la compétence des juridictions civiles.


La saisie-arrêt

La saisie-arrêt, parfois appelée saisie-opposition, a pour objet de permettre au créancier saisissant d’obtenir son paiement du tiers saisi, qui est le détenteur du bien saisi, et ce par-dessus la tête de son propre débiteur, en interdisant au tiers saisi (débiteur de son débiteur) de remettre à ce dernier les meubles ou les sommes qui lui sont dues et en se faisant payer sur ces sommes ou sur la valeur de ces meubles. Tout créancier, qu’il soit chirographaire, hypothécaire ou privilégié, a la faculté de saisir-arrêter, pourvu que sa créance soit certaine et exigible et sans qu’il soit nécessaire qu’elle soit « liquide », dès lors qu’une évaluation provisoire en est faite par le juge compétent pour l’autorisation ; le créancier peut recourir à cette procédure s’il n’est muni que d’un titre non exécutoire (et même, dans certaines conditions, sans aucun titre, mais en vertu d’une autorisation judiciaire). Le tiers saisi peut être le saisissant lui-même ou bien, par exception, une personne morale de droit public, tels l’État*, les collectivités* locales, les établissements publics : il s’agit de saisir entre leurs mains des sommes qu’ils peuvent devoir à des personnes privées. La saisie-arrêt ne peut porter que sur les droits du saisi à la remise d’objets mobiliers saisissables.

La procédure de saisie-arrêt se différencie fondamentalement de celle de la saisie-exécution, dès l’origine, par l’absence de commandement de payer et de mise en demeure, et elle bénéficie ainsi d’un effet de surprise certain. Elle comprend deux phases : la première est conservatoire et vise à rendre indisponible le droit saisi-arrêté, tandis que la seconde, qui est une mesure d’exécution, permet au créancier saisissant de se payer sur ce même droit.

• La phase conservatoire comporte trois étapes successives, dont les deux dernières ont leur dénouement devant un juge, à l’opposé de la saisie-exécution. La saisie-arrêt débute, à la diligence du saisissant, par un exploit, dit « de saisie-arrêt », qui immobilise la créance du débiteur saisi au profit du saisissant, en la plaçant dans sa totalité sous main de justice, avec interdiction absolue, pour le tiers saisi, de payer ce qu’il doit ; puis le saisissant va devoir dénoncer cet exploit de saisie-arrêt à son débiteur et l’assigner en validité de la procédure, ce qui permettra au juge de statuer sur l’existence de la créance invoquée et d’apprécier la validité de la saisie : enfin, le saisissant va devoir, d’une part, signifier au tiers saisi l’assignation en validité qu’il a lancée contre le saisi, ce qui sera la « contre-dénonciation au tiers saisi de la demande en validité », et, d’autre part, assigner devant le tribunal qui connaît l’instance en validité le tiers saisi en « déclaration affirmative », formalité qui permettra au saisissant de connaître exactement la réalité et l’étendue de l’obligation du tiers saisi envers le saisi.

• La phase d’exécution est l’aboutissement de cette procédure ; il s’agit du jugement de validité qui réalise l’attribution du droit saisi-arrêté au saisissant, avec possibilité pour lui de se payer sur ce droit.

Des difficultés peuvent surgir au cours de la procédure de saisie-arrêt : soit que le saisi cherche à obtenir la mainlevée ou la limitation de la saisie-arrêt par « cantonnement » de cette saisie ; soit que d’autres que le premier saisissant procèdent, sur les mêmes sommes, à des saisies-arrêts ultérieures mais concurrentes ; soit encore qu’un tiers, cessionnaire de la créance saisie-arrêtée, entre en conflit avec le saisissant. Il s’agira alors d’incidents de procédure, qui nécessiteront dans la plupart des cas l’intervention du juge.